"Repères" du bac philo : une journée dans la vie de Kevin Sartre
Le jour J, Kevin a bien failli perdre ses repères lors de l’examen. Mais ses ressources philosophiques (idéal/réel, analyse/synthèse, immanent/transcendant…), il les a mobilisées après pour tout autre chose : la conquête de Jennifer.
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« I will surviiiiiiiiive… » tonitrue le réveil. Kevin entrouvre un œil. Aujourd’hui, c’est le bac philo. Hier encore, il ne devait passer le bac qu’en puissance. L’examen lui semblait vague, abstrait, lointain, pas effrayant du tout…
Kevin se fait secouer par sa mère. Il se sentait déjà obligé de se lever. Voilà qu’en plus, il y est contraint.
Sa mère a posé devant Kevin deux croissants, quatre barres énergétiques, des corn-flakes et du chocolat chaud. Il réclame un Red Bull. D’un point de vue objectif, c’est beaucoup. Mais du côté subjectif, c’est le minimum avant d’aller…
Kevin n’en mène pas large. Sa mère le convainc qu’il va s’en sortir s’il utilise intelligemment tout ce qu’il a appris en philo pendant l’année. Kevin, lui, n’en est pas persuadé.
Zut ! Kevin vient de rater son bus. Dans l’absolu, ce n’est pas une catastrophe. Mais relativement à son niveau en philo, il vaudrait mieux ne pas arriver en retard à l’épreuve.
Kevin arrive tout essoufflé dans la salle d’épreuve et trouve sa place. Il analyse rapidement la distance qui le sépare de son copain Mikaël, de la porte, de la surveillante, du radiateur. En quelques secondes, la synthèse est faite :…
Les sujets sont distribués. Kevin a longtemps cru pouvoir tomber sur l’une des quatre notions qu’il a bien révisées. Maintenant, il sait que ce n’est pas le cas.
Kevin panique. Quelle est l’origine de son affolement ? Il a du mal à choisir entre les trois sujets. Mais le fondement de son état est ailleurs : il sait qu’il n’a pas fait grand-chose en philo durant l’année.
En théorie, Kevin doit s’emparer du sujet qu’il aura le plus de facilité à traiter. En pratique, il n’a pas encore choisi entre la dissertation et l’explication de texte.
Kevin opte finalement pour le texte. Il ne le comprend pas vraiment, mais il tente tout de même de l’expliquer.
L’examinatrice lui arrache la copie des mains. Kevin se défend. Elle insiste. Lui aussi. Sur le plan légal, elle a raison : l’heure a sonné. Mais cela ne paraît pas légitime à Kevin : il n’a même pas eu le temps d’écrire son nom ! …
L’examinatrice tente de raisonner Kevin en lui expliquant qu’il doit respecter le principe d’égalité entre les candidats. De plus en plus énervé, le jeune homme lui rétorque qu’il faut aussi comprendre l’identité de chacun. Elle aussi n…
Kevin se retrouve dans le couloir. Tous ses copains racontent leurs plans, exposent leurs arguments, parient sur leur note. Kevin, lui, est incapable d’exprimer quoi que ce soit de manière discursive. Mais c’est intuitif : il s’est…
Soudain, les nuages se dissipent. La cause ? Il vient de retrouver Jennifer, la plus belle fille de la classe, l’élue de son cœur, qui vient de sortir de la salle d’examen. Du coup, Kevin a tout autre chose en tête que sa lamentable…
Dans un monde idéal, Kevin, avec un sourire ravageur, une voix chaude et une aisance de prince, inviterait Jennifer à venir prendre un café chez lui. Malheureusement, le réel est plus cruel : Kevin la regarde avec des yeux de chien…
Kevin prend son courage à deux mains. Il va inviter Jennifer au cinéma. Il est possible qu’elle accepte. Il est nécessaire qu’il tente sa chance. Que son projet de séduction réussisse, ça, c’est contingent.
Sur le principe, Jennifer n’est pas contre. Mais elle en redoute les conséquences.
Il faut choisir le film. En droit, Kevin a son mot à dire sur ce qu’il a envie de regarder. En fait, il n’en a cure. Jennifer choisit d’ailleurs un drame romantique, pas trop du genre de Kevin. Mais lui a autre chose en tête que de voir…
Les deux jeunes gens se sont installés dans la salle de cinéma. Kevin n’en revient pas. Hier encore, Jennifer paraissait inaccessible, lointaine, complètement transcendante. Maintenant, elle est assise à côté de lui, tout près,…
Formellement, la situation est simple. À la première scène un peu sentimentale, Kevin n’a qu’à se pencher vers Jennifer et l’enlacer. Matériellement, c’est plus compliqué. Jennifer est plus grande que Kevin, ce qui ne facilite pas le…
L’heure tourne. Et Kevin n’a encore rien tenté. D’accord, Kevin n’est pas du genre tombeur. C’est une espèce d’empoté dès qu’il s’agit de passer à l’action. Mais c’est surtout un individu fou de Jennifer, prêt à tout pour la conquérir. …
Deux méthodes s’offrent à Kevin : l’immédiate (se jeter sur Jennifer), ou plus fine, la solution médiate : lui prendre la main et la couvrir de baisers avant de progresser en douceur.
Kevin est tétanisé. Il n’arrive pas à se concentrer sur la passionnante histoire que raconte le film. Ce qui se passe à l’écran n’est pour lui qu’accidentel. Ce qui se trame entre Jennifer et lui, en revanche, est essentiel.
Du point de vue du concret, la situation n’évolue pas. Jennifer ne tourne toujours pas son visage vers Kevin. Ses mains sont sagement posées sur ses genoux. Elle semble absorbée par le film et ne fait pas attention à son voisin qui se…
Soudain, sur l’écran, le héros embrasse fougueusement l’héroïne. Kevin tressaille. Même s’il n’a qu’une ressemblance très vague avec Brad Pitt, il se décide à tenter une analogie : et s’il tentait auprès de Jennifer ce que le beau Brad…
Vertiges de l’analogie ! Ça a marché. Kevin est heureux. Il éprouve un sentiment universel qui le submerge : l’Amour, le vrai, le grand. Le baiser dans la salle obscure est certes une situation plutôt répandue et générale. Malgré cela,…