Entretien avec Boris Cyrulnik à l’occasion de la sortie de “Des âmes et des saisons”

Rien n’est jamais fixé une fois pour toutes : c’est la leçon que Boris Cyrulnik ne cesse d’illustrer. La résilience, ce processus par lequel un être peut revivre après un traumatisme, n’est pas seulement le concept que le neuropsychiatre a popularisé : il engage chez lui une vision du monde. Pas particulièrement optimiste, malgré ce que pourrait faire penser la douceur de son sourire. Mais ancrée dans le mouvement et la relation. 

C’est ce qu’il défend dans son dernier livre Des âmes et des saisons (Odile Jacob, 304 p., 22,90 € en version imprimée, 17,99 € en version dématérialisée) en explorant l’impact de l’environnement sur le psychisme : depuis l’utérus de sa mère jusqu’aux climats et « saisons » qui l’entourent, ce sont toutes les sensations, sentiments, choses et surtout récits qui lui permettent d’habiter le monde. 

Il applique même cette « psycho-écologie » à l’espèce humaine. Il détecte un basculement récent de l’humanité, qui pourrait correspondre en Occident aux années 1960-1970, celles de la révolution sexuelle, du développement technologique et de la prise de conscience écologique. La domination de l’humain sur la nature, et surtout des hommes sur les femmes, s’effondre, laissant l’humanité « sans boussole ». La violence, n’étant plus justifiée pour la survie de l’espèce, devient pure destruction. 

De cette catastrophe peuvent émerger d’autres dominations… ou bien une renaissance.