Gabriel Attal prévoit d’interdire TikTok aux lycéens ayant “moins de 16/20” en philosophie

Le « réarmement civique » passera-t-il par la philo ? Bientôt, les élèves de lycée qui n’auront pas le niveau requis en philosophie se verront « privés d’accès à la plateforme TikTok », a annoncé ce matin le Premier ministre Gabriel Attal. Une mesure choc qu’assume son initiateur.

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Les profs vont se réjouir, les élèves un peu moins : l’annonce qu’a faite Gabriel Attal ce matin va faire trembler les jeunes utilisateurs de TikTok, un réseau social et une plateforme de partage de contenus vidéo particulièrement populaire auprès des adolescents. « Dans le cadre de notre politique visant au réarmement civique et moral de la jeunesse, j’ai décidé, en accord avec Nicole Belloubet [ministre de l’Éducation nationale et de la Jeunesse], de contraindre la plateforme TikTok à bloquer systématiquement l’accès à son application, et son utilisation, par les lycéens français ayant obtenu moins de 16/20 de moyenne en philosophie », a déclaré le Premier ministre ce matin au Sénat, dans une prise de parole qui n’a pas manqué de surprendre les rangs de l’hémicycle mais a malgré tout fait naître quelques applaudissements spontanés.

« J’assume ce choix fort et engagé », a poursuivi Gabriel Attal, qui n’a pas détaillé la manière dont il ferait appliquer cette mesure drastique par l’entreprise internationale. « On peut vivre sans philosophie, mais pas si bien, et encore moins devenir un citoyen responsable » : pour justifier sa décision, le Premier ministre n’a pas manqué de pointer les dangers de l’application originellement chinoise – dont l’algorithme est régulièrement accusé de proposer des contenus « décadents » aux internautes occidentaux – en s’appuyant sur plusieurs études récentes. Il est à ce titre notable qu’il se positionne dans la droite ligne de la politique d’alerte menée par le gouvernement Macron. Pour rappel, celui-ci prend le problème de la nocivité présumée de TikTok sur les capacités d’attention et la santé mentale des adolescents très au sérieux, la Commission européenne ayant déjà ouvert une enquête sur TikTok, comme le rappelle Amnesty International, et les sénateurs évoquant même l’an dernier « un problème de santé publique ».

« Pendant que les petits Français scrollent sur des vidéos de chats ou, pire, de décapitations, les jeunes Chinois [où TikTok, malgré son origine chinoise, est interdit, et son équivalent Douyin drastiquement limité], eux, visionnent des programmes éducatifs. Ils découvrent Confucius et les grands sages », croit savoir Gabriel Attal. D’où l’idée d’interdire tout bonnement la plateforme aux aspirants bacheliers les plus dissipés, comme l’a confirmé dans la foulée la nouvelle porte-parole du gouvernement Prisca Thévenot.

Dans un deuxième temps, le ministre envisage également une réforme de l’enseignement de la philosophie, qui sera dispensé dès la classe de quatrième. Son objectif ? Lutter contre l’explosion d’un véritable « illettrisme philosophique » chez les jeunes générations, participant au processus de « décivilisation » qui toucherait la France [lire notre article]. « Je vais être clair : la philo, c’est le pilier d’une nation forte », a affirmé Attal avant de détailler les auteurs dont la lecture deviendra obligatoire. « Je veillerai personnellement à ce que les futurs citoyens de notre pays soient exposés aux plus grands philosophes. À ce qu’ils comprennent, grâce à Simone Weil, qu’il n’y a pas de droits sans devoirs. À ce qu’ils découvrent la valeur travail avec Hegel. À ce qu’ils contemplent la beauté de la loi morale avec Emmanuel Kant. »

Pour concrétiser ce programme ambitieux, le ministre se dit « ouvert à tout ». Ses équipes envisagent notamment d’imposer à l’application TikTok de diffuser de façon ciblée un quota minimum de vidéos présentant des grands concepts philosophiques. La production de ces contenus pourrait être pilotée par l’État via la création de « France Philo », une structure ad hoc. Les élèves privés de l’accès au réseau social pourraient être, eux, soumis à un QCM portant sur les grands auteurs de la discipline avant de pouvoir débloquer leur compte. Des aides sont également envisagées pour favoriser la vulgarisation de la philosophie auprès des jeunes publics : la transformation du « PassCulture » en un « chèque philo » ou encore la mise à disposition d’un numéro vert, « Allô Philo », ont été évoquées. « On va en leur en faire bouffer, des classiques, à ces petits c* », aurait très cavalièrement commenté, en off, un proche de Matignon désirant rester anonyme. Même si l’on peut déplorer une formule aussi fâcheuse et désobligeante dans l’entourage du Premier ministre, une chose semble toutefois claire : l’équipe ministérielle fait de l’enseignement de la philosophie, et de la lutte contre la dégradation du niveau scolaire des élèves de l’Hexagone, une cause majeure pour les années à venir.