Trump en grandes pompes

Pour financer sa campagne présidentielle, Donald Trump a lancé sa marque de baskets au prix fort de 399 euros la paire, à la mi-février. Des chaussures à son image : dorées, frappées d’un grand T et ornées du drapeau américain. Il y a mille raisons de s’inquiéter de la réélection possible de l’ex-président, mais il faut lui reconnaître son sens du marketing. « Le message, c’est le médium », diagnostiquait en 1964 l’intellectuel Marshall McLuhan dans Pour comprendre les médias. Trump l’a compris. Pour communiquer, il n’a pas besoin de délivrer de programme. Le simple fait de se vendre dit tout : il offre l’image rassurante de l’entrepreneur fortuné – en dépit de la mauvaise gestion de ses affaires qu’il voudrait faire oublier –, celle d’un capitaine d’entreprise astucieux qui fait profit de l’engagement public, convertissant la conviction en désir mercantile. Les acheteurs des « baskets Trump » achètent aussi un signe ostentatoire marquant l’appartenance à un groupe politique – un symbole identitaire chargé d’affects que l’habile candidat républicain canalise. Pour lui, la politique semble une opportunité comme une autre de faire des affaires. Mais le mélange des genres contribue paradoxalement à sa popularité : dans un pays fondé sur la méfiance à l’égard du pouvoir central, le modèle du président-entrepreneur transpose à la tête de l’État la logique familière et « pragmatique » du marché contre les dangers de l’« idéologie ». Au pays de la liberté, le businessman-roi présente, par son aisance financière, une aura d’indépendance contre les tentatives d’influences. Celle que Trump s’efforce de renvoyer… en dépit des faits !