Un silence religieux. La gauche face au djihadisme

Une recension de Catherine Portevin, publié le

D’où vient la réticence de la gauche à reconnaître la dimension religieuse du djihadisme ? se demande le journaliste Jean Birnbaum. Sur l’islam, on préférerait observer un « silence religieux », soit un gros déni. On peut discuter ce constat, c’est la démonstration qui est intéressante. La gauche conçoit l’émancipation comme affranchissement de la religion, ce qui la rend inapte à envisager la croyance religieuse d’abord comme puissance politique. Birnbaum tient ferme son angle pour relire l’histoire des intellectuels de gauche, frères en rébellion de mouvements de libération (du FLN en Algérie à la Théologie de la libération en Amérique latine) dont ils négligèrent la part religieuse. Relisant Marx à la lumière de Derrida, qui fut son maître, Birnbaum réexamine surtout comment la religion « est l’enjeu qui donne forme au marxisme » : si celle-ci est bien « l’opium du peuple », c’est parce qu’elle est « le cœur d’un monde sans cœur, tout comme elle est l’esprit d’un monde sans esprit ». Bref, Marx prenait le spirituel au sérieux, comme la nécessité de l’espérance. Si donc la gauche veut résister à la fusion dangereuse du « théologico-politique », elle ne peut critiquer la religion qu’en lui faisant une place, si l’on ose dire, de bonne foi : en sachant aussi ce que la raison moderne a hérité d’elle. Reste finalement à savoir ce que c’est que la politique.

 

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