Jean-Baptiste Brenet : “Dans la pensée arabe, la religion permet de communiquer les vérités philosophiques aux masses”
Les « Jeudis de la philosophie » à l’Institut du monde arabe font place aux mardis ! Pour la première conférence de cette nouvelle saison, le 4 octobre prochain à 19 heures, Jean-Baptiste Brenet, philosophe et organisateur de ces rendez-vous, s’intéresse au thème : « La philosophie pour tous ? Élitisme et raison publique ». Il nous en dit plus.
Votre conférence porte sur la question de “l’élitisme” dans la philosophie arabe. Comment définiriez-vous cet élitisme ?
Jean-Baptiste Brenet : On retrouve en effet de façon systématique dans la pensée arabe une distinction entre l’élite d’un côté (khâṣṣa), et la foule – ou la masse, le vulgaire – de l’autre (jumhûr, جمهور). On le lira à peu près partout, dans tous les champs (le droit, la théologie, la mystique, et la philosophie proprement dite) et à toutes les époques. Il semble s’agir d’une évidence, d’une donnée première : tous les hommes ne se valent pas, c’est l’idée principale ; ils ne sont pas d’un bloc, tous également doués. Non seulement ils sont différents, mais ils se hiérarchisent.
“La pensée arabe postule une inégalité foncière entre le philosophe et la foule”
Et qu’est-ce qui différencie concrètement la foule de l’élite ?
Pour Averroès, chez qui ce thème est majeur, la distinction tient aux capacités cognitives des uns et des autres. C’est la façon que nous avons de nous rapporter au réel, de le juger, qui dit de quel groupe nous relevons. L’élite, absolument parlant, ce sont les savants, c’est-à-dire les philosophes, et ce qui les singularise, c’est à la fois le type d’objet qu’ils étudient, à savoir l’essence des choses, plutôt que leurs symboles, leurs images, leurs simulacres, et le type de discours qui les convainc, emporte leur adhésion, à savoir la démonstration, plutôt que la dialectique ou la rhétorique. Tout le reste, c’est la foule – où l’on distinguera les théologiens, gens de dialectique, et le plus bas degré de la foule, les naïfs, gens de rhétorique. « L’élitisme », à un premier niveau, est là, dans cette conception d’une société où l’on sépare mentalement ceux qui savent, d’un côté, ceux qui comprennent tout, ceux pour qui le réel est intégralement transparent, et ceux, de l’autre, qui soit raisonnent, mais mal et dangereusement, soit ne pensent quasiment pas.
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