Un sol commun. Lutter, habiter, penser

Une recension de Alexandre Lacroix, publié le

Pour leur dixième anniversaire, les éditions Wildproject publient une « cartographie des pensées de l’écologie », en fait un recueil d’entretiens. Saluons le magnifique travail de cette maison d’édition indépendante, basée à Marseille, qui tient au dynamisme d’un homme, Baptiste Lanaspeze, et qui a permis à la France de rattraper un énorme retard de traduction des classiques de la pensée écologique : c’est bien grâce aux éditions Wildproject que l’on peut lire aujourd’hui J. Baird Calllicott et son Éthique de la terre, ou les textes fondateurs de la deep ecology dus à Arne Naess, ou encore l’incroyable essai que l’ethnomusicologue R. Muray Schafer a consacré aux sons des paysages, La Musique du monde.

Mais pour venir au recueil d’entretiens, Un sol commun, il permet de découvrir les grands axes de travail des militants, des journalistes engagés, des agronomes mais aussi des philosophes de l’Hexagone qui se passionnent pour les questions environnementales. Salutaire tour d’horizon. Avec une surprise : mis à part Catherine et Raphaël Larrère, aucun des auteurs sollicités, qu’il s’agisse de Bruno Latour, de Philippe Descola, d’Émilie Hache ou encore de Baptiste Morizot, n’emploie le mot « nature ». Ce que l’on voit se dessiner au fil des pages, c’est une pensée écologique qui ne se réfère plus à aucune entité métaphysique – la Nature ! – mais qui se penche sur des réseaux de relations entre vivants, entre humains et écosystèmes, entre espèces et territoires. Or on ne peut pas tout avoir : cette réflexion écologique qui assume la complexité est généreuse par les pistes de travail nombreuses qu’elle ouvre, mais, faute d’avoir un référent central, elle n’a pas encore, de l’aveu même de Baptiste Lanaspeze, « le bon récit cadre », elle est en quête de son « grand récit ». Retroussons nos manches ! Car le temps presse…

Sur le même sujet

Article
3 min
Sylvain Tesson

Pourquoi de nombreux voyageurs, illustres ou anonymes, ont-ils l’impression que, en Grèce, le soleil brille plus fort qu’ailleurs ?