5. Le mal a un visage

Comment naît une guerre civile dans une ville pacifique, et avec des gens amoureux de leur ville, qui plus est de bonne volonté ? Trois ingrédients y pourvoient. Le premier est la peur. Ici, elle est partout, panique, capable à tout moment de faire basculer les Odessites dans des conduites qu’ils n’avaient jamais imaginé tenir. Le deuxième, c’est le sentiment d’être de bonne foi, mais de demeurer incompris. Ivan pense sincèrement que les pro-maïdan voulaient détruire le champ du champ des merles. Il est persuadé que ceux qui ont tiré dans le centre ville étaient des provocateurs, et non les siens. Que la foule pro-européenne s’est défoulée sur des personnes blessées. Il croit à la supériorité de la Novorussie sur l’Ukraine nationaliste et libérale. Il se considère comme impartial et modéré. Il est convaincu que les pro-ukrainiens pratiquent la désinformation à grande échelle, tandis que les médias russes disent la vérité. A l’inverse, outre de solides raisons de ne plus supporter le pouvoir corrompu de Ianoukovitch et de ses amis, les pro-européens ont toutes les raisons de croire que les tireurs pro-russes ont été protégés par la police. Si l’on se bat, ce sera donc pour des valeurs, au nom de la pureté de ses convictions. Troisième ingrédient, enfin : un petit coup de pouce du hasard : un mouvement de foule, une étincelle. Elle a eu lieu à Odessa.