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Bac philo 2023

Corrigés du bac philo – filière générale : “Vouloir la paix, est-ce vouloir la justice ?”

Mathias Roux publié le 14 juin 2023 5 min

Si le conflit armé est un pur rapport de force, on voit mal comment il pourrait être conciliable avec l’harmonie de la vie sociale que vise la justice. Pourtant, n’est-il pas, à l’instar des accords de Munich, des paix injustes ? Notre désir de paix nous prémunit-il, plus généralement, de l’injustice ? Tels sont quelques-uns des dilemmes posés par ce sujet, que Mathias Roux tente de démêler. Attention, le plan et la réponse suivante sont une proposition de correction : il s’agit ici de pistes possibles de traitement du sujet et non de la copie-type attendue par les correcteurs !

 

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  • Principales notions mobilisées par le sujet : justice, État
  • Auteurs : Rousseau, Marx, Machiavel, Rawls

Introduction

Par définition, la guerre est un conflit entre des parties qui n’ont pas voulu ou ne sont pas parvenues à régler leur désaccord par un autre moyen. La guerre est donc un pur rapport de force. Par conséquent, son issue implique le plus souvent la soumission de l’un des belligérants à l’autre. Or, la situation qui en découle, le fait établi par ce rapport de force n’est pas juste pour la partie défaite car, comme le formule Rousseau, « force ne fait pas droit ».

À l’inverse, la paix indique une situation sociale où les parties prenantes s’accordent pour régler les conflits qui les opposent autrement que par la force. L’état de paix ne signifie donc pas qu’il n’y a aucun désaccord mais qu’il existe des procédures reconnues par tous pour arbitrer les différends qui naissent nécessairement de la vie en société. Aussi, la paix semble, de prime abord, correspondre à une situation de justice puisque les décisions prises dans ce cadre se font selon des règles acceptées, donc légitimes. En ce sens, vouloir la paix paraît bien correspondre à une volonté de justice.

Néanmoins, cette mise en relation repose sur un présupposé : l’équivalence entre légalité, légitimité et justice. Or, ce n’est pas parce qu’une loi ou une procédure est légale que la situation politique ou sociale qui en découle est légitime, donc juste. Parfois, refuser à tout prix l’option du conflit ouvert au nom de la préservation de la paix équivaut à faire perdurer une situation d’injustice, donc à la cautionner.

1) Si la force ne fait pas droit, alors vouloir la paix, c’est nécessairement viser la justice

Au livre II, chapitre 3 du Contrat social (1762), Jean-Jacques Rousseau explique que celui qui cède à la force de son adversaire ne se sent jamais tenu de lui obéir par obligation mais uniquement par contrainte: « S’il faut obéir par force, on n’a pas besoin d’obéir par devoir, et si l’on n’est plus forcé d’obéir, on n’y est plus obligé. » Or, si la guerre consiste à imposer sa volonté par la force à l’adversaire, alors, même quand la lutte armée est terminée et qu’un camp a pris le pas sur l’autre, le conflit subsiste. Par conséquent, le rapport de force demeure et, avec lui, l’absence de reconnaissance de la légitimité de la situation politique qui s’ensuit. Aussi l’ordre instauré n’est-il pas reconnu comme juste par les battus.

A contrario, refuser que la guerre puisse être un recours ou une solution, c’est soutenir que seule la paix, synonyme d’absence de conflit ouvert, garantit à terme l’instauration d’un état de fait accepté par la majorité en raison de son caractère juste. À défaut, bien sûr, d’être parfait.

2) L’entrée en guerre peut aussi correspondre à une volonté de justice

Que la volonté de paix soit une volonté de justice n’implique pas l’inverse, à savoir que celui qui veut la guerre ferait nécessairement preuve d’injustice. Il ne faut pas idéaliser la paix civile au point de croire que l’absence de troubles politiques traduit l’inexistence de l’injustice. Quand Karl Marx et Friedrich Engels écrivent dans le Manifeste du parti communiste (1848) que « l’histoire de toute société jusqu’à nos jours n’a été que l’histoire de luttes de classes », ils nous rappellent que la conflictualité est inscrite au cœur des sociétés humaines : les divergences d’intérêt alimentées par leurs désirs mettent les êtres humains en concurrence et en opposition. À l’intérieur des pays comme entre les nations elles-mêmes. De ce point de vue, la paix peut occulter une situation structurelle d’injustice. Souvenons-nous que certaines guerres de conquêtes impériales ont été qualifiées d’opérations de « pacification », et que la société coloniale mise en place une fois la population locale vaincue était tout sauf juste, comme pour l’Algérie française où l’égalité des citoyens devant la loi n’existait pas. Il y a donc des paix injustes qui, souvent, constituent les prémices de la prochaine guerre à venir, telle celle du Traité de Versailles, qui punit lourdement l’Allemagne après la Première Guerre mondiale et au sujet de laquelle les historiens s’accordent à penser qu’elle a en grande partie déterminé l’advenue de la Seconde.

Critiquant Hobbes, Rousseau faisait remarquer que sa conception de la paix civile équivalait à réduire celle-ci à la sécurité. Or, la préservation de l’ordre social tel qu’il est peut parfaitement s’accommoder du maintien d’injustices flagrantes à l’intérieur d’une société.

3) Vouloir la justice, c’est faire droit à la conflictualité sociale à travers les institutions politiques

Dans Le Prince (1532), Nicolas Machiavel écrit que « la guerre est toujours juste lorsqu’elle est nécessaire, et les armes sont sacrées lorsqu’elles sont l’unique ressource des opprimés ». Néanmoins, personne ne peut vouloir la guerre pour elle-même car elle est systématiquement coûteuse pour tous. Par conséquent, il faut toujours lui préférer le maintien de la paix, mais à la seule condition de considérer celle-ci autrement que sous l’angle du respect inconditionnel des institutions politiques et du maintien de l’ordre social.

Quand John Rawls écrit dans sa Théorie de la justice (1971), qu’« un certain degré d’accord sur les conceptions de la justice n’est pas la seule condition préalable à une société humaine viable », il signifie qu’un régime politique ne conserve sa légitimité auprès de la population que s’il organise l’expression et le règlement des désaccords qui ne manquent pas de survenir au cours du temps. De ce point de vue, la paix désigne à la fois la condition et la conséquence de l’art politique de nous accorder dans le désaccord. De telle sorte que vouloir la paix, c’est d’abord vouloir prévenir en permanence et lutter contre les injustices avec les moyens du droit. Injustices qui naissent quand une partie de la population ne peut faire entendre des revendications.

Conclusion

Tout le monde a en tête la formule de Carl von Clausewitz : « La guerre est la continuation de la politique par d’autres moyens. » Indirectement, elle nous rappelle qu’au nom de la paix, il ne faut pas renoncer à faire de la politique : c’est-à-dire, en premier lieu, assumer collectivement l’irréductible niveau de conflictualité existant à l’intérieur des sociétés humaines et entre elles. Si la démocratie, au sens fort du terme, doit rester précieuse à nos yeux, c’est précisément parce qu’elle garantit, en principe, l’expression et la prise en compte du désaccord grâce à la mise en forme institutionnelle du débat.

 


Retrouvez l’ensemble des corrigés de l’épreuve du Bac philo 2023 :

➤ Filière générale :

1. Vouloir la paix, est-ce vouloir la justice ?

2. Le bonheur est-il affaire de raison ?

3. Commentaire de texte : Claude Lévi-Strauss, La Pensée sauvage

➤ Filière technologique :

1. L’art nous apprend-il quelque chose ?

2. Transformer la nature, est-ce gagner en liberté ?

3. Commentaire de texte : Adam Smith, Théorie des sentiments moraux

 

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