“Doreen”. Je l’aime à mourir
Avec Doreen, le metteur en scène et acteur David Geselson livre une adaptation émouvante et tragique de la Lettre à D. d'André Gorz.
« Tu vas avoir 82 ans. Tu as rapetissé de 6 centimètres, tu ne pèses que 45 kilos et tu es toujours belle, gracieuse et désirable. » Ainsi commence la déclaration d’amour d’André Gorz à son épouse mourante. « Cela fait cinquante-huit ans que nous vivons ensemble et je t’aime plus que jamais », écrit-il dès les premières pages de sa Lettre à D. (2006 ; rééd. Gallimard, 2018). Le metteur en scène David Geselson en a tiré un spectacle mêlant les souvenirs biographiques et les impressions sentimentales, sur fond de réflexion philosophique. Créé en 2016, repris avec succès depuis, le spectacle témoigne d’un tiraillement entre le goût de la théorie et celui de la vie, mettant à l’épreuve des planches la théorie et la pratique. Il rend hommage à Doreen Keir, qui fut la compagne d’André Gorz dans la vie comme dans le travail, et sans laquelle il n’aurait rien écrit. Le spectacle donne corps cette voix imaginée entre les lignes, qu’interprète la comédienne Laure Mathis. Les spectateurs prennent place dans l’intimité d’un salon reconstitué sur scène, au plus près du couple. Ton amical, ambiance chaleureuse et pourtant crépusculaire. Car les deux personnages mourront ensemble très prochainement. Ils échangent naturellement en attendant. Le metteur en scène a transposé l’enchevêtrement heureux de la critique politique et de la confession intime dont le livre est empreint. Fondateur de l’écologie politique et penseur des mutations du travail, journaliste cofondateur du Nouvel Observateur, André Gorz s’était donné, sous l’influence de Sartre, pour ambition de « se faire homme et libre ». Cette liberté dont il avait fait vœu, il l’éprouve une dernière fois le 22 septembre 2007, en se suicidant aux côtés de son épouse condamnée par une maladie incurable, fidèle à cette « passion amoureuse » qu’il concevait comme « une manière d’entrer en résonance avec l’autre, corps et âme, et avec lui ou elle seuls. Nous sommes en deçà et au-delà de la philosophie ». David Geselson touche précisément ce point d’équilibre, admirablement dramatique et émouvant.
Doreen / D’après Lettre à D. d’André Gorz / Mise en scène de David Geselson / Avec Laure Mathis et David Geselson / Durée : 1h15 / En tournée du 8 au 10 mars au Nest à Thionville, du 2 au 10 avril à la MC93 de Bobigny, du 12 au 14 avril au Grand R de La-Roche-sur-Yon
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