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 Philosophie magazine : les grands philosophes, la préparation au bac philo, la pensée contemporaine
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Frédéric Worms en 2019 © Manuel Braun pour PM

Frédéric Worms : “Le refus de la mort sous toutes ses formes est la seule façon de fonder la morale”

Frédéric Worms, propos recueillis par Catherine Portevin publié le 25 septembre 2019 16 min

Le vivant, c’est la grande affaire de Frédéric Worms. Dans son dernier livre, “Pour un humanisme vital”, le philosophe, qui siège au Conseil consultatif national d’éthique, articule cette notion aux grands problèmes de notre temps, de la fin de vie aux menaces pesant sur la démocratie. Un projet ambitieux pour des temps précaires.

Il fait volontiers les honneurs de la maison et en connaît tous les recoins, depuis les poissons rouges dans le bassin (surnommés Ernest), les bancs de pierre du cloître qui ont accueilli bien des lectures et des pauses sandwich, les échelles branlantes de la bibliothèque historique et jusqu’à l’arrivée de gaz de l’appartement de Louis Althusser signalée encore par son étiquette… À l’École normale supérieure (ENS) de la rue d’Ulm, à Paris, Frédéric Worms semble chez lui. Entré ici à 18 ans, il y est revenu comme professeur et, depuis 2015, directeur adjoint. Le philosophe à qui l’on doit la redécouverte de la pensée de Bergson en France (il a dirigé la première édition critique de son œuvre aux PUF) aurait pu se contenter de rester l’impeccable savant de l’histoire de la philosophie contemporaine qu’il est. Mais, tout en assumant son engagement du côté de l’institution, il bouscule depuis une dizaine d’années son destin de premier de la classe en creusant sa propre voie pour penser les problèmes de son temps : la vulnérabilité, l’éthique et la politique du soin, les neurosciences et les biotechnologies, la santé et la médecine, et même les « maladies de la démocratie », sont autant de fils qui s’enroulent autour d’un thème central : le vivant. Depuis 2013, il siège avec assiduité au Conseil consultatif national d’éthique et a fait de la réflexion bioéthique un vrai travail de recherche.

Aujourd’hui, où sont les dangers vitaux ? Que signifie être « vitaliste » ? Et même défendre l’urgence d’une « vitale démocratie » et d’un nouvel humanisme ? Dans son dernier livre, Pour un humanisme vital, qui paraît ces jours-ci chez Odile Jacob, le philosophe s’explique et déploie la trame de sa pensée comme dans une conversation – il a choisi pour cela la forme épistolaire. Bergson demeure un guide : sa discussion avec les sciences, sa théorie de l’esprit, de l’élan vital, de la morale et de la religion… Worms y ajoute la psychanalyse, la conscience de l’histoire du XXe siècle… et une inquiétude qui semble consubstantielle à son être. Inquiétude souriante cependant et immédiatement dans le dialogue. « Je ne suis pas guimauve ! », affirme celui qui s’agace de jouer le rôle de la belle âme – « les sentiments bons comme l’aspiration à la justice, l’empathie, l’égalité ne deviennent des “bons sentiments” que lorsqu’on les considère comme acquis ! », lance-t-il. Ce n’est pas comme un père prieur que Frédéric Worms fait visiter cette sorte de couvent qu’est l’ENS. Il serait plutôt, ici comme ailleurs, un frère hospitalier. 

 

Frédéric Worms en 7 dates

  • 1964 Naissance à Boulogne-Billancourt.
  • 1986 Reçu premier à l’agrégation de philosophie.
  • 2004 Professeur de philosophie contemporaine à Lille-3 puis à l’ENS.
  • 2007 Dirige jusqu’en 2012 la première édition critique de l’œuvre complète de Bergson (PUF).
  • 2012 Lance la collection « Questions de soin » aux PUF.
  • 2013 Nommé au Conseil consultatif national d’éthique parmi les représentants des « familles spirituelles, religieuses et laïques ».
  • 2015 Nommé directeur adjoint de l’ENS Paris-Ulm.

Difficile de ne pas poser cette question biographique à un philosophe de la vie : qu’est-ce qui dans votre vie vous a amené à la vie comme sujet de réflexion ?

Frédéric Worms : Je crois en effet que l’on ne peut comprendre les questions vitales qu’à partir d’expériences concrètes de sa propre vie. Car « la vie », je ne sais pas ce que c’est en dehors des vivants. « La vie » c’est d’abord « une vie », « nos vies ». Aujourd’hui, je pense que j’ai choisi la philosophie pour arriver à ce sujet, mais j’y suis arrivé à reculons. Je me sentais travaillé par des questions sans savoir lesquelles. Mon intérêt pour la philosophie masquait mes désirs de littérature, de poésie et aussi de science. J’étais d’ailleurs plutôt destiné aux sciences. Mais, accident de la vie, j’ai raté mon épreuve de mathématiques au bac, ce qui m’a barré l’accès aux prépas scientifiques. J’avais deux ans d’avance et de bonnes notes en philo et en littérature. Le lycée Louis-le-Grand m’a proposé de m’orienter vers les prépas littéraires. C’est ainsi que je suis entré à l’École normale supérieure. J’ignorais à l’époque qu’elle préparait essentiellement à l’enseignement, à un type de relation de parole devenu vital pour moi – car, au fond, je suis vraiment prof ! Le hasard faisant par­tie du vivant, il a changé ma vie !

 

Diriez-vous que, de la même façon, votre rencontre avec l’œuvre de Bergson et son vitalisme, dont vous êtes un spécialiste, était un hasard ?

J’ai en effet commencé à le lire par le hasard du programme de l’agrégation, mais j’ai tout de suite senti chez lui quelque chose qui me concernait. Son vitalisme était encore tabou à l’époque, à cause de ses positions politiques : parce qu’il n’avait pas voulu s’engager pendant l’affaire Dreyfus et avait été ultra-­nationaliste durant la Première Guerre mondiale. Sa réponse à la question de la guerre est magnifiquement exposée en 1932 dans Les Deux Sources de la morale et de la religion, avec le critère radical de l’« ouvert » contre le « clos » : la vie, chez lui, ce n’est pas seulement l’« élan vital » mais la lutte entre deux sens de la vie, la création et le besoin, donc l’ouvert et le clos. Néanmoins, cette correction critique du vitalisme est venue trop tard. Bergson, c’était aussi pour moi l’accès à toute l’histoire de la France, à la philosophie du XXe siècle, à la République, aux relations entre le judaïsme et le christianisme. J’ai mis longtemps à le comprendre et à le relier à mes questions. Pourtant, le vital était bien là, dans sa complexité : je venais d’avoir une fille mais aussi d’avoir un deuil dans ma famille, j’ai perdu mes cheveux à la suite d’une maladie psychosomatique nommée pelade. Très lentement, cela m’a conduit vers la psychanalyse. Avec Freud et Bergson, j’ai eu tout ce qu’il me fallait pour vivre. Et bientôt pour « revivre ». La philosophie m’a permis enfin d’assumer et de comprendre certains événements biographiques comme des problèmes vitaux, c’est-à-dire qui peuvent nous détruire. Mais la vie peut aussi repartir. Freud permet de comprendre le traumatisme, et Bergson de relancer la machine vitale. Pour moi, l’un ne va pas sans l’autre.

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Article issu du magazine n°133 septembre 2019 Lire en ligne
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