Insurrection au Brésil : un effet de “l’apprentissage autoritaire”

L’invasion des lieux de pouvoir à Brasilia a rappelé la dévastation du Capitole à Washington, il y a deux ans. Une coïncidence ? Non, la preuve que l’autoritarisme est contagieux et s’apprend, par-delà les frontières. Les explications de Jean-Marie Pottier, qui revient sur cette idée du politiste Brian Klaas : « l’apprentissage autoritaire ».

Peinturluré de jaune et de vert, coiffé de longues tresses et de cornes de bison, un militant pose, mégaphone à la main, lors d’une manifestation de soutien à Jair Bolsonaro. L’image rappelle le célèbre « QAnon shaman » du 6 janvier 2021 à Washington DC. Elle est devenue virale dans les heures qui ont suivi l’invasion de trois lieux de pouvoir, le palais présidentiel, le Congrès et la Cour suprême, à Brasília, le 8 janvier 2023. Elle date pourtant de septembre 2021, huit mois après l’invasion du Capitole mais bien avant cette action désespérée des partisans du président brésilien vaincu.

Cet instant de faux nous dit cependant quelque chose de vrai, cette confusion cache un lien bien réel entre les deux invasions. Les nombreux parallèles que l’on peut relever entre le 6 et le 8 janvier mettent en évidence l’existence d’un « apprentissage autoritaire » entre les mouvements et régimes autocrates, qui renverse certains de nos présupposés sur la diffusion internationale des idées.

Contestation antidémocratique, un produit d’exportation ?

« Les soutiens de Jair Bolsonaro ont montré que les révolutions antidémocratiques aussi pouvaient être contagieuses », écrivait, quelques heures après les événements de Brasília, l’essayiste Anne Applebaum, spécialiste des régimes autoritaires d’Europe de l’Est. « Pour les trumpistes, l’affrontement Lula-Bolsonaro de cet automne était l’occasion d’exporter les méthodes de contestation de la présidentielle américaine de 2020 », relèvent de leur côté les correspondants du Monde au Brésil et aux États-Unis, qui voient dans le 8 janvier un « décalque saisissant » du 6, « posant la question de la nature de cette désacralisation des lieux de pouvoir ».