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Michaël Foessel. © Vincent Muller/opale. - Susan Neiman. © Daniel Hofer/Laif/Réa

Dossier / “Y a-t-il des bons et des méchants ?”

L’origine du mal : Michaël Fœssel face à Susan Neiman

Susan Neiman, Michaël Fœssel, propos recueillis par Alexandre Lacroix publié le 30 novembre 2023 12 min

Les philosophes Michaël Fœssel et Susan Neiman osent employer les catégories de « bien » et de « mal » dans une perspective qui n’est ni manichéenne ni religieuse. Ils montrent que, pour se confronter aux enjeux des guerres en cours ou évaluer la moralité des œuvres d’art, les notions de « mal radical » ou encore de « banalité du mal » n’ont pas fini d’être éclairantes.

 

L’actualité abonde en personnages peu recommandables : un dictateur qui tue ses opposants et envahit le pays voisin en provoquant des centaines de milliers de morts, des mercenaires usant du viol comme arme, des fanatiques capables de décapiter des bébés… Cela ne nous invite-t-il pas à revoir notre relativisme et à considérer qu’il y a de vrais salauds ?

Susan Neiman : Les études en psychologie sociale montrent qu’il y a, dans la population mondiale, environ 2 % de sociopathes, capables d’actes sadiques ou barbares. Ces gens-là sont peut-être des cas désespérés… Si cette statistique est exacte, elle signifie aussi que 98 % des humains ont des sentiments normaux d’altruisme et d’empathie, et qu’ils ne sont ni bons ni mauvais. Les philosophes ont beaucoup spéculé sur la nature humaine. Comme l’a souligné Rousseau, à qui l’on attribue souvent l’idée trop naïve selon laquelle les humains seraient naturellement bons, la manière dont vous décrivez moralement la nature humaine est une projection liée au type de régime politique que vous défendez. Si vous souhaitez instaurer un pouvoir autoritaire ou même dictatorial, vous affirmerez avec Hobbes qu’à l’état de nature, les humains sont dangereux, que c’est la lutte de tous contre tous. Nous ne savons pas comment se comportaient nos ancêtres de la Préhistoire, donc la projection reste possible. Dans les années 1970, la sociobiologie a pris le relais de Hobbes pour défendre une vision pessimiste de l’homme, qui serait un prédateur programmé pour accaparer les richesses et répandre ses gènes. Au moment des luttes pour les droits civiques, la sociobiologie a été fortement contestée, car elle accréditait le racisme et le sexisme. Elle a disparu pendant vingt ans avant de resurgir dans les années 1990 avec un nouveau nom, celui de « psychologie évolutionniste ». Cette fois-ci, il s’agissait de montrer que les humains étaient en compétition pour la survie, et ce darwinisme simpliste a servi de base pour justifier les politiques néolibérales en les prétendant plus proches de la nature humaine que le socialisme. Pour ma part, je pense que nous avons besoin de la philosophie morale précisément pour défaire ces stéréotypes…

“Si nous condamnons le viol ou le terrorisme, c’est parce que nous présupposons que ceux qui commettent ces crimes auraient pu ne pas les commettre, nous leur reprochons un mauvais usage de leur liberté”
Michaël Fœssel

 

Michaël Fœssel : Sur ce point, je suis kantien. La possibilité d’émettre un jugement moral me paraît liée à la liberté. C’est un fait qu’il existe des actions et des crimes que l’on peut qualifier de « méchants », mais non parce qu’ils proviendraient de personnes qui sont méchantes par nature. Il y a un risque d’essentialiser les individus, d’affirmer que le méchant est condamné au mal parce qu’il est ainsi fait. Cependant, cette vision morale se contredit elle-même. En effet, si nous condamnons moralement le viol ou le terrorisme, c’est parce que nous présupposons que ceux qui commettent ces crimes auraient pu ne pas les commettre, nous leur reprochons donc de faire un mauvais usage de leur liberté. J’ajoute que l’approche du mal par la liberté n’a rien à voir avec un relativisme, au contraire : elle pointe la responsabilité pleine et entière des acteurs, que ceux-ci soient des individus, des organisations criminelles ou des États. Mais cette approche refuse d’envisager la méchanceté, ou la bonté, comme des puissances naturelles ou surnaturelles qui s’affronteraient dans le monde de toute éternité.

Traduit par Alexandre Lacroix
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Article issu du dossier "Y a-t-il des bons et des méchants ?" novembre 2023 Voir le dossier
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