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Abdelwahab Meddeb en 2016. © Philippe Matsas/Opale/Leemage

Entretien

Abdelwahab Meddeb : “Aujourd’hui, le Coran est pris en otage”

Abdelwahab Meddeb, propos recueillis par Sven Ortoli publié le 13 avril 2021 9 min

Dans un entretien recueilli en 2010, l’écrivain Abdelwahab Meddeb, disparu en 2014, nous faisait partager son amour d’un livre dans lequel il baignait depuis son enfance. S’exprimant sur les questions liées à l’islam aujourd’hui, de l’interprétation du Coran jusqu’à la condition des femmes, en passant par l’islamisme et l’islamophobie, il nous proposait une approche anthropologique et mythique, loin des archaïsmes radicaux.

 

Le Coran est un beau texte, mais il est difficile, répétitif, rugueux…

Abdelwahab Meddeb : L’obscurité du Coran est une donnée en dépit de ce que le Livre dit de lui-même (« Ceci est en langue arabe claire », XXVI, 195 et XVI, 103). Tous les philologues admettent la difficulté de l’arabe coranique. Cette opacité s’avère plus âpre quand, de nos jours, le locuteur arabe qui lit le Coran croit tout comprendre. Lorsque j’évoque la langue coranique, je parle de « langue paternelle », comme le latin pour Dante. D’une langue qui entretient une étrange familiarité avec la langue maternelle, l’arabe vulgaire par lequel le locuteur se fait sujet parlant, prêt à être initié à la diglossie de l’arabe, et qui entretient l’écart entre l’écrit et l’oral. Mais l’écrit appris à l’école est en langue moderne, très éloignée de l’arabe coranique qui a dû être fixé plus d’un siècle après la mort du Prophète, entre le VIIIe et le IXe siècle. Cependant, entre ces deux états de la langue, la part du lexique partagé reste appréciable et les passerelles sont nombreuses, d’où l’illusion de la clarté. Durant l’apprentissage coranique que j’ai reçu enfant, j’étais fasciné par la rencontre de mots connus dans des phrases inintelligibles, mais néanmoins suggestives – elles font voyager : à partir d’elles, j’inventais mon propre texte. Les répétitions sont pour la mémorisation source d’errements et de dérives. Le Coran suscite aussi la crainte et la frayeur par les bouleversements apocalyptiques qu’il décrit, ainsi que par les menaces qu’il profère en alternance avec les promesses. Dans la sourate LV, par exemple, à côté de multiples évocations bucoliques, il est question de « magma de feu », de « giclées de flammes et de cuivre en fusion », de « ciel qui se fissure », de « criminels saisis par les pieds et la houppe », d’« eau qui bout avec fureur » : la beauté s’allie au chaos.

 

Les intellectuels musulmans ou de culture musulmane se montrent souvent gênés à l’évocation d’une approche purement mythologique ou anthropologique du Coran…

Le Coran est intériorisé par les musulmans comme un tabou. Personnellement, dès le commencement, et jusque dans la terreur qu’il suscitait en moi, j’ai eu d’emblée un rapport transgressif avec le Livre, j’entrais en émulation avec ses mots, j’inventais mentalement mon propre texte, je répugnais à le rendre tel quel par la mémoire, je dérivais avec la répétition de ses syntagmes et sa rhétorique faite de chiasmes, de tropes, de synecdoques, de répartitions symétriques ou asymétriques des contraires. Face à l’énoncé coranique, je cherchais d’instinct la matière d’une énonciation qui m’engageait comme sujet. Par cette initiative permissive, le Coran agit comme épreuve de la Loi impliquant la culpabilité que provoque la transgression. La Loi ne s’intériorise que dans la hantise de la faute. Le Coran compte si on l’approche comme mythe, c’est-à-dire comme drame qui ouvre un accès au divin concentré sur la quête esthétique et éthique. Et le Coran joue efficacement son rôle anthropologique en aménageant un site duquel émane la voix de l’Absolu à l’adresse de l’homme marqué par le manque, borné par l’Invisible, l’Inconnaissable. 

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