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Yadh ben Achour © Patrick Box/Opale/Leemage

Yadh ben Achour. Tunisie, l’âge de raison de la révolution ?

Yadh Ben Achour, propos recueillis par Adam Galou publié le 30 novembre 2016 11 min

Il y a six ans, la révolution tunisienne faisait souffler l’air de la liberté sur le monde arabe, avant que le despotisme et le fanatisme ne reprennent la main un peu partout. Sauf en Tunisie. Le juriste et philosophe Yadh ben Achour, qui a participé activement à la transition démocratique et que nous avions interrogé en 2011 , dresse le bilan de ce bouleversement politique. Et livre ses réflexions incisives sur l’Islam et la laïcité, aussi bien au Maghreb qu’en Europe. Une analyse décapante !

Au lendemain de la Révolution, vous déclariez dans nos colonnes : « L’ivresse de la liberté peut conduire à des catastrophes. La liberté nécessite de la mesure et de la discipline. Sans cela, la révolution risque de se retourner contre elle-même. » Six ans plus tard, considérez-vous que le risque a été évité ?

Yadh ben Achour : J’ai coutume d’appeler la période révolutionnaire « l’année des nuages ». Car nous étions bel et bien sur un nuage : la politique avait pris des allures de rêve, nous venions d’achever un régime dictatorial, tous les Tunisiens travaillaient pour le pays. Quand j’avais parlé d’une ivresse de la liberté, c’était dans un double sens : d’abord, la joie de faire de la politique dans un climat de liberté – ce que nous n’avions jamais connu depuis l’indépendance ; mais aussi les risques de l’excès de liberté qui peut se retourner contre la société et l’entraîner dans une forme d’anarchie. Alors, six ans plus tard, avons-nous atteint le stade de la maturité politique ? Oui et non. Oui, parce que nous avons établi un régime et une Constitution garantissant les libertés démocratiques, parce que nous vivons et que nous pratiquons la démocratie. Pour la première fois, nous avons exercé le droit de vote en toute indépendance lors des premières élections du 23 octobre 2011, puis nous avons goûté à la joie de l’alternance avec les élections législatives et présidentielles de 2014. Elles ont exclu le gouvernement de la troïka (composée des partis Ennahdha, Congrès pour la République, Ettakatol) au pouvoir de novembre 2011 à novembre 2014. Et elles ont laissé la place à l’opposition réunie dans le parti Nidaa Tounes (ou Appel de la Tunisie). Mais le risque d’un débordement subsiste dans les comportements. La société est anarchique. Vous pouvez le constater dès que vous prenez le volant. Personne, ou presque, ne se conforme au Code de la route. Et cela vaut aussi bien pour l’hygiène publique, la gestion des déchets ou les constructions urbaines. Le littoral tunisien qui était attractif est devenu hideux à cause des constructions sans plans, sans goût… et sans autorisation. Chacun se comporte selon ses propres intérêts. Et l’État est absent, parce qu’il manque de ressources et qu’il a d’autres priorités, au premier rang desquelles la lutte contre le terrorisme. Nous avons perdu une part de cette discipline sociale dont la démocratie a besoin. Mais nous ne connaissons pas pour autant la déliquescence des sociétés arabes « post-révolution » comme la Libye, le Yémen, la Syrie, l’Irak ou même l’Égypte. Nous avons acquis des libertés définitives. Il n’en reste pas moins que l’esprit de l’anarchie plane sur la société.

 

En mai dernier, Ennahdha, le grand parti islamo-conservateur, a pris un virage étonnant. Rached Ghannouchi, son président, a déclaré : « Nous sortons de l’Islam politique pour entrer dans la démocratie musulmane. Nous sommes des musulmans démocrates qui ne se réclament plus de l’Islam politique. » Comment interprétez-vous ce revirement ?

Je pense que les tenants de l’Islam politique (Ennahdha, Frères musulmans et tous les autres) traîneront toujours avec eux leur doctrine et leurs ambitions politiques. Le projet qu’ils poursuivent est l’instauration d’un État musulman avec un califat et l’application de la charia dans tous les domaines du droit. Les laïcs ne peuvent donc pas croire à la sécularisation de ces partis. Cependant, l’essentiel n’est pas de savoir s’ils sont sincères. Seul compte le résultat politique final : le respect des libertés. Que ce résultat leur soit imposé de l’extérieur, par la force de la société civile, la résistance de l’opposition et des intellectuels, ou que cela procède d’une réforme endogène des partis islamistes ne m’intéresse pas. Aujourd’hui, nous avons un parti islamique qui joue le jeu électoral depuis cinq ans, qui se retire quand il perd les élections. C’est cela qui importe. Peut-être qu’en continuant à pratiquer le jeu démocratique pendant des décennies, ces mouvements deviendront des partis de démocratie « islamique » de la même manière que les chrétiens ont construit en Europe la démocratie « chrétienne ». Mais il ne faut pas faire reposer l’avenir de la démocratie sur la bonne volonté de ces partis.

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Article issu du magazine n°105 décembre 2016 Lire en ligne
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