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Le livre du jour

Déjà fatigués ? “Histoire de la fatigue” de Georges Vigarello

Catherine Portevin publié le 07 septembre 2020 3 min

À peine rentrés, vous êtes déjà crevés ? Nous le sommes tous : « La fatigue, faiblesse diffuse, insatisfaction obscure, insuffisance obstinée, est devenue l’une des manières d’être de notre temps. » C’est la conclusion de l’Histoire de la fatigue publiée au Seuil par l’historien des sensibilités Georges Vigarello – qui avoue avoir eu l’idée de consacrer un livre à ce phénomène après la lecture de notre dossier « Pourquoi sommes-nous si fatigués ? ». 

Cette formidable traversée, du Moyen Âge à nos jours, nous raconte comment l’ère moderne, avec ses progrès techniques, a paradoxalement produit l’homme et la femme fatigués par la banalité des jours. Car avec le progrès a crû « le sentiment de soi » et la conscience vécue des fragilités humaines. 

De quoi éclairer autrement les débats très contemporains sur la définition de la pénibilité du travail dans la réforme des retraites, ou la « charge mentale » qui pèse sur les femmes, ou encore la perspective que l’Intelligence artificielle allège les esprits et les corps. 

Pourquoi sommes-nous plus fatigués que le chevalier du Moyen Âge ?

Parce que nous en avons une conscience aiguisée. Le chevalier du Moyen Age n’était pas exténué de la même manière que Mme de Maintenon à la cour de Louis XIV, ou l’ouvrier de la révolution industrielle ou encore le cadre en burn-out d’aujourd’hui. Et surtout, ils n’en parlent pas de la même manière. Georges Vigarello repère l’apparition des mots qui signalent la lente émergence d’une fatigue qui ne touche pas seulement le corps mais l’esprit, l’âme et le psychisme de l’individu. Voici quelques jalons :

  • Acédie (« défaut de soin », négligence) : les moines du Moyen Âge désignent ainsi la perte du feu intérieur dans la prière. C’est une brusque froideur, une forme de fatigue psychologique non dite. Car, à la même époque, la seule fatigue est celle du corps du combattant. L’épuisement est assèchement, perte des humeurs et des liquides. Le chevalier ou le voyageur fatigué est froid, amaigri et sec. Les travaux du laboureur, eux, ne sont pas considérés comme procurant de la fatigue.
  • Fatigue de l’esprit : Descartes est le premier à la signaler : « Les occupations trop sérieuses affaiblissent le corps en fatiguant l’esprit. » 
  • Langueur : apparu au XVIIe siècle dans la société de cour, ce mot désigne un état « d’incommodité », tant physique qu’émotionnel, sans cause précise. Il fait l’objet de descriptions, de récits et de commentaires. Avec les Lumières, cette tendance se confirme : dans ce siècle agité et sensible, on « s’écoute vivre ». C’est la surexcitation qui fatigue… du moins chez les nantis.
  • Surmenage : issu du vocabulaire des courses de chevaux (il consiste à mener un cheval trop vite pour tenir la distance), ce terme envahit l’univers du travail à la fin du XIXe siècle. Il signale les effets de l’accélération (machines thermodynamiques, transports, vie urbaine…), qui se manifestent comme un « épuisement des forces par excès d’exhortations ». Le « stress » (autre mot nouveau) est nerveux plus que physique, d’où l’émergence d’une maladie : la « neurasthénie ».
  • Burn-out : cet « épuisement professionnel », maladie contemporaine, met en jeu le sentiment de soi, à l’heure où le travail exige l’investissement de l’individu tout entier. Ce phénomène psychique de consumation n’est pas sans rappeler, souligne le philosophe Pascal Chabot dans son essai Global Burn-out (PUF, 201 ?), l’acédie des moines du Moyen Âge. Les individus sont brûlés par surchauffe, « comme une ampoule qui saute ».
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