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 Philosophie magazine : les grands philosophes, la préparation au bac philo, la pensée contemporaine
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François-Xavier Bellamy et Laurent de Sutter en 2019 © Serge Picard

Exclusif

François-Xavier Bellamy, Laurent de Sutter. Philosophes en campagne

François-Xavier Bellamy, Laurent de Sutter, propos recueillis par Michel Eltchaninoff publié le 20 avril 2019 17 min

À l’occasion des élections européennes, le 26 mai, deux philosophes sont têtes de liste. De l’accueil des réfugiés à la gestation pour autrui (GPA), tout oppose le Français François-Xavier Bellamy et le Belge Laurent de Sutter qui se lancent en politique sans rien renier de leurs convictions métaphysiques.

Ces deux-là savent parfaitement que les philosophes entrés en politique, comme Platon ou Machiavel, prennent des coups. Mais François-Xavier Bellamy et Laurent de Sutter ont osé descendre dans l’arène. Le premier, catholique sans complexes, conjugue souci écologique, critique du capitalisme libéral et conservatisme moral. Laurent Wauquiez a fait le pari de le nommer en tête de la liste des Républicains (LR) pour les élections européennes. Le second emmène en Belgique la liste de gauche paneuropéenne créée par l’ex-ministre des Finances grec Yánis Varoufákis, partisan d’un « New Deal » vert. De la prostitution à la pornographie en passant par la pop’ philosophie, il surfe avec aisance entre les sujets les plus étonnants. Tout oppose le jeune Versaillais, débatteur calme et obstiné, et le penseur ténébreux et provocateur. Avant de les voir peut-être se déchirer sur les bancs du Parlement européen, nous leur avons proposé de confronter, non pas leur programme, mais leurs visions du monde et leurs valeurs : d’un côté, la référence à la nature et à une juste mesure très aristotélicienne ; de l’autre, les inspirations de Gilles Deleuze et de Slavoj Žižek pour déconstruire tous les points d’ancrage. Au fond, ils ont plusieurs points de désaccord autant politiques que métaphysiques. Voici ce que nous avons entendu.

 

« On nous demande d’être “en marche” sans nous dire quelle direction suivre ! »

François-Xavier Bellamy

François-Xavier Bellamy : Nous partageons le constat d’une crise provoquée par le mouvement universel qui a saisi notre monde, alimenté en particulier par une économie de la consommation. Vous l’évoquez dans votre introduction à l’ouvrage collectif Accélération ! [PUF, 2016]. Mais nos réponses sont radicalement différentes. Là où vous pensez devoir sortir de cette crise par une accélération qui la dépasserait, il me semble que l’appel que ce monde nous lance est d’abord la recherche d’un nouvel équilibre. Celui-ci ne constituerait pas un retour à l’immobilisme, mais une réorientation du mouvement vers autre chose que la dynamique destructrice de la pure consommation. Notre modèle dévaste le monde. La réponse se situe dans le refus de l’injonction au mouvement perpétuel, du dynamisme érigé en valeur autonome. Nous devons retrouver le sens d’une politique qui se donne pour mission de transmettre ce qui, dans ce monde, mérite d’être préservé, par exemple dans le domaine de l’environnement. Du point de vue social, la liquéfaction de la société impose un retour vers un ordre des buts, qui nous permette de dessiner l’horizon d’un avenir commun. On nous demande d’être « en marche » sans nous dire quelle direction suivre ! C’est ce qui provoque cette crise de sens et cette difficulté à penser notre place dans l’histoire.

 

« Puisque tout est impermanence, la question est d’apprendre à vivre avec elle »

Laurent de Sutter

Laurent de Sutter : Vous vous situez dans la logique de Parménide, ce philosophe présocratique qui en appelle à une permanence de l’être. Je me considère au contraire comme un tenant d’Héraclite, pour qui tout se meut sans cesse. Puisque tout est impermanence, la question est d’apprendre à vivre avec elle. Rien ne reste, et rien n’est jamais resté. C’est la leçon de la pensée chinoise, alors que la tradition occidentale s’est construite sur l’idée qu’il y a des choses qui demeurent. N’est-il pas temps de devenir un peu chinois ? Un monde n’est pas quelque chose qui nous est donné. C’est quelque chose que l’on construit, et c’est le cas depuis le Néolithique. Cette construction du monde passe par une logistique de l’espace : les chemins, les ponts, les routes, etc. C’est ce que fait la Chine avec son projet de nouvelle route de la soie, qui établit une relation ambitieuse de reconstruction du monde. En Europe, pour des raisons politiques et financières, nous avons renoncé à ce projet. C’est dommage.

 

F.-X. B. : Vous avez raison d’évoquer la Chine – la perspective du temps long y est bien plus présente qu’en Occident. Beaucoup raisonnent, dans les décisions politiques, en fonction du prochain sondage. La Chine, elle, poursuit un projet sur plusieurs siècles ! Elle incarne sur ce plan ce qui nous fait le plus défaut : le sens d’une politique qui se donne pour mesure quelque chose qui excède le temps court. Pour nos démocraties, c’est un vrai talon d’Achille – notamment sur la question écologique – que cette incapacité à penser une responsabilité politique qui s’étende au-delà de l’immédiateté et de la fluidité de l’opinion. Le penseur de l’écologie Hans Jonas avait raison, dans son Principe responsabilité [1979], de se poser la question de notre responsabilité devant les générations à venir. On se contente aujourd’hui trop souvent de répéter des slogans de gestionnaires sans projet : il faut se réformer, s’adapter, parce que le monde change. S’agit-il de chercher une plus grande justice, plus de prospérité ? De faire un monde plus sûr, ou même plus beau ? Non : il faut changer parce que le monde change. Si nous ne cédons pas à cet impératif de l’adaptation, nous serions voués à disparaître. Comme le formule en sub­stance Thomas Hobbes dans son traité De la nature humaine [1640], la vie est désormais comparée à une course : mais il s’agit d’une course dans laquelle on n’a pas d’autre but que de dépasser perpétuellement ses concurrents. C’est devenu la seule maxime politique d’aujourd’hui : « Il faut que ça marche, sinon nous serons dépassés. » Nous avons d’ailleurs le sentiment, très humiliant, d’être continuellement dépassés par les autres, alors que nous ne cessons de parler de mouvement. Je repense à la doctrine proposée par Christophe Castaner : « Notre seule idéologie c’est : “Est-ce que ça marche ?” » Le pragmatisme est érigé en but ultime. Il faut seulement bouger, sans que l’on ait la moindre idée du but à atteindre. Dans cet univers, ceux qui nous permettront de survivre et de réhumaniser le monde ne sont pas ceux qui épouseront la course mais ceux qui tenteront de fixer un but, et de lui donner un sens.

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Article issu du magazine n°129 avril 2019 Lire en ligne
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