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Maurizio Ferraris en 2017 © Julien Mignot

Maurizio Ferraris. “L’imbécile que, donc, je suis”

Maurizio Ferraris, propos recueillis par Catherine Portevin publié le 26 septembre 2017 15 min

Ce philosophe italien, ami de Jacques Derrida et dont la verve n’est pas sans rappeler celle d’Umberto Eco, traite aussi bien du téléphone portable que de métaphysique. Si, pour lui, l’imbécillité fait, hélas ! partie de la condition humaine, il ne renonce pas pour autant au gai savoir.

Il s’intéresse à des objets apparemment futiles : le téléphone portable par exemple, ou l’imbécillité humaine – ceci étant parfois en rapport avec cela. Il cite une fable de La Fontaine ou vous raconte la dernière vidéo virale du Net pour brocarder les dangers de la post-vérité. Ajoutez-y une pointe d’accent italien dans un français nourri de Gide et de Proust, une bonne dose d’humour, et vous croirez rencontrer le dernier pop-philosophe à la mode. Pourtant, Maurizio Ferraris, fondateur du Laboratoire d’ontologie à l’université de Turin, est un savant sérieux, de surcroît métaphysicien et spécialiste de Jacques Derrida, incollable sur les débats entre réalistes et post-modernes ou sur les problèmes les plus abstraits de la logique, des actes de langage et de la phénoménologie de la perception. Comme son compatriote Umberto Eco, dont il pourrait être un jeune neveu – et auquel son dernier petit opus L’imbécillité est une chose sérieuse est une forme d’hommage –, un appétit pour le sens commun et pour les techniques et travers de son époque l’a préservé des raideurs de l’esprit académique et lui a ouvert les colonnes de plusieurs revues et journaux italiens où il a tenu chronique.

Étudiant à Turin dans l’ébullition politique des années 1970, il a d’abord, comme tant d’autres, élu Nietzsche comme philosophe de la vie et chantre d’un individualisme solaire. Mais après une thèse sur les post-structuralistes français – Foucault, Deleuze, Derrida –, il prendra quelques années plus tard ses distances avec le relativisme post-moderne pour, en quelque sorte, remettre les pieds sur terre et s’emparer de la difficile question du réel, jusqu’à devenir l’un des chefs de file du mouvement dit des « nouveaux réalistes ». Revenir « aux choses mêmes » ? À l’être ? Maurizio Ferraris, en se saisissant du téléphone portable, a joint le geste au manifeste. Cet objet n’est pas seulement un prétexte à manier des concepts en virtuose, mais, très concrètement, ce qui donne forme à sa pensée de la réalité sociale, qu’il fonde, dans cette époque si bavarde, sur l’écrit. Nous l’avons rencontré dans un lieu qui lui est familier. Les fresques et ors 1900 de la brasserie du Train bleu, dominant le bruissement de la salle des pas-perdus de la gare de Lyon, à Paris, s’accordent à son trajet et à ses curiosités : de Turin à Paris, de la Méditerranée nietzschéenne à la French Theory, et retours, et échappées.

 

En 7 dates

  • 1956 Naissance à Turin
  • 1979 Thèse de philosophie sur les post-structuralistes français sous la direction de Gianni Vattimo
  • 1980 Collaboration avec Umberto Eco à la revue culturelle Alfabeta, à Milan, jusqu’en 1988
  • 1981 Première rencontre avec Jacques Derrida
  • 1995 Professeur de philosophie théorétique à l’université de Turin
  • 1999 Fondateur du Laboratoire d’ontologie à l’université de Turin
  • 2012 Parution en Italie du Manifeste du nouveau réalisme

Le téléphone portable n’est pas un objet anecdotique chez vous. Comment est-il devenu le socle de votre travail philosophique ?

Maurizio Ferraris : Je le dois à Jacques Derrida… mais peut-être malgré lui ! C’est lui le premier qui a attiré mon attention sur l’intérêt de cet objet. C’était en 2001. Nous parlions ensemble en nous promenant. Moi, je m’agaçais de tous ces gens autour de nous, pendus à leurs appareils, qui nous faisaient profiter de leurs conversations privées. Mais Derrida était plus indulgent que moi et y voyait même un outil plus prometteur que l’ordinateur, en prédisant que l’un prendrait un jour le pas sur l’autre. Une intuition très étonnante, puisque ces deux objets avaient des fonctions très distinctes, et l’ordinateur personnel avait alors l’avantage. Le téléphone portable servait essentiellement… à téléphoner et ne permettait l’accès ni aux e-mails, ni au Web, ni à des images, encore moins aux réseaux sociaux qui n’existaient pas. À l’époque, on pensait qu’il augmenterait surtout la puissance de la parole. On l’imaginait dans le futur directement implanté dans l’oreille, pour permettre de dialoguer à tout moment avec n’importe qui dans une immense conversation mondiale. Si vraiment la réalité sociale était fondée sur la parole vivante, alors cet objet était l’objet parfait : il réalisait la disparition de l’écrit annoncée depuis le début du XXe siècle avec l’avènement de la radio, du cinéma, du téléphone fixe, etc.

 

Et pourtant, dans votre livre T’es où ?, paru en 2005, vous êtes le premier à voir dans cet objet une « machine à écrire ». Comment vous est venue cette idée ?

De Derrida, encore. Il avait montré que l’écrit précède toute métaphysique, toute société réelle, toute parole vivante. Dès 1967, dans De la grammatologie, il annonçait – déjà – la disparition du livre, mais, précisait-il, celle-ci se fera par l’explosion de l’écriture. Or c’est bien ce à quoi nous assistons avec le Web, les réseaux sociaux, les smartphones et tablettes. Ce livre, T’es où ?, est le deuil d’une discussion interrompue. Derrida est mort en octobre 2004, alors que nous projetions de nous retrouver quelques mois plus tard pour poursuivre notre dialogue sur ce sujet.

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