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 Philosophie magazine : les grands philosophes, la préparation au bac philo, la pensée contemporaine
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© Franck Ferville pour PM

Michel Onfray et Jacques-Alain Miller. En finir avec Freud ?

Jacques-Alain Miller, propos recueillis par Martin Duru publié le 20 janvier 2010 15 min

Soixante-dix ans après sa mort, Freud est toujours source de discorde. Face au philosophe Michel Onfray, résolu à démonter le mythe, le psychanalyste Jacques-Alain Miller défend l’héritage. Entre l’hédonisme libertaire du premier et le cynisme supérieur du second, il est difficile de les départager.

Impossible de ne pas retenir son souffle en pénétrant dans la vaste cour de l’immeuble dans lequel habite Jacques-Alain Miller, à deux pas du jardin du Luxembourg. Charmant, amusé, un cigarillo à la main, l’éminent psychanalyste nous a reçus chez lui, dans un imposant salon orné de toiles de maîtres, où officiait discrètement une femme de service en tablier noir et blanc. Le fondateur de l’Association mondiale de psychanalyse a serré la main du fondateur de l’université populaire de Caen. D’un côté, une des intelligences les plus affûtées de Paris, un normalien, agrégé de philosophie, si soucieux de perfectionnisme qu’il n’a toujours pas achevé la publication des séminaires de Lacan, entreprise en 1975, il y a trente-quatre ans… De l’autre, un fils d’ouvrier agricole, qui vit toujours à Argentan où il est né, franc-tireur, volcan d’énergie publiant trois à quatre livres par an. Loin de s’en laisser conter, Michel Onfray s’est installé sur un canapé et s’est lancé dans son réquisitoire contre Freud. Cette année, dans son cours à l’université populaire, le philosophe a entrepris de déboulonner la statue du père de la psychanalyse, à coups de thèses fracassantes : « La thérapie freudienne n’est pas une technique scientifique, mais un procédé magique », « L’éros freudien ne contribue pas à la libération sexuelle, mais au conformisme bourgeois », « La constellation freudienne ne suppose pas le contrat intellectuel, mais l’affiliation religieuse », etc. Il en fera un livre à paraître en mars chez Grasset : Le Crépuscule d’une idole : l’affabulation freudienne. Face à ces attaques, Jacques-Alain Miller a parfois acquiescé, souri, mais il lui est aussi arrivé de s’empourprer, d’élever la voix contre ce qui lui semblait des piques trop naïves, une approche de Freud lacunaire. À un moment donné, il est franchement sorti de ses gonds, a trouvé des accents imprécateurs. Après coup, il a justifié son emportement : « Excusez-moi, ma psychanalyse n’a pas été complètement réussie, j’ai encore des accès de colère. »

 

Michel Onfray : J’ai commencé à lire Freud assez jeune, vers 13 ou 14 ans, après avoir acheté sur le marché d’Argentan les Trois Essais sur la théorie de la sexualité. Je l’ai découvert à peu près à la même époque que Marx et Nietzsche. Fils d’ouvrier agricole, j’étais enchanté par le projet marxiste d’abolir le capitalisme. Pensionnaire d’un établissement religieux, je me délectais de l’antichristianisme nietzschéen. Quant à Freud, il parlait beaucoup au petit masturbateur que j’étais…

 

Jacques-Alain Miller : Freud a aidé le jeune Michel Onfray à vivre ses masturbations infantiles !

 

M. O. : Les problèmes adolescents sont universels.

 

J.-A. M. : On peut aussi se préoccuper de l’être féminin en général…

 

M. O. : L’adolescent est un être qui passe sont temps à courir après les filles. Comme elles sont plus rapides que lui, il ne lui reste que ses mains : c’est quand même ça, la configuration ontologique de l’adolescent. Freud m’a réconforté, qui affirme que la sexualité est présente dès la plus petite enfance, que c’est là une situation naturelle et saine. En classe de terminale, j’ai lu l’Introduction à la psychanalyse et Totem et tabou. À l’université, j’ai étudié les Cinq psychanalyses, avec les fameux récits des cures de Freud – Dora, l’Homme aux rats, l’Homme aux loups, le petit Hans, etc. – qui se concluent par des guérisons miraculeuses. Ensuite, j’ai enseigné pendant vingt ans en lycée technique et donné des cours sur le corpus freudien, dont le complexe d’Œdipe. Je me suis aperçu que cela passionnait bien plus mes élèves que l’impératif catégorique de Kant… Quand on évoque Freud en classe, il y a un moment de grâce : les élèves comprennent qu’il est question de leur père, de leur mère, de leur sexualité. Là, j’ai perçu pour la première fois le pouvoir magique de la psychanalyse. Les élèves me considéraient comme une espèce de gourou détenant la clé de leurs tourments existentiels. Or, ce gourou, je ne voulais pas le devenir, par refus de la position du maître.

 

J.-A. M. : Lacan appelle ça « l’effet du sujet supposé savoir », pouvoir de fascination qui peut se monnayer sous des formes diverses.

 

« Si je parle de légende, c'est pour dénoncer le récit enjolivé, truffé de mensonges et d'oublis volontaires qu'ont élaboré les biographes de Freud »

Michel Onfray

M. O. : Monnayer, le terme est bien choisi ! Après avoir démissionné de l’Éducation nationale, j’ai créé l’université populaire de Caen, où je propose une contre-histoire de la philosophie. Ma méthode consiste à tirer de l’oubli des philosophes méconnus ou à développer une lecture nietzschéenne de la pensée des auteurs « célèbres ». Dans la préface du Gai Savoir, Nietzsche soutient qu’un philosophe est d’abord un homme avec des instincts spécifiques et que sa doctrine, au lieu d’être pure et désintéressée, consiste en un « travestissement inconscient de besoins physiologiques ». Mon projet est d’examiner ces besoins, ces instincts, donc de me livrer à une approche psychobiographique de l’histoire de la philosophie. Dans ce trajet, j’en suis arrivé cette année à Freud – qui coupe le XXe siècle en deux. Pour préparer un séminaire d’une année sur lui, je me suis replongé dans sa vie et son œuvre complète. Et je n’ai pas été déçu par ce que j’y ai découvert…

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Article issu du magazine n°36 janvier 2010 Lire en ligne
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