Aller au contenu principal
Menu du compte de l'utilisateur
    S’abonner Boutique Newsletters Se connecter
Navigation principale
  • Le fil
  • Archives
  • En kiosque
  • Dossiers
  • Philosophes
  • Lexique
  • Citations
  • EXPRESSO
  • Agenda
  • Masterclass
  • Bac philo
 Philosophie magazine : les grands philosophes, la préparation au bac philo, la pensée contemporaine
rechercher
Rechercher

Umberto Eco en 2012 © Serge Picard pour PM

Nécrologie

Mort du philosophe et romancier italien Umberto Eco

Cédric Enjalbert publié le 20 février 2016 5 min
Auteur du “Nom de la rose” et du “Pendule de Foucault”, le romancier et philosophe humaniste Umberto Eco est mort à l’âge de 84 ans.

« Philosopher, c’est régler ses comptes avec la mort » confiait Umberto Eco dans le grand entretien qu’il nous accordait en 2012. Philosophe de formation, sémiologue de conviction, parce qu'il s'agirait de « la forme moderne de la philosophie », le romancier a mis ses comptes en ordre. L’humaniste est mort d’un cancer à 84 ans, vendredi 19 février 2016, à Milan.


Esprit du temps

Enfant d’une famille modeste du Piémont, né à Alessandria, le 5 janvier 1932, fils d’un comptable issu d’une fratrie de treize enfants et petit-fils d’un typographe, Umberto Eco passe la guerre avec sa mère reclus dans les montagnes avant d’être pris en charge par les pères salésiens de l’ordre de Don Bosco.

Umberto Eco en sept dates

  • 1932 Naissance à Alessandria (dans le Piémont, en Italie)
  • 1954 Docteur en philosophie de l’université de Turin avec une thèse sur Le Problème esthétique chez Thomas d’Aquin (PUF)
  • 1956 Assistant à la RAI (la radio-télévision italienne)
  • 1971 Titulaire de la chaire de sémiotique à l’université de Bologne, où il dirigera l’École supérieure de sciences humaines
  • 1980 Publication du Nom de la rose (Grasset)
  • 1992 Leçon inaugurale au Collège de France, « La Quête d’une langue parfaite dans l’histoire de la culture européenne »
  • 2016 Mort à 84 ans, à Milan (Italie)

Entré en philosophie, par « orgueil » après que deux amis philosophes lui démontrent à quel point il était « stupide », et contre l’avis de son père, pour qui « faire de la philosophie c’était mourir de faim », le jeune homme consacre ses études à la pensée de saint Thomas d’Aquin, auteur de la Somme théologique. Il apprend paradoxalement avec ce penseur scolastique à saisir l’esprit du temps, car « saint Thomas ne s’occupait que des mutations contemporaines ». Il soutient une thèse sur Le Problème esthétique chez Thomas d’Aquin (PUF) à la faculté de Turin en 1954.

À l’instar de ses aïeux, – Descartes géomètre, Pascal physicien, Leibniz bibliothécaire –, ces philosophes qui, « avant l’invention de l’Université, étaient des gens qui faisaient un autre métier qu’enseigner l’histoire de la philosophie », le jeune docteur en philosophie ne s’attarde pas à l’Université. Il entre l’année suivante à la radio-télévision italienne (RAI), et s’occupe des programmes culturels. À partir de 1960, il dirige une collection d’essais philosophiques pour un éditeur milanais.

 

Lecteur modèle

L’un de ses premiers essais, L’Œuvre ouverte, paru au Seuil en 1965, met à profit ses discussions au sein du Groupe 63, un collectif d’artistes et d’intellectuels. Umberto Eco y prend acte de l’avènement, avec Mallarmé, Joyce et Kafka, d’un nouveau type d’œuvre, dont le mode d’expression et de signification doit être à chaque fois reconfiguré par le lecteur. L’écrivain n’abandonnera plus cette idée-force, reprise et développée notamment dans Lector in fabula ou la Coopération interprétative dans les textes narratifs (Grasset, 1985) : le texte ne dit pas tout, il requiert la coopération du lecteur. Le sémiologue conçoit l’idée d’un « lecteur modèle » qui sait « interpréter les non-dits du texte ».

Celui qui n’a cessé de défendre le « polyglottisme mental », soit la capacitié à « essayer de comprendre la façon de raisonner des autres cultures », poursuit un enseignement planétaire jusqu’en 1970 : à la faculté d’architecture de Florence, à celle de Milan, à São Paulo, à la New York University et à Buenos Aires. Il interrompt son tour du monde pour occuper dès 1971 la chaire de sémiotique à l’université de Bologne, où il dirigera l’École supérieure de sciences humaines. Il y poursuit l’élaboration de sa théorie de la réception, identifiant un « socle dur de l’être ». De quoi s’agit-il ? « Il y a une belle image de John Wilkins, inventeur d’un langage artificiel au XVIIe siècle. Dans son livre, Mercury, or the Secret and Swift Messenger [« Mercure, ou le messager discret et rapide »], il dessine un schéma avec un cercle et un personnage autour duquel gravite une quarantaine d’annotations : “up”, “down”, “off”, “in”, même si vous ne comprenez pas l’anglais, vous comprenez à quoi elles correspondent. Ce sont les quarante positions d’un corps humain dans l’Univers. Elles constituent le langage universel du corps », expliquait l’essayiste.

Il ajoutait : « Pour un philosophe analytique, réfléchir sur les licornes ne présente aucun intérêt : elles n’existent pas ; pour un sémioticien, les licornes sont d’une importance capitale parce qu’elles font partie de notre ameublement mental. Le fait que je puisse penser les licornes, comme le fait que je puisse penser Dieu ou le père Goriot, constitue un aspect fondamental de notre vie mentale, culturelle, morale et éthique qu’on ne peut évacuer. »


Romancier planétaire

Cet arpenteur de la vie mentale, éthique et culturelle, sémoticien philosophe, ne se met à l’écriture romanesque que tardivement, assurant ne rien vouloir démontrer dans ses romans : « J’écris pour m’amuser ». Et avec quel réussite ! Le Nom de la rose paraît en 1980 et connaît rapidement un succès planétaire. Dix-sept millions d'exemplaires sont aujourd’hui vendus. Le roman est adapté au cinéma en 1986 par le réalisateur Jean-Jacques Annaud, avec Sean Connery qui interprète un moine bénédictain à mi-chemin de l’érudit médiéval et de Sherlock Holmes, pris dans une enquête criminelle et dans une quête métaphysique. Le bibliophile Umberto Eco, possesseur d’une collection de trente mille volumes et d’éditions rares, y témoigne de son amour pour les livres.

Son deuxième roman, Le Pendule de Foucault paru en 1988 et traduit en français en 1990, rencontre également l’engouement du public. L’auteur à succès affine ses théories de la narration en littérature. Il fait notamment paraître Six Promenades dans les bois du roman et d'ailleurs (1996), Experiences in translation (2000), De la littérature (2003). Celui qui a été l’ami de Roland Barthes, prononce en 1992 sa 
leçon inaugurale au Collège de France où il occupe la chaire européenne. Elle s’intitule : « La Quête d’une langue parfaite dans l’histoire de la culture européenne ». Érudit humaniste, convaincu que le Vieux Continent a encore « la capacité de devenir polyglotte, linguistiquement mais aussi mentalement », que c’est d’ailleurs « par là que l’Europe peut contribuer à la mondialisation », Umberto Eco était habité par le sens de l’histoire. « L’histoire trébuche, croyait-il. Nous oscillons en permanence entre de multiples progrès et de multiples pas en arrière. Voilà notre expérience. »


Grand alchimiste

Au cours sa longue expérience, qui a inspiré tant de générations et tant de lecteurs, l’immense écrivain ne s’est jamais départi de la philosophie. Il pensait encore récemment qu’elle est « le plus beau moyen de régler ses comptes avec la mort ». Ce « grand alchimiste » selon les mots du médiéviste Jacques Le Goff, confiait y être « plus ou moins » parvenu.

Avec le sourire facétieux et l’esprit vif qui ont fait de lui un lettré revigorant, il disait vouloir finir sur un trait d’humour, comme Alfred Jarry à qui on demande à sa mort « s’il a besoin de quelque chose, répond : “Un cure-dent.” On lui amène et il meurt. Je voudrais mourir comme ça. Hobbes a fait écrire sur sa tombe : “This is the philosopher’s stone” [“Ceci est la pierre philosophale”]. J’ai demandé dans mon testament qu’on grave sur ma tombe la phrase qui termine La Cité du soleil [1602] de Campanella : “— Attends, attends. — Je ne peux pas, je ne peux pas.” »

Expresso : les parcours interactifs
Comment commenter un texte philosophique ?
Une fois qu’on a compris la thèse d’un texte de philo, il n’y a plus rien à faire ? Faux ! Apprenez comment commenter un texte de philosophie avec une méthode imparable, étape après étape. 
Découvrir Tous les Expresso
Sur le même sujet
Entretien
15 min
Umberto Eco: “Philosopher, c’est régler ses comptes avec la mort”
Charlotte Pineau 29 novembre 2012

Philosophe de formation, sémiologue de conviction, car c’est “la forme moderne de la philosophie”, romancier et essayiste interplanétaire, Umberto…

Umberto Eco: “Philosopher, c’est régler ses comptes avec la mort”

Entretien
15 min
Maurizio Ferraris. “L’imbécile que, donc, je suis”
Catherine Portevin 26 septembre 2017

Ce philosophe italien, ami de Jacques Derrida et dont la verve n’est pas sans rappeler celle d’Umberto Eco, traite aussi bien du téléphone…

Maurizio Ferraris. “L’imbécile que, donc, je suis”

Article
6 min
Maurizio Ferraris : “La planète n’a pas besoin de nous !”
Maurizio Ferraris 30 septembre 2020

Dans un texte enlevé, le philosophe italien Maurizio Ferraris, compagnon de Jacques Derrida et d’Umberto Eco, dénonce l’idée qu’il nous…

Maurizio Ferraris : “La planète n’a pas besoin de nous !”

Le fil
3 min
La bibliothèque d’Umberto Eco cédée à l’État italien
Anne Robin 13 février 2021

La bibliothèque aux plus de 30 000 titres du philosophe italien Umberto Eco, décédé en 2016, va être prise en charge par l’État italien. C’est ce qu’a…

La bibliothèque d’Umberto Eco cédée à l’État italien

Article
8 min
Pauline Koetschet : “La traduction des textes grecs en arabe est un événement fondamental, comparable à la renaissance italienne”
Octave Larmagnac-Matheron 07 avril 2022

L’Institut du monde arabe, à Paris, lance un nouveau rendez-vous dont Philosophie magazine est partenaire : les « Jeudis de la…

Pauline Koetschet : “La traduction des textes grecs en arabe est un événement fondamental, comparable à la renaissance italienne”

Article
6 min
Épicure par Ilaria Gaspari : “Saisir le tabou de la mort à bras-le-corps”
Victorine de Oliveira 06 mai 2020

Confinée à Rome, alors qu’une partie de sa famille se trouvait au cœur du cyclone épidémique à Bergame, la romancière et philosophe italienne…

Épicure par Ilaria Gaspari : “Saisir le tabou de la mort à bras-le-corps”

Article
9 min
Averroès. L’équilibre de la foi et de la raison
Cédric Enjalbert 26 avril 2011

Mort sur la roue, écrasé par une charrette, étouffé par un serpent : les légendes qui entourent la mort d’Averroès sont légion. La peinture et la littérature ont fait de ce juriste, médecin et philosophe, un fanatique ou un athée…


Entretien
13 min
Laurent Thirouin : faites vos jeux avec Pascal
Octave Larmagnac-Matheron

Spécialiste de la littérature française du XVIIe siècle, Laurent Thirouin fait de Pascal une lecture aussi personnelle que fertile. Il relève l’importance du rire dans l’œuvre de Pascal, et discerne dans le motif du jeu une clef de…


À Lire aussi
L’humanité, elle non plus, n’est pas éternelle
L’humanité, elle non plus, n’est pas éternelle
Par Etienne Tassin
octobre 2017
Pierre Michon : “J’ai fait comme si le Covid m’était destiné, à moi personnellement”
Par Martin Legros
juillet 2020
Timothy Morton : “Nous ne sommes pas à la fin des temps mais au commencement”
Timothy Morton : “Vous n’avez pas besoin de devenir écologique, vous l’êtes déjà”
Par Octave Larmagnac-Matheron
octobre 2021
  1. Accueil-Le Fil
  2. Articles
  3. Mort du philosophe et romancier italien Umberto Eco
Philosophie magazine n°178 - mars 2024
Philosophie magazine : les grands philosophes, la préparation au bac philo, la pensée contemporaine
Avril 2024 Philosophe magazine 178
Lire en ligne
Philosophie magazine : les grands philosophes, la préparation au bac philo, la pensée contemporaine
Réseaux sociaux
  • Facebook
  • Instagram
  • Instagram bac philo
  • Linkedin
  • Twitter
Liens utiles
  • À propos
  • Contact
  • Éditions
  • Publicité
  • L’agenda
  • Crédits
  • CGU/CGV
  • Mentions légales
  • Confidentialité
  • Questions fréquentes, FAQ
À lire
Bernard Friot : “Devoir attendre 60 ans pour être libre, c’est dramatique”
Fonds marins : un monde océanique menacé par les logiques terrestres ?
“L’enfer, c’est les autres” : la citation de Sartre commentée
Magazine
  • Tous les articles
  • Articles du fil
  • Bac philo
  • Entretiens
  • Dialogues
  • Contributeurs
  • Livres
  • 10 livres pour...
  • Journalistes
  • Votre avis nous intéresse