Un toit pour un soi
Et si, pour reprendre pied dans la vie lorsqu’on a perdu son travail ou son logement, il fallait se voir offrir la possibilité de redevenir soi, avant d’être confronté à des injonctions de réinsertion et à des contrôles en tout genre ? C’est le pari éminemment « philosophique » du projet expérimental Zone libre mené à Villeurbanne (69), ville limitrophe de Lyon, depuis l’été 2021. Nous sommes allés voir sur place comment cela se passe.
Voilà sa première adresse. Une cahutte bleue aux airs de chalet, façon bois aggloméré. Un 24m2 planté sur le terrain d’une ancienne usine de caoutchouc de Villeurbanne. « C’est encore tout dans les cartons ! », confesse Caroline entre les jappements de son petit terrier blanc. Contre les murs tiennent des piles de boîtes ouvertes sur le dessus et toutes un peu déformées, de quoi passer une main pour saisir une boîte de médicaments, du matériel de couture ou des vivres. Hormis la table et la chaise, aucun meuble. Pas même un rideau de douche. « Allez, il me manque un placard et un canapé et ce sera parfait », s’amuse notre hôte, casée ici depuis sept mois. Difficile de s’installer quand on a passé vingt années dehors, dont dix à la rue, « en vrille » après le décès de sa mère. « Je suis tombée dans l’héro, puis je suis partie vivre dans une caravane au milieu des champs dans l’Ain. Je faisais du gardiennage pour le compte du propriétaire contre de l’eau et l’électricité. Il y a pas mal de vols de fioul là-bas. Puis il m’a demandé de partir. »
Avant Caroline, dix autres habitants ont atterri ici en septembre 2021, dans neuf autres installations identiques sous les toits et la cour de la friche industrielle, au sein de Zone Libre, une expérimentation lancée depuis un an et demi par l’association lyonnaise Alynea et la Dihal pour accueillir les personnes refusées de tous les foyers. « Ou c’est eux qui refusent d’aller dans des hébergements », glisse Virginie Gaudon, éducatrice spécialisée, à la table de la grande cuisine adossée à des conteneurs maritimes convertis en bureaux, au milieu des 2000m2 de la manufacture. « Ils refusent déjà parce qu’il faut constituer des dossiers, puis il y a des règles dans ces centres. Il faut rentrer avant une certaine heure, vous pouvez pas inviter qui vous voulez. Comme le disait l’un d’entre eux, vous êtes obligés de choisir entre votre copine et votre chien. Alors ils restent dehors. » Caroline avait bien une place dans un foyer pour avoir une boîte aux lettres mais pas question d’y habiter si c’est pour abandonner sa chienne et ses quatre chats.
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