Harry Potter. A l'école des sciences morales et politiques

Une recension de Mehdi Belhaj Kacem, publié le

On n’attendait pas que Jean-Claude Milner, linguiste austère, essayiste sophistiqué, élégant érudit, sacrifie à la « pop philosophie » – entendons à l’exercice de ses talents de pointe sur un objet de la culture dite populaire. Mais on est vite rassuré quant aux intentions de l’auteur : ici, aucun cynisme instrumental, aucune tentative du philosophe de tirer à soi. L’érudition habituelle de l’auteur, non seulement est mise au service de l’œuvre étudiée (il en parle avec le même sérieux qu’ailleurs de Mallarmé ou de Lacan), mais encore elle sert à révéler toute l’érudition de l’œuvre elle-même. Harry Potter superpose des strates de savoir qui embrassent toute l’histoire du Royaume-Uni, allant du folklore gaélique à la mentalité victorienne, de John Dee à Dickens, de Locke à Thatcher. L’univers de l’école de Poudlard, du professeur Dumbledore, de l’horrible Voldemort, compose une véritable comédie humaine de la Grande-Bretagne éternelle. Milner reconnaît en Poudlard « un collège anglais idéalisé, plus égalitaire et plus ouvert que les public schools effectives » : on ne peut s’empêcher de deviner que l’auteur songe, avec nostalgie, à sa propre jeunesse normalienne et à une sorte d’École normale supérieure ouverte à tous. Au final, on a lu un très bel essai politique sur l’éducation.

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