La méthode de l'égalité

Une recension de Marion Rousset, publié le

« Le bon entretien est celui où tout à coup vous dites des choses qui n’étaient pas prévues. » De ce point de vue, La Méthode de l’égalité est un livre réussi. Cette conversation entre Jacques Rancière et deux universitaires, Laurent Jeanpierre et Dork Zabunyan, chemine dans l’entrelacs de la biographie, de la philosophie et de la politique. Dès l’évocation des années de préparation à l’École normale supérieure filtre déjà l’esprit critique de celui qui récusera la distinction entre savants et ignorants : « J’ai découvert pour la première fois que le sommet de la hiérarchie professorale n’avait aucun rapport avec un niveau de compétence ou de capacité pédagogique. » L’égalité des intelligences, principe qu’il ne cessera de vérifier, influence jusqu’à sa manière de travailler. Il se fait, en effet, autodidacte : « Tous les points forts de mon travail sont liés à une recherche personnelle où j’apprenais les choses en m’immergeant dans une matière inconnue. » Voici un ouvrage qui ne se contente pas d’éclairer des notions clés telles que le « partage du sensible », la « part des sans parts » ou le « maître ignorant ». Il oblige aussi Rancière à se frotter aux objections : en postulant « la compétence de n’importe qui », ne magnifie-t-il pas en fait des figures ouvrières d’exception ?

Signalons, par ailleurs, Figures de l’histoire (PUF, 80 p., 10 euros), la réédition de deux textes introuvables, écrits par Rancière en 1996 à l’occasion de l’exposition Face à l’Histoire au Centre Georges-Pompidou. Stimulant.

Sur le même sujet

Bac philo
4 min
Olivier Dhilly

En général, ce sujet rassure. On se dit : puisqu’il y a un texte, on aura quelque chose à dire. Mais gare à l’illusion de facilité ! Le risque est de ne pas comprendre le texte ou de le paraphraser sans l’expliquer au lieu de le prendre…



Article
3 min
Michel Eltchaninoff

Les syndicats de la SNCF ont choisi d’arrêter le travail deux jours sur cinq pendant trois mois. En changeant de stratégie, ils semblent suivre…

Grève en pointillé. La méthode Sunzi

Article
4 min
Nicolas Grimaldi

Lorsqu’il publie le Discours de la méthode, Descartes a 41 ans. Il y a déjà dix-huit ans qu’il a formé le projet de fonder et de développer une science si universelle qu’il n’y eût aucun phénomène qu’elle ne permît d’expliquer.


Article
4 min
Martin Duru

Bon sens (ou raison)« Le bon sens est la chose du monde la mieux partagée. » Cette formule, qui ouvre la première partie du Discours de la méthode, mérite une explication : le « bon sens » évoqué ici ne renvoie pas à ce que l’on…


Article
2 min
Martin Duru

Le “Discours de la méthode” pour bien conduire sa raison, et chercher la vérité dans les sciences (selon le titre original complet) est l’œuvre la plus fameuse de Descartes, avec ses “Méditations métaphysiques”.