Les Chaînes sans fin. Histoire illustrée du tapis roulant
Une recension de Jean-Marie Durand, publié leC’est en tombant en plein Paris sur une agence de pompes funèbres surmontée au premier étage d’un club de fitness où plusieurs silhouettes étaient en train de s’entraîner à petites foulées sur d’indiscernables machines, « purgatoire gymnique où des âmes défuntes joggaient sur place comme en apesanteur », que l’essayiste Yves Pagès s’est décidé à mener cette passionnante enquête sur les origines et l’histoire du tapis roulant. Convaincu que quelque chose de décisif se joue dans cette association entre la mort qui rôde et la course qui bute. Pourquoi désire-t-on aller nulle part au plus vite, se déplacer en faisant du surplace, perdre sa vie à la rattraper ? C’est la question métaphysique qui accompagne cette histoire foisonnante. En s’attardant sur une multitude de techniques déployées depuis le XVIIIe siècle pour faire rouler sur des tapis des animaux, des marchandises et des humains, l’auteur perçoit l’esprit tordu de notre temps, raccordant l’accélération et le surplace, l’inventivité et la stérilité, l’ingéniosité et l’absurde, la vitalité et le morbide. Dans cette drôle d’histoire, jamais documentée jusque-là dans sa globalité, Pagès fait honneur à des ingénieurs au service de l’accélération mécanique des mouvements d’animaux (une course à l’arrêt de chevaux galopant à contre-courant sur un « tablier à chaîne sans fin » motorisé en 1891), de marchandises (le tapis de caisse dans le premier mall des États-Unis en 1955), de voyageurs (depuis le premier « trottoir roulant » installé lors de l’Exposition universelle de Paris en 1900) ou de sportifs, avec à leur tête, dès 1994, l’actrice Jane Fonda, figure maîtresse du fit-business. Avec le tapis de course, « s’expriment tout à la fois le motif sisyphéen de nos servitudes volontaires et l’imminence capitalistique d’un saut... bien au-delà du précipice », écrit Pagès, qui perçoit dans cet appareil la prégnance d’un mot d’ordre : « une croissance illimitée ». Mais il n’invite pas à renoncer au mouvement qui nous emporte sur des tapis de plus en plus sophistiqués. Il s’amuse plutôt à mettre à plat le désir hypnotique des sujets du monde actuel se surmenant en pure perte (de poids). Comme s’il tenait dans cette image d’une course sur place accélérée le symbole de notre soumission et de notre aliénation à la culture de la performance.
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