La mort

2_Lui faire face

Alexandre Lacroix publié le 5 min

L’angoisse, c’est bien ! C’est même la meilleure des choses à traverser, nous suggèrent Pascal ou Heidegger : car c’est dans un affrontement avec la mort que surgirait la vie authentique. Vraiment ?

Si l’on n’arrive pas à se convaincre que la mort n’est rien, on peut s’engager dans la direction contraire : plonger jusqu’au fond de l’angoisse, ne jamais cesser de penser à la mort et, finalement, s’en faire une amie. Arrêtons le boniment ! Regardons les choses telles qu’elles sont : la vie est un don et une grâce mais, un jour, il nous faudra fermer les yeux et, à cet instant-là, nous serons seuls, apeurés, nus, éjectés hors de ce monde, mis à la porte sans indemnités de la multinationale du vivant. Quand « j’ai voulu découvrir la raison » de tous nos malheurs, raconte Pascal, « j’ai trouvé qu’il y en a une bien effective, qui consiste dans le malheur naturel de notre condition faible et mortelle, et si misérable, que rien ne nous peut consoler, lorsque nous y pensons de près » (Pensées, B139). À quoi bon fuir cette réalité en courant après le travail, les loisirs, les occupations en tous genres ? « La seule chose qui nous console de nos misères est le divertissement, et cependant c’est la plus grande de nos misères. Car c’est cela qui nous empêche principalement de penser à nous… Le divertissement nous amuse et nous fait arriver insensiblement à la mort » (B146). Pour peu que l’on accepte de regarder en face le soleil noir de la mort, celui-ci ne nous aveuglera pas, mais, au contraire, nous rendra la vue. Prendre conscience que la vie est limitée, fragile, n’est-ce pas la reconsidérer et lui donner toute sa valeur ? Vivre en étant conscient que c’est une chance et un sursis : n’est-ce pas là une promesse d’intensité plus excitante que l’insouciance bestiale ?

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