Chaos créateur
Le Centre Pompidou s’intéresse au rapport que Francis Bacon entretenait à la littérature et à la philosophie. Resserrée sur les dernières années de sa vie, entre une grande retrospective à Paris en 1971 et sa mort en 1992, l’exposition met en regard les textes de sa bibliothèque et ses tableaux, sans explication.
Contre toute attente, la pièce maîtresse de l’exposition dédiée au lien qu’entretient Francis Bacon (1909-1992) avec la littérature et la philosophie, au Centre Pompidou, est un robinet. Loin des figures morbides et torturées habituellement associées au peintre anglais, cette toile de 1982 était pourtant, selon lui, l’expression la plus aboutie de sa démarche, une peinture qui « fonctionne », un « tableau immaculé » apte à rendre ce que Georges Bataille nomme l’informe. L’écrivain, qui figure en bonne place dans la bibliothèque de Bacon, note ainsi : « La philosophie entière n’a pas d’autre but : il s’agit de donner une redingote à ce qui est, une redingote mathématique. Par contre, affirmer que l’univers ne ressemble à rien et n’est qu’informe revient à dire que l’univers est quelque chose comme une araignée ou un crachat. » En peignant des dunes (photo), de la vapeur ou de l’eau, Bacon affirme infatigablement, entre peinture figurative et abstraction, le choix du « crachat », de l’inclassable, préférant après Nietzsche, qu’il lit et relit, la violence de l’ivresse dionysiaque à la beauté plastique apollinienne. Pour Michel Leiris, dont Bacon devient l’ami, il s’agit autrement pour l’artiste de faire entrer une force animale dans la chorégraphie des formes, tel un matador. Ces penseurs de l’introspection, ces poètes de la transgression, arment le ressort de la création dans l’atelier du peintre, comme des « valves de sensation » gonflant le cœur de l’artiste. Prenant le parti d’un face-à-face entre soixante toiles et six textes issus de sa bibliothèque (lus par des comédiens), l’exposition n’offre étonnamment aucun cartel d’explication, abandonnant le visiteur à la seule « logique de la sensation » – selon le titre d’un ouvrage que Deleuze consacre au peintre. Elle s’achève par un fascinant film d’entretiens, où l’on peut voir l’atelier de Bacon en vrac, les murs maculés de taches, qu’une petite maquette reproduit mystérieusement sur le côté. « Ce chaos m’évoque des images », disait Bacon.
Et si le travail du peintre était de saisir l’invisible ? Gilles Deleuze soutient ce point de vue dans Logique de la sensation, son essai sur Francis Bacon. Réflexions autour d’un panneau de Triptych, peint en 1970.
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