Comment avons-nous appris à vivre avec la solitude ?
On croit que la solitude est une expérience que l’on vit… seul, mais il n’en est rien. Dans un livre passionnant consacré à l’histoire de la solitude, l’historienne Sabine Melchior-Bonnet retrace la conquête de la solitude à travers les époques, du Moyen Âge au XXIe siècle en passant par la Renaissance. Mais comment explique-t-on l’évolution de la solitude ?
En 2023, 11 millions de Français se sentent régulièrement seuls, selon une étude de la Fondation de France. D’un côté, la solitude est synonyme de détresse ; mais de l’autre, l’approche moderne en fait une variation de l’épanouissement personnel : malheur à celui qui se retrouve seul, bonheur à celui qui aime la solitude. Les versants positifs et négatifs de la solitude prouvent que le concept a bien évolué. Dans le passé, il était difficile d’apprécier la solitude ; aujourd’hui, les individus l’éprouvent volontiers comme un besoin. Qu’elle soit subie ou choisie, comment avons-nous appris à vivre avec la solitude ?
Au Moyen Âge, la solitude comme fardeau
C’est au Moyen Âge que Sabine Melchior-Bonnet fait débuter son Histoire de la solitude (PUF, 2023). À cette époque, la solitude était considérée comme un fardeau. « La solitude, c’est vivre une mort sociale », écrit-elle. La solitude était synonyme de détresse et gage de malheur. Les communautés médiévales étaient solidaires, soudées, unies si bien que la solitude était nécessairement accidentelle car la famille et le voisinage entouraient quotidiennement l’individu. Sans eux, l’être seul s’exposait à tous les dangers. Le sentiment de solitude s’accompagnait donc toujours d’un sentiment d’insécurité.
“Silencieuse, inquiétante, sournoise, la solitude est toujours, et pour longtemps, affectée d’une connotation négative ; elle renforce le sentiment d’insécurité face à des dangers incontrôlables. Elle est le lot du ‘pauvre honteux’, du fou, de l’étranger, et elle s’abat sur les plus faibles, victimes des exactions répétées des guerres ou des famines”
Sabine Melchior-Bonnet, op. cit.
Les épisodes de peste noire et de guerre ayant accentué la violence dans les villes, pendant longtemps, il resta très difficile de sortir de chez soi non accompagné, de peur d’être pris à parti dans une bagarre. « Il ne fait pas bon à rester seul. La solitude est considérée comme subversive, et pour longtemps encore. »
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