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Florence Burgat. ©Emmanuelle Marchadour/Divergence

Nouveau hors-série “Vivre et penser comme un arbre”

Florence Burgat : “Les plantes sont-elles des êtres vivants ?”

Florence Burgat, propos recueillis par Octave Larmagnac-Matheron publié le 20 mai 2022 10 min

Sans mésestimer la beauté du règne végétal, la philosophe Florence Burgat critique la tendance à dissoudre, à tout prix, la frontière avec le règne animal. Question d’ontologie, assure-t-elle : la plante ne peut être pensée comme un individu. Elle est (potentiellement) immortelle.

 

À quoi tient, pour vous, le sentiment de respect tout particulier que nous éprouvons pour les arbres ?

Florence Burgat : Ce sentiment de respect tient probablement à leur grandeur et à leur longévité, à la renaissance qu’ils offrent au regard, en se présentant sous plusieurs atours tout au long de l’année. Ils sont comme la trace vivante de quelqu’un qui aurait assisté à une histoire que nous ne pouvons que grossièrement nous représenter. Il faut cependant immédiatement noter que lorsque l’on évoque les arbres, ce sont toujours ceux qui sont majestueux et vieux. Ce même sentiment ne semble guère rappelé s’agissant d’arbustes frêles et jeunes… que nul n’hésite à arracher du sol pour une raison ou pour une autre. Voilà qui montre combien c’est ce que notre imaginaire impute aux grands arbres, écrasants, qui façonne ce sentiment, plus que de véritables critères fondés moralement. La beauté du monde végétal et son impassibilité nous fascinent précisément parce que notre condition d’être mortels leur est inverse.

 

Pour quelle raison peut-on parler d’inversion ? Vous vous opposez donc à ceux qui soutiennent une continuité, voire une indistinction des formes de vie, en soulignant l’altérité radicale des deux règnes ?

L’étude historique et épistémologique de la question végétale, si l’on peut la formuler comme pendant à la question animale, révèle des points de vue autrement plus nuancés que l’actuelle indistinction entre les plantes et les animaux, voire entre les plantes et les humains. Cette indistinction s’appuie soit sur des analogies qui sont prises pour des homologies (les plantes respirent et ont besoin d’eau « comme nous », par exemple), soit sur l’appréciation d’une continuité de la matière vivante au niveau de l’infiniment petit (sur le plan moléculaire, tous les organismes se ressemblent, ils répondent aux mêmes impératifs fonctionnels). Cette seconde raison pourrait avoir pour ressort l’hégémonie actuelle d’une biologie réductionniste qui évacue la dimension de l’expérience vécue. La fascination que suscite le modèle explicatif unique qui inspire les programmes d’intelligence artificielle joue probablement un rôle dans ce ralliement à l’indistinction.

Une autre raison, d’un tout autre ordre, tient en ceci que postuler une telle indistinction permet d’éluder tous les problèmes éthiques qui se posent à propos des formes de vie psychobiologiques, et qui leur sont absolument singuliers. Concernant la première raison de la confusion (prendre une analogie pour une homologie), précisons encore ceci : nous percevons un nombre fini de formes, une finitude qui assure au monde perçu sa stabilité. Notre perception n’est pas analytique, mais synthétique : nous ne construisons pas la forme à partir du divers qui la compose. Ce que nous percevons, ce sont des formes qui se livrent à nous d’un coup, et dont les contours nous rappellent immédiatement une forme familière. Telle forme végétale évoque, par exemple, la forme humaine (la tête, les bras, le tronc) ; cette forme, alors chargée d’une signification, peut induire le sentiment d’un état psychologique – par exemple, la fatigue, au spectacle d’un arbre croulant sous de trop nombreux fruits. Voilà pourquoi un sentiment d’empathie peut survenir, mais une empathie en quelque sorte barrée, car l’arbre n’est pas fatigué.

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Article issu du Hors-série n°N° 53 mai 2022 Lire en ligne
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