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Hartmut Rosa en 2019 © Guillaume Chauvin

Hartmut Rosa : “Pour résonner, il faut admettre que les choses nous échappent”

Hartmut Rosa, propos recueillis par Martin Legros publié le 14 janvier 2020 17 min

Après s’être penché sur l’accélération à l’œuvre dans nos sociétés, le philosophe et sociologue allemand Hartmut Rosa se demande, dans son nouvel essai “Rendre le monde indisponible”, pourquoi notre environnement nous apparaît de plus en plus vide à mesure que nous en prenons le contrôle. En guise de remède, il invite à nous ouvrir à ce qui nous fait vibrer.

« Au fait, je m’apprête à acheter un petit canon à neige. Je trouve qu’on devrait l’utiliser quand vous viendrez me voir. Il y a des chances qu’il y ait de la neige là où je vis. Mais on ne sait jamais, s’il n’y en a pas, on en produira. » En recevant ce message de Hartmut Rosa quelques jours avant de réaliser cet entretien, j’étais abasourdi. Le sociologue et philosophe allemand publiait un très beau texte, Rendre le monde indisponible, qui cherche à penser l’indisponible – dans le quotidien, le jeu, l’art, l’amour, la politique même – comme l’expérience fondamentale de l’existence humaine, nous mettant en contact avec ce qui nous fait vibrer et nous dépasse. Or cette réflexion s’ouvre par une évocation lumineuse de la neige dans laquelle il voit « la forme pure de manifestation de l’indisponible ». Celui qui dénonce dans la modernité une tentative folle de maîtrise intégrale du monde me proposait donc, pour ma venue, de faire jaillir de la neige artificielle dans son jardin ! Humour ? Incohérence ? À la réflexion, cette anecdote est révélatrice de la démarche de Rosa, de ce qui rend si précieuse sa réflexion et explique pourquoi il est l’un des penseurs que nous suivons de près depuis plusieurs années – nous avons d’ailleurs rassemblé en un volume ses différentes contributions au journal (Remède à l’accélération). À la différence de nombreux critiques de la modernité qui se placent souvent en surplomb, Rosa se considère comme partie prenante, c’est sur lui-même autant que sur les autres qu’il déchiffre nos contradictions sociales et culturelles. Voilà pourquoi il a si bien su analyser l’accélération contemporaine : comme une dynamique génératrice d’aliénation mais aussi comme une expérience grisante, celle de la démultiplication des activités et des possibles, un « succédané de l’éternité ». Voilà qui explique pourquoi aujourd’hui, avec les concepts de résonance et d’indisponibilité, il parvient à nommer, derrière notre frénésie pour la technique et la consommation, l’attente d’une expérience où le monde, les autres, la nature nous parleraient enfin et où nous pourrions répondre à cette interpellation. Lire, s’entretenir, penser avec Rosa, c’est avoir le sentiment de s’ouvrir aux aspirations existentielles contradictoires qui nous habitent et qui sont le ressort vivant de nos sociétés. Une voix nous parle qui met des mots et des concepts sur la manière dont nous perdons le temps, les autres, le monde. Et sur la manière dont nous pouvons les retrouver. Avec ou sans canon à neige.

Hartmut Rosa en 6 dates

  • 1965 Naît à Lörrach, en Allemagne, le 15 août
  • 1993 Achève ses études en sciences politiques et en philosophie à l’université de Fribourg
  • 1997 Soutient sa thèse, Identité et pratique culturelle. La philosophie politiqu­e­ selon Charles Taylor
  • 2005 Fait paraître Accélération. Une critique sociale du temps
  • 2013 Est nommé directeur du Collège Max-Weber de l’université d’Erfurt
  • 2018 Traduction française de Résonance. Une sociologie de la relation au monde

Vous êtes né en 1965 à Lörrach, dans la Forêt-Noire. Est-ce que le contact avec la nature a compté dans votre formation ?

Hartmut Rosa : Oui, cela m’a très fortement influencé. Enfant, je faisais de longues marches à pied pour atteindre le point culminant où l’on avait une vue sur la vallée. Et j’étais fasciné par les neiges éternelles au sommet des montagnes. Avec mes parents, nous faisions des excursions dans les Alpes suisses, et je me souviens de l’impression de connexion avec l’infini que j’ai ressentie face au trois sommets de l’Eiger, du Mönch et de la Jungfrau qui culminent à plus de 4 000 mètres d’altitude et dominent la vallée de Grindelwald. C’était comme si ces montagnes me parlaient directement. Quant à la forêt, c’était une sorte de présence silencieuse, un espace où nous allions ramasser des champignons, cueillir des mûres et nous baigner dans les lacs pour nous ressourcer.

 

Ces expériences ont-elles joué un rôle dans votre vocation philosophique ? 

Sans doute, même si cela a pris du temps. Il se trouve que j’ai grandi à une vingtaine de minutes de l’endroit où Martin Heidegger se retirait pour méditer, dans la célèbre hutte de Todtnauberg, même si à l’époque je l’ignorais. J’ai commencé mes études supérieures à l’université de Fribourg, où son enseignement était encore très présent. Mais la pensée de Heidegger était trop métaphysique et trop conservatrice pour le jeune homme que j’étais. Je voulais découvrir le vaste monde. Et je suis allé poursuivre mes études à la London School of Economics où j’ai découvert une grande ville, mais aussi Karl Marx, Max Weber et la pensée de Charles Taylor qui venait de publier Les Sources du moi, ce grand livre sur l’invention moderne de l’intériorité. La question de la modernité, urbaine, capitaliste et technologique, m’a fasciné. Quand je revenais dans la Forêt-Noire, je ressentais un mode d’être-au-monde différent, une autre temporalité. C’est l’expérience de ce clivage qui a fait surgir mes premières interrogations. 

 

Dans vos travaux de sociologie, on a le sentiment que vous analysez des phénomènes contemporains, comme l’accélération, mais en les abordant sous un angle existentiel et métaphysique, inspiré de la pensée de Heidegger notamment. 

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Article issu du magazine n°136 janvier 2020 Lire en ligne
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