“Je suis le seul Blanc dans le métro !”
Que signifie pour un Blanc faire attention à la couleur de la peau des autres ? Flirter avec la xénophobie ? Ou prendre conscience que l’indifférence à la couleur de peau est un luxe que tout le monde ne peut pas s’offrir ?
« Gare du Nord… Gare du Nord ». Nous sommes dans une rame de la ligne 4 du métro parisien. Je me rends avec une amie rue Myrrha, dans le XVIIIe arrondissement, visiter un appartement. Au moment où les portes se ferment, mon amie me glisse à l’oreille : « Tu as remarqué ? On est les seuls Blancs. » Non, je n’avais pas remarqué. Un rapide coup d’œil me permet de constater que c’est bien le cas. Toutes les autres personnes dans le métro ont la peau foncée – en très grande majorité des hommes entre 20 et 50 ans. Comment se fait-il que je ne l’ai pas relevé ?
Si je n’ai pas prêté attention au fait que nous sommes les seuls Blancs, c’est, me dis-je, que je ne suis pas raciste : comme la présence de personnes noires ne m’effraie ni ne me scandalise, je n’avais a priori pas plus de raison de le noter que quand je ne suis qu’avec des Blancs. J’ai vu dans ce métro une collection de silhouettes, c’est tout. D’ailleurs, ayant été à l’école dans un quartier populaire de Nîmes – l’un de ces quartiers où la plupart des personnes « de couleur », comme on dit, sont de facto assignées à résidence –, j’ai toujours côtoyé des personnes issues d’autres origines que la mienne. Leur présence m’est familière. Au contraire, par exemple, de l’un de mes amis d’un petit village du Tarn-et-Garonne qui m’a confié que la première fois qu’il avait vu un homme noir, à 6 ans, il s’était mis à pleurer.
La « racialisation » de l’espace public
À compter de ce jour, quelque chose a changé dans mon regard. Désormais, je suis plus attentif. À chaque fois qu’une telle situation – être le seul Blanc – s’est reproduite, je l’ai immédiatement noté. Pendant quelque temps, je me suis même mis à relever systématiquement la couleur de peau des personnes m’entourant dans le métro. Il m’est arrivé de repérer que dans tel carré étaient assises trois femmes blanches et un homme noir, et dans tel autre, deux hommes noirs, une femme maghrébine et une femme asiatique. En somme, il m’est apparu que je « racialisais » l’espace public, malgré moi, à la suite d’une surprise inaugurale.
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