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Jean-Michel Blanquer et Catherine Kintzler en 2017 © Édouard Caupeil

Jean-Michel Blanquer, Catherine Kintzler. L’éducation à armes égales

Catherine Kintzler, Jean-Michel Blanquer, propos recueillis par Martin Legros publié le 24 octobre 2017 17 min

Pour rompre avec un égalitarisme et un pédagogisme dévoyés, le ministre de l’Éducation nationale Jean-Michel Blanquer propose de revenir aux compétences fondamentales dès le plus jeune âge. Une ambition que partage la philosophe et ancienne prof Catherine Kintzler, qui s’inquiète cependant des possibles dérives des réformes en cours et de la remise en cause du statut de la philosophie au baccalauréat.

En ce début de matinée d’automne, la lumière est vive, rue de Grenelle, dans le salon où nous attendons, Catherine Kintzler et moi, le ministre de l’Éducation nationale Jean-Michel Blanquer. Il est intervenu le matin même sur France Inter pour répondre aux accusations de conservatisme et à la démission du président du Conseil supérieur des programmes, Michel Lussault. Il faut dire que le ministre, pour sa première rentrée scolaire, est très exposé, lui qui a décidé de revenir sur une série de mesures prises par sa prédécesseure, Najat Vallaud-Belkacem, comme la suppression des options grec et latin et des classes bilangues au collège, ou la fin des devoirs accompagnés. Mais il a aussi choisi de réorienter son action sur l’apprentissage des fondamentaux au CP, parent pauvre du système.

Alors que les polémiques se multiplient au sujet de réformes importantes sur lesquelles il réfléchit depuis longtemps, Jean-Michel Blanquer nous fait part d’emblée de sa satisfaction de pouvoir échanger sur le fond avec une philosophe spécialiste de l’éducation. On l’ignore, mais parallèlement à sa formation de juriste et à sa carrière dans l’Éducation nationale, il entretient un lien étroit avec la philosophie : après une maîtrise de philo à la Sorbonne, il a été l’élève de John Rawls, le grand philosophe de la Théorie de la justice, à Harvard – « il était un peu fatigué, mais son cours sur Rousseau était passionnant » –, et dans ses livres programmatiques consacrés à l’éducation, il s’inspire autant des recherches en neurosciences de Stanislas Dehaene que de la pensée de la complexité d’Edgar Morin.

Face à lui, Catherine Kintzler : professeure en lycée pendant plus de vingt ans, spécialiste de Condorcet – l’inventeur de l’école républicaine –, mais aussi figure engagée de la gauche laïque, qui s’est très tôt élevée contre les dérives d’une certaine pédagogie égalitariste. « L’école est là pour armer les futurs citoyens, pas pour les désarmer », affirme-t-elle avec vigueur. Elle partage avec le ministre l’ambition de concilier instruction et épanouissement des élèves, mais ne croit pas que l’on puisse faire reposer la charge des réformes sur l’autonomie des établissements, qui risque de renforcer l’hétérogénéité du système. Surtout, elle s’ouvre à lui d’une inquiétude qu’à Philosophie magazine nous partageons : l’éventualité d’une suppression de la philosophie dans un baccalauréat réduit à quatre matières, selon le vœu du président de la République. Au terme d’un dialogue profond, le ministre s’est engagé à conserver à la philosophie la place exceptionnelle qui est la sienne en France, voire à la renforcer. Comme le dit Catherine Kintzler, « c’est la meilleure arme des citoyens ! »

 

Catherine Kintzler : Avant d’aborder notre discussion sur l’éducation, je serais curieuse de savoir ce qui vous a incité à faire des études de philosophie et en quoi cela reste présent dans votre réflexion et votre action. Ce n’est pas tous les jours que nous avons un ministre passionné de philosophie…  

 

Jean-Michel Blanquer : C’est la lumière qui m’a attiré. Très tôt, avant même la classe de terminale, je m’emparais de livres de philosophie dans les bibliothèques avec l’impression d’anticiper sur une promesse. J’attendais la philosophie comme quelque chose qui me permettrait d’accéder à une compréhension du monde – et, de fait, c’est ce qui s’est passé. J’ai eu un très bon professeur au lycée. Ce fut une vraie révélation. Ensuite, quand j’ai fait des études de droit, j’ai voulu étudier la philosophie en parallèle. Là où la philosophie ouvre des perspectives, le droit permet de les structurer. Depuis, je n’ai plus cessé de fréquenter la philosophie, par désir, par bonheur. Au moment de mes études, j’ai été très marqué par l’enseignement des stoïciens, par l’idée que l’on doit distinguer ce qui dépend de nous et ce qui ne dépend pas de nous. C’est un enseignement qui est très précieux quand on a 20 ans. Mais l’auteur sur lequel j’ai le plus travaillé, c’est Locke. J’ai rédigé mon mémoire de maîtrise sur le Second Traité du gouvernement civil, sur la notion de « pouvoir fédératif », qui est le pouvoir de conduire la politique étrangère et que Locke propose de confier à une instance distincte. Une idée reprise dans la Constitution américaine qui confère au Sénat un rôle prépondérant dans la politique étrangère. Les idées des philosophes peuvent avoir une réelle influence sur l’histoire. Enfin, mon dernier grand sujet d’étude a porté sur le statut constitutionnel de l’éducation. L’éducation est l’enjeu suprême de la politique – de nombreux philosophes depuis Platon le disent. Or elle est pratiquement absente des grands textes constitutionnels. C’est ce vide que j’ai essayé de comprendre. Mais vous-même, comment en êtes-vous venue à réfléchir à l’éducation ?

 

C. K. : S’agissant de l’éducation, j’ai suivi un chemin inverse du vôtre. Je suis partie de mon expérience. J’ai été professeure de philosophie pendant vingt-deux ans en lycée avant d’intégrer l’Université. Et je suis d’abord une spécialiste d’esthétique. Initialement, c’est pour des raisons politiques que je me suis intéressée à l’éducation. Nous étions au début des années 1980, une politique scolaire se mettait en place qui cherchait à brancher l’école sur son « extérieur », à l’adapter à des demandes sociales. On nous invitait à libérer l’école du « carcan scolaire et disciplinaire » pour en faire un « lieu de vie ouvert sur le monde », quitte à renoncer à l’instruction. Or renvoyer l’école à son environnement immédiat, c’est abandonner les enfants à leur milieu. La pédagogie officielle qui s’installait traitait le savoir comme une oppression. J’ai entendu dans les murs mêmes de ce ministère des pédagogues me dire que, au fond, chaque fois que je passais une heure en bibliothèque, je la volais aux enfants… Avec d’autres, comme Jean-Claude Milner et Jacqueline de Romilly, mais aussi Jean-Pierre Chevènement, nous avons défendu l’école républicaine. À l’époque, nous étions très isolés à gauche, on nous traitait de réactionnaires. Alors qu’aujourd’hui, les choses ont changé. L’opinion a compris les limites de cette politique. De sorte que vous arrivez au bon moment, si je puis dire. Ce que je me demande, c’est si un aspect de votre « pragmatisme » ne consiste pas à suivre cette évolution.

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