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 Philosophie magazine : les grands philosophes, la préparation au bac philo, la pensée contemporaine
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© Georges Bartoli/Divergences pour Philosophie magazine.

Entretien

Catherine Kintzler : “Le dépaysement offert par le savoir est un appel d’air, une renaissance”

Catherine Kintzler, propos recueillis par Cédric Enjalbert publié le 14 janvier 2021 16 min

Philosophe de terrain, Catherine Kintzler est passionnée de rugby et d’opéra. Mais elle est aussi l’une des grandes voix de la laïcité. L’entendre, alors que le projet de loi contre le séparatisme doit arriver à l’Assemblée nationale en février, permet de raison garder sur un sujet brûlant.

 

Mezetulle, son pseudonyme. À la fois son nom d’éditeur, celui de son site et son avatar sur Twitter. Catherine Kintzler l’a emprunté à Corneille dans Sophonisbe, qu’elle adore. Ce personnage discret, lieutenant du roi de Numidie, joue dans la pièce le rôle d’intermédiaire dans les négociations qui divisent les princes d’Afrique du Nord et les Romains. Un trait d’union entre différents intérêts. Ce lien, Catherine Kintzler en a fait son affaire de philosophe, se demandant comment rendre la vie collective possible sans écraser les singularités. Théoricienne de la laïcité, elle se méfie des chapelles d’idée et d’opinion. Devenue professeure émérite à l’université après avoir longtemps enseigné au lycée, elle continue de prendre part à la vie de la cité en clarifiant les débats quand ils se perdent en arguties. Aux côtés d’Élisabeth Badinter, de Régis Debray, d’Alain Finkielkraut et d’Élisabeth de Fontenay, elle a signé dès 1989 dans Le Nouvel Observateur une lettre ouverte à Lionel Jospin, alors ministre de l’Éducation nationale, qui a fait grand bruit : « Profs, ne capitulons pas ! » Cette intervention défend une conception de la liberté qui ne soit pas « simple tolérance » et de l’école comme institution émancipatrice, où les élèves puissent avoir « le plaisir d’oublier leur communauté d’origine et de penser à autre chose que ce qu’ils sont pour pouvoir penser par eux-mêmes ». 

Sur ce progrès de l’esprit humain, Catherine Kintzler table toujours en lectrice de Condorcet. Convaincue de la force des raisons, elle s’inscrit cependant dans une lignée de penseurs qui, comme Fontenelle, ne nient pas la dimension poétique de la rationalité. Préférant aussi la pensée des mondes possibles à celle des mondes réels, elle nourrit une passion communicative pour l’opéra qui, avec tous les arts de la scène, de la musique, du théâtre et de la danse, offre à l’esprit un monde surnaturel non dépourvu de lois. Son autre passion : le rugby, auquel elle consacre un blog « intello » – La Choule –, démontrant que toute réflexion nécessite un objet sur lequel s’appuyer, ici et maintenant, dans l’immanence de la pensée. La con­tin­gence veut que nous nous soyons entretenus un mercredi, chaleureusement bien qu’à distance, entre la montagne ariégeoise, où Catherine Kintzler passait le confinement, et Paris. Nous étions le 9 décembre et, hasard du calendrier, nous fêtions les 115 ans de la loi laïque de séparation des Églises et de l’État, tandis que le projet de loi « confortant les principes républicains » contre le séparatisme était adopté en Conseil des ministres.

 

Catherine Kintzler en 6 dates
1947
Naît à Paris
1970 Enseigne au lycée
1989 Prend position en faveur de la laïcité dans une tribune du Nouvel Obs
1992 Nommée professeure à l’université Lille-3
2005 Lance un site personnel de réflexion, mezetulle.fr
2013 Faite chevalier de la Légion d’honneur

 

Séparatisme et séparation s’opposent-ils ? 

Catherine Kintzler : La loi de séparation des Églises et de l’État unifie la République. Elle fait de la puissance publique un élément fondateur, qui rend possible la coexistence des libertés en séparant les sphères publique, d’une part, civile et privée, de l’autre. Cette loi laïque s’inscrit dans la continuité de la Révolution française, laquelle a délié nos appartenances, en affrontant une religion hégémonique qui réglait tous les actes de la vie civile. Cette nouvelle association politique ne repose sur aucun lien préexistant. Inversement, quand on parle de séparatisme aujourd’hui, il est plutôt question du retour des appartenances ethniques, religieuses ou culturelles qui entravent la circulation juridique et politique des individus et l’exercice d’un certain nombre de libertés.

“Avec la laïcité, le lien politique ne doit son existence à aucune autre référence qu’à lui-même”
Catherine Kintzler

 

La laïcité est donc un lien fondé sur la suspension de tous les autres liens. Comment expliquer ce paradoxe ? 

L’association politique laïque est un minimalisme, c’est-à-dire que le lien politique ne doit son existence à aucune autre référence que lui-même. C’est un lien qui institue réciproquement le citoyen et l’association politique. Pour le penser, je suis partie d’un texte de John Locke, l’un des grands théoriciens anglais de la tolérance, selon laquelle l’association politique admet toutes les religions et les appartenances, mais ne tolère pas l’athéisme, dans la mesure où il dénie la notion même de lien. Le problème qu’il soulève est fondamental : la cité doit-elle importer un lien transcendant pour se former ? Dans le régime laïc, la suspension du lien social apparaît au contraire comme constitutif du lien politique. C’est une association politique atomiste qui nous invite à suspendre nos appartenances pour nous penser comme citoyens. Une république laïque assure d’abord le « vivre-séparément » individuel pour permettre un « vivre-ensemble » non fusionnel. Dans cette organisation, le citoyen ne s’associe pas une fois pour toutes, il ne cesse de le faire, dans un consentement perpétuel.

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Article issu du magazine n°146 janvier 2021 Lire en ligne
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