Les concepts en campagne
Marketing électoral, récupération idéologique, promesses vides, la présidentielle contribue souvent à brouiller les repères. Sans proposer un projet politique « clés en main », la philosophie – des travaux de Hannah Arendt à ceux de Jacques Rancière ou d’Axel Honneth – offre de mieux comprendre les forces en présence et les mots du pouvoir.
En dehors du ralliement à quelques candidats en lice d’une partie des lointains héritiers de Platon – parfois réduits à quelques essayistes de salon –, qu’ont en commun l’élection présidentielle et la philosophie ? Quoi de plus différent que la patience du concept et la frénésie d’une candidature ? Quoi de plus opposé que la raison théorique et l’empirisme de la pratique politique ? Si une femme ou un homme peut être élu au suffrage universel par la passion, une idée philosophique ne peut être qu’acceptée ou réfutée par la raison. Et la vérité ne se vote pas. Sans même faire nôtre la saillie d’un Jean-Paul Sartre vieillissant, il est vrai que par sa singulière façon de réduire les idées au slogan, le bien public à un visage unique, l’élection présidentielle ressemble parfois à un « piège à cons » que l’auteur de La Nausée a su dénoncer en son temps.
Sans tomber dans le vertige métaphysique qui touche le « désélecteur », peut-être est-il bon de rappeler que la démocratie, ce « scandale politique qui a d’abord été une insulte parce qu’il suppose le gouvernement de n’importe qui », comme l’explique Jacques Rancière, n’est pas intrinsèquement liée à la fameuse « rencontre d’un homme et d’une nation ». Et que la République est un universel avant d’être un plébiscite individuel. Bien sûr, le règne sans partage de la « peopolitique » a bien souvent pris la place de l’analyse critique. « Quand les carrières remplacent les caractères et le people le peuple », écrit Régis Debray, qu’est-il permis d’espérer ? Bien entendu, la pensée critique ne cesse de décrire l’état de dépolitisation dans lequel nous sommes plongés, à force de transformer les problèmes politiques en questions culturelles. Cependant, la classe médiatique n’a toujours pas renoncé à faire des sondages sa pierre philosophale et éditoriale, oubliant les avertissements de Pierre Bourdieu, sociologue formé par la philosophie la plus exigeante, qui expliquait, dès les années 1980, que « l’opinion publique n’existe pas ». Et certainement pas à travers cet exercice de ventriloquie sociale qui fabrique l’opinion plus qu’elle ne l’explique.
Faites-vous primer le désir comme Spinoza, la joie à l'instar de Platon, la liberté sur les pas de Beauvoir, ou la lucidité à l'image de Schopenhauer ? Cet Expresso vous permettra de le déterminer !
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