Aller au contenu principal
Menu du compte de l'utilisateur
    S’abonner Boutique Newsletters Se connecter
Navigation principale
  • Le fil
  • Archives
  • En kiosque
  • Dossiers
  • Philosophes
  • Lexique
  • Citations
  • EXPRESSO
  • Agenda
  • Masterclass
  • Bac philo
 Philosophie magazine : les grands philosophes, la préparation au bac philo, la pensée contemporaine
rechercher
Rechercher

©2020 Netflix, Inc.

Série/Stratégie

Les échecs, un jeu humain, trop humain

Octave Larmagnac-Matheron publié le 03 décembre 2020 3 min

La série Le Jeu de la dame a ravivé l’intérêt pour les échecs. Pourquoi fascinent-ils toujours à l’heure où l’intelligence artificielle bat les plus grands champions ? Réponse avec un philosophe oublié, Amédée Ponceau.

Carton plein pour Le Jeu de la dame, la nouvelle minisérie Netflix qui plonge le spectateur dans l’univers des échecs. L’intrigue – portée par Anya Taylor-Joy qui campe Beth Harmon, une orpheline prodige – n’y est pas pour rien. Mais l’intensité de l’histoire, qui revisite certaines des parties les plus célèbres, suffit-elle à expliquer l’intérêt pour cette série ? N’y a-t-il pas aussi quelque chose comme une fascination inhérente pour les échecs ? Assurément, répondrait Amédée Ponceau (1884-1948), philosophe spiritualiste aujourd’hui tombé dans l’oubli : si nous nous passionnons pour les échecs c’est que ceux-ci sont comme le symbole de l’existence humaine, tiraillée entre spontanéité et mécanisme. 

Pour Ponceau, en effet, pouvoir jouer aux échecs est un signe distinctif de l’homme, comme il l’explique dans Initiation philosophique (1944) : « Un joueur d’échecs ne peut pas être un automate […]. Le joueur non automatique est le perpétuel inventeur d’un ordre stratégique dans lequel prend place chaque coup joué, sans que ce coup à lui seul ne constitue jamais la stratégie totale. Ce sont d’autres coups antérieurs ou bien seulement pensés tout d’abord pour être ultérieurement exécutés, qui lui donnent ou promettent de lui donner l’efficacité. À cette stratégie, l’automate ne peut jamais opposer que des déclenchements spasmodiques, à effets limités. » Par stratégie, nous devons « entendre moins un dispositif fixé d’avance et immuable qu’une action susceptible de s’infléchir à chaque coup dans un sens différent de son action initiale. »

Contrairement à une intelligence artificielle, qui prévoit dès le début de la partie l’ensemble des coups possibles et n’est donc jamais étonnée, le propre d’un joueur humain, c’est de pouvoir être surpris. Le joueur humain est en effet incapable d’envisager tous les cas de figure. Et sa décision, à l’instant T, n’est donc pas nécessairement celle que la machine considérerait comme la meilleure. Avoir une stratégie est, pour Ponceau, la manière par excellence d’agir en tenant compte de cette incertitude, en intégrant l’espace de jeu ouvert par notre propre finitude. Avoir une stratégie, c’est, en ce sens, pouvoir en changer – troquer son répertoire limité de situations envisagées pour un autre. Le joueur humain « s’inspire du spectacle offert à chaque instant par l’échiquier, il passe du spectacle à une façon nouvelle de “penser la partie” […]. De cette structure, il engendre une représentation future, en route vers la solution. Rien de tel, évidemment, chez l’automate. […] Il n’y a pas de monde pour lui » qui ne se réinvente jamais. Sa tactique est toujours déjà envisagée comme possibilité, et son « choix » est toujours nécessaire. 

Au contraire, le joueur humain est « un inventeur de tactiques perpétuellement renouvelées ». Il représente, à ce titre, l’existence humaine tiraillée entre « l’automatisme et la spontanéité ». Et Ponceau d’ajouter que « le corps est comparable à un joueur d’échecs authentique, à celui qui invente, à celui qui s’invente lui-même ». Pour être un bon joueur d’échecs, il faut s’instruire des exemples de stratégies auxquelles d’autres joueurs, avant nous, ont donné réalité – et que notre adversaire est donc capable d’envisager. Beth ne cesse d’ailleurs de rejouer des séquences bien connues des amateurs d’échecs – Rachid Gibiatovich Nejmetdinov contre Genrikh Kasparian à Riga en 1955 ; la célèbre « partie de l’opéra » de 1858 entre Paul Morphy et Charles II de Brunswick, etc. Mais, de cette logique mécaniste, il faut savoir se détacher et tirer le coup inattendu, comme le démontre le final de la série. Pour ne pas divulgâcher, il suffit de dire que Beth réalise une manœuvre rare et audacieuse qui justifie le titre original de la série. Le jeu d’échecs donne ainsi de la vie l’image particulièrement juste d’un « acte fondamental perpétuellement repris ». 

Expresso : les parcours interactifs
Kant et le devoir
Au quotidien, qu’est-ce que ça veut dire d’agir moralement ? Et est-ce que c’est difficile de faire son devoir ? Ces questions ne sont pas anecdotiques pour quelqu’un qui souhaite s’orienter dans l’existence. Et, coup de chance : Emmanuel Kant y a répondu. 
Découvrir Tous les Expresso
Sur le même sujet
Article
3 min
L’intelligence artificielle entre au Collège de France
Cédric Enjalbert 05 février 2016

Le Collège de France ouvre ses portes à l’enseignement de l’intelligence artificielle. Le chercheur Yann LeCun a prononcé sa leçon inaugurale le…

L’intelligence artificielle entre au Collège de France

Article
8 min
Thierry Hoquet : “Notre humanité tient à la manière dont nous appréhendons la différence”
Octave Larmagnac-Matheron 12 mai 2021

Des zombies de Walking Dead à l’intelligence artificielle devenue folle de 2001, l’Odyssée de l’espace en passant par les « Hubot » de…

Thierry Hoquet : “Notre humanité tient à la manière dont nous appréhendons la différence”

Article
5 min
L’intelligence artificielle est-elle “communiste” ? La “doctrine Peter Thiel” à la loupe
Octave Larmagnac-Matheron 03 décembre 2021

« Le crypto est libertarien, l’intelligence artificielle [IA] est communiste » : telle est la philosophie, binaire, à la racine de la…

L’intelligence artificielle est-elle “communiste” ? La “doctrine Peter Thiel” à la loupe

Article
6 min
“Squid Game” : Sodome et tas d’or
Ariane Nicolas 16 octobre 2021

Attention, succès fulgurant. La série Squid Game, diffusée sur Netflix depuis le 17 septembre, est celle qui a connu le meilleur démarrage de…

“Squid Game” : Sodome et tas d’or

Article
4 min
Quand l’intelligence artificielle entre dans nos vies… et dans nos têtes
Charles Perragin 08 février 2024

Quel est le point commun entre un écrivain psychiatre qui soigne les troubles du cerveau à l’hôpital Sainte-Anne, un philosophe qui se confronte à…

Quand l’intelligence artificielle entre dans nos vies… et dans nos têtes

Le fil
1 min
Intelligence humaine-intelligence artificielle : réconciliation impossible ?
La Rédaction 23 février 2024

Quel est le point commun entre un écrivain psychiatre qui soigne les troubles du cerveau à l’hôpital, un philosophe qui se confronte à ChatGPT pour traiter les…

Quand l’intelligence artificielle entre dans nos vies… et dans nos têtes

Article
4 min
“Seinfeld”, une série culte qui n’a peur de rien
Jean-Marie Pottier 09 octobre 2021

La série américaine Seinfeld fait son entrée sur la plateforme Netflix. Une émission devenue culte, alors qu’elle parle ouvertement et…

“Seinfeld”, une série culte qui n’a peur de rien

Article
4 min
Côme de Bellescize : « Le théâtre, école de la complexité »
Cédric Enjalbert 03 septembre 2013

Quel sens donner à l'existence lorsque toute possibilité de communiquer nous est ôtée ? Peut-on préférer la mort à une vie diminuée ? Existe-t-il…

Côme de Bellescize : « Le théâtre, école de la complexité »

Article issu du magazine n°145 décembre 2020 Lire en ligne
À Lire aussi
Laurent Alexandre : “Avec une photo, un ordinateur peut dire si vous êtes homosexuel et évaluer votre QI”
Laurent Alexandre : “Avec une photo, un ordinateur peut dire si vous êtes homosexuel et évaluer votre QI”
Par Alexandre Lacroix
octobre 2017
Suffit-il à un ordinateur de parler pour penser?
Par Samuel Webb
juillet 2014
« Her » : que feront les hommes quand leur intelligence sera dépassée ?
« Her » : que feront les hommes quand leur intelligence sera dépassée ?
Par Alexandre Lacroix
avril 2014
  1. Accueil-Le Fil
  2. Articles
  3. Les échecs, un jeu humain, trop humain
Philosophie magazine n°178 - mars 2024
Philosophie magazine : les grands philosophes, la préparation au bac philo, la pensée contemporaine
Avril 2024 Philosophe magazine 178
Lire en ligne
Philosophie magazine : les grands philosophes, la préparation au bac philo, la pensée contemporaine
Réseaux sociaux
  • Facebook
  • Instagram
  • Instagram bac philo
  • Linkedin
  • Twitter
Liens utiles
  • À propos
  • Contact
  • Éditions
  • Publicité
  • L’agenda
  • Crédits
  • CGU/CGV
  • Mentions légales
  • Confidentialité
  • Questions fréquentes, FAQ
À lire
Bernard Friot : “Devoir attendre 60 ans pour être libre, c’est dramatique”
Fonds marins : un monde océanique menacé par les logiques terrestres ?
“L’enfer, c’est les autres” : la citation de Sartre commentée
Magazine
  • Tous les articles
  • Articles du fil
  • Bac philo
  • Entretiens
  • Dialogues
  • Contributeurs
  • Livres
  • 10 livres pour...
  • Journalistes
  • Votre avis nous intéresse