Matière à penser / décembre 2014 - janvier 2015

Martin Legros publié le 5 min

La personnalité

Martine Rothblatt. Le transfuge idéal

Avec 29,5 millions d’euros par an, elle est la femme d’affaires la mieux payée des États-Unis. Celle qui a grandi au sein d’une famille juive modeste a fait fortune en créant Sirius Satellite Radio, un opérateur de télécommunications par satellite. Mais, surtout, elle n’a pas toujours été femme. Et si elle a ajouté un « e » à son prénom après son opération, en 1994, elle se revendique unisexe. Les hommes ne l’attirent pas. D’ailleurs, elle est restée avec sa femme, une Afro-Américaine de Los Angeles, et ses quatre enfants continuent de l’appeler « papa ». Rothblatt troque M. ou Mme pour Pn. (Personne). Son livre, L’Apartheid des sexes (Ronan Denniel Éditeur, 2006), est un plaidoyer pour l’abolition du genre : « Les organes génitaux définissent aussi peu le rôle d’un individu dans la société que la couleur de la peau. » Celle que The New York Magazine surnomme « The Trans-Everything CEO » (« Le P-DG trans-tout ») est aussi transhumaniste et transpéciste : elle a mis sur pied une ferme de cochons, Revivacor, afin de réaliser des transplantations d’organes d’animaux sur des humains et a fondé, en 2004, le mouvement Terasem, un cercle scientifique et spirituel dont le sanctuaire se situe dans les montagnes du Vermont. Le but de cette fondation est de vaincre la mort, qui n’est que « facultative ». Pour ce faire, Martine veut mettre au point des clones mentaux, des ordinateurs capables d’intégrer la personnalité d’un individu, en enregistrant sa voix notamment. Le premier clone sera celui de son épouse Bina. Selon Martine, le transhumanisme est l’héritier du judaïsme : « Être le peuple du livre signifie que vous croyez dans la possibilité de vous abstraire de la chair pour le domaine des idées. » À force de transcender tout ce qu’elle touche, elle risque de se métamorphoser elle-même en une idée.

Expresso : les parcours interactifs
Comme d'habitude...
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