Peine de sûreté ? Pas sûr !

Yves Michaud publié le 3 min

Présentée à l’opinion comme répressive, la loi Perben II assouplissait en réalité la peine de sûreté pour les criminels, qui peut désormais être réduite. De là à imaginer que la justice cache son jeu…

Parcourant un article sur les émissions de télévision qui reviennent complaisamment sur des affaires criminelles parfois très récentes (comme les émissions glauques de Hondelatte), une phrase m’arrête : leurs révélations nuiraient parfois aux demandes de révision de sûreté des condamnés. Comme tout le monde, je croyais que lorsque les jurés prononcent une condamnation lourde (rarement trente ans, et on va comprendre pourquoi plus bas) assortie d’une période de sûreté de dix ans, quinze ans, dix-huit ans, les condamnés sont effectivement tenus hors circuit pendant la période de sûreté.

Après quelques recherches, je découvre qu’effectivement l’article 720-4 du code de procédure pénale modifié par la loi du 9 mars 2004 – la fameuse loi Perben II sur l’adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité – porte que « lorsque le condamné manifeste des gages sérieux de réadaptation sociale, le tribunal de l’application des peines peut, à titre exceptionnel et dans les conditions prévues par l’article 712-7, décider qu’il soit mis fin à la période de sûreté prévue par l’article 132-23 du code pénal ou que sa durée soit réduite. » Précisons que la loi en question est celle même qui institue ces tribunaux d’application des peines, qui n’existaient pas auparavant (Ces tribunaux complètent les compétences du juge d’application des peines institué par l’ordonnance du 23 décembre 1958 modifiant le code de procédure pénale). L’expression « manifester des gages sérieux » est bizarre. En langage ordinaire, les gages se donnent ou s’apportent. Ici, ils se manifestent. Peut-être est-ce simplement que le législateur écrit comme un pied…

Expresso : les parcours interactifs
Comme d'habitude...
On considère parfois que le temps est un principe corrosif qui abîme les relations amoureuses. Mais selon le philosophe américain Stanley Cavell l'épreuve du quotidien peut être au coeur d'un principe éthique : le perfectionnisme moral, qui permet à chacun de s'améliorer au sein de sa relation amoureuse.
Sur le même sujet
Bac philo
2 min
Nicolas Tenaillon

Si, étymologiquement, la justice et le droit sont très proches (jus, juris, qui donne l’adjectif « juridique »), la justice est aussi une catégorie morale et même, chez les anciens, une vertu. Nous pouvons tous être révoltés…


Article
2 min
Michael Walzer

Reprenant la conception pascalienne des « ordres », Michael Walzer défend une conception pluraliste de la justice. Il distingue dans la société des sphères de justice : politique, économie, famille, éducation, santé……




Article
14 min
Martin Legros

À la suite de faits-divers ayant défrayé la chronique, le gouvernement a initié une loi permettant de faire comparaître les malades mentaux et de maintenir en détention de sûreté des individus présumés dangereux. Une perspective…



Article
4 min
Michel Olivier

Le Bourreau a-t-il un Visage ? Cette question énigmatique soulève l’une des grandes difficultés de la pensée de Levinas : celle des liens entre la justice éthique, dont l’exigence surgit dans ma relation personnelle à Autrui,…


Article
3 min
Octave Larmagnac-Matheron

Le cercle parfait des mathématiciens est-il réel ? A-t-il une existence indépendante des cercles empiriques qui n’en sont que d’imparfaites…

Les objets mathématiques sont-ils réels ?