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Ruben Östlund en septembre 2022. © Hervé Boutet/Divergence

Rencontre

Ruben Östlund : “Tous les films changent le monde !”

Cédric Enjalbert publié le 27 octobre 2022 13 min

Deux fois lauréat de la Palme d’or au Festival de Cannes, le Suédois Ruben Östlund témoigne de film en film de son goût pour les expériences de pensée. Le réalisateur de Sans filtre, actuellement en salles, revient pour nous sur ses inspirations, ses sources philosophiques et sa conception de l’art.

 

« Qu’aurais-je fait à sa place ? » Telle est la question récurrente que nous pose le cinéaste suédois Ruben Östlund, double lauréat de la Palme d’or au Festival de Cannes. Il l’a d’abord reçue en 2017 pour The Square, dans lequel il mettait en cause avec un humour grinçant non seulement le milieu de l’art contemporain mais surtout le délitement des rapports de confiance dans les sociétés individualistes. La confiance et la peur étaient aussi les ressorts de Snow Therapy, en 2015, où Östlund suivait les conséquences d’un incident sur la cohésion d’une famille, se demandant ce que valent nos meilleurs principes en cas de « force majeure » : alors qu’une avalanche semble s’abattre sur la terrasse d’une station de ski, un père de famille se carapate à l’abri, en abandonnant femme et enfants… avant d’émerger d’un simple nuage de poudreuse. Le réalisateur, amateur de paradoxes et d’apories, me confiait lors d’un précédent entretien se considérer « avant tout comme un observateur. Je suis un garçon avec un bout de bois devant une fourmilière, qui fouille. La fourmilière, c’est la société ; mon bout de bois ma caméra. Je ne m’émeus pas plus que l’entomologiste qui observe un lion dévorant un buffle. Je me contente de regarder ».

Ce regard singulier, lucide et amusé, d’un « garçon » espiègle qui s’échine à ébranler nos convictions éthiques lui a valu une seconde Palme d’or cette année pour Sans filtre. Ce long métrage, dont la crudité – et parfois la cruauté – a divisé les spectateurs, ne recule devant aucune outrance, mais souvent avec truculence. Mieux, il bascule avec talent de la satire sociale à la fable philosophique, en trois chapitres : un couple d’influenceurs, Carl et Yaya, se disputent à propos de la valeur de l’argent ; les deux amants se retrouvent cernés par des ultra-riches sur un yacht de luxe conduit par un capitaine marxiste ; un naufrage les projette sur une île, où les rôles sociaux s’inversent. S’amusant à truffer son film de références, Ruben Östlund crée des situations imaginaires ou dystopiques, parfois extrêmes mais jamais simplistes. Il manifeste ainsi son goût pour les expériences de pensée, employées notamment dans les sciences humaines pour tester nos intuitions morales. Lui qui affirme pratiquer « la philosophie et la sociologie comme un hobby » a pour elles une curiosité immense et communicative. Il nous l’a à nouveau démontré lors d’un passage à Paris, peu avant la sortie de son nouveau film.


En anglais, votre film s’intitule Triangle of Sadness. À quoi renvoie ce « triangle de tristesse » ? À la relation triangulaire qu’entretiennent vos personnages ?

Ruben Östlund : Ce triangle désigne d’abord pour l’industrie de la mode la ride qui se forme entre les sourcils, dite aussi du « souci », et que l’on peut « corriger » avec une petite intervention chirurgicale. Ensuite, il y a effectivement une relation triangulaire de désir et de rivalité entre les personnages principaux Yaya, Carl et Abigail. On peut penser aussi que le triangle évoque les trois chapitres qui composent le film – la dispute entre Yaya et Carl au sujet de l’argent, la croisière sur le yacht et le naufrage sur l’île.

 

D’où vous est venue l’idée de cette fable ?

Lorsque j’ai rencontré mon épouse, elle travaillait – et travaille toujours – comme photographe de mode. Je me suis intéressé à cette profession, dont elle me parlait de l’intérieur. Les modèles étaient issus de milieux sociaux très différents. Mais ils avaient un point en commun : la beauté était devenue pour eux une monnaie d’échange. Parce qu’ils avaient gagné à la loterie génétique, qu’ils étaient « beaux », ils pouvaient utiliser cette monnaie d’échange pour grimper dans la société – quelques modèles venaient effectivement de la classe ouvrière. L’idée m’est venue durant le mouvement #metoo, et j’ai pensé qu’il pouvait être intéressant d’amener cet aspect économique dans les discussions sur les rapports entre hommes et femmes, de discuter le rôle de l’homme comme soutien économique et celui de la femme comme valeur d’échange dans le domaine sexuel. Car la valeur d’échange que représente notre apparence est capitale aujourd’hui.

Traduit par Cédric Enjalbert
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Article issu du magazine n°164 octobre 2022 Lire en ligne
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