Sophie Landrin : “L’Inde de Modi a quitté le champ de la démocratie laïque”
Au pouvoir depuis 2014, Narendra Modi a profondément modifié l’État indien. Effondrement démocratique, explosion des inégalités, multiplication des privilèges accordés aux hindous : l’Inde multi-confessionnelle de Gandhi semble bien loin.
À la veille des prochaines élections, la journaliste Sophie Landrin, co-autrice du livre Dans la tête de Narendra Modi (avec Guillaume Delacroix, Actes Sud, 2024), revient sur le parcours d’un serveur de thé devenu Premier ministre ultranationaliste et gourou autoritaire. Entretien.
Quel est le contexte des prochaines élections générales en Inde qui se tiendront au printemps 2024 ?
Sophie Landrin : La campagne a déjà commencé dans la mesure où Modi est en campagne permanente. L’opposition au Parti du Peuple [Bharatiya Janata Party, abrégé en BJP] au pouvoir depuis 2014 n’est pas encore en ordre de bataille. Sous le label « India », une trentaine de partis d’opposition se sont réunis il y a quelques semaines, bien qu’ils en soient encore à négocier la répartition des sièges. En ce qui concerne Rahul Gandhi, le leader du Congrès national indien [historiquement l’un des principaux partis politiques d’Inde], on ne sait pas encore quelle place exactement il aura dans la campagne, ni même s’il serait candidat au poste de Premier ministre. Sa précampagne prend la forme d’une traversée du pays d’est en ouest. Mais la campagne paraît d’emblée biaisée par un facteur : Modi manie magistralement la communication. Il possède une réelle capacité à parler au peuple, à comprendre son public, à s’adresser aux uns et aux autres. Et l’Inde de Modi, c’est un pays qui est écrasé par le culte de la personnalité. Il y a des posters et des affiches de Modi partout. Vous ouvrez le journal, il n’y a que des publicités autour de Modi. Vous ouvrez votre réseau social, il n’y a que lui. Son effigie se retrouve sur les sacs de distribution alimentaire, sur les passeports de vaccination contre le coronavirus… Ce culte de la personnalité illustre un usage du pouvoir très centralisé, très personnalisé. Ce n’est évidemment pas que du narcissisme, c’est une tactique politique. Il a complètement réformé le mode de distribution des aides sociales pour éviter les intermédiaires et la corruption. Pour donner l’impression aux familles que c’est lui directement, et non l’État, qui donne de la nourriture, des bonbonnes de gaz, etc.
Chaque matin, près d’un demi-milliard d’Indiens défèquent en plein air, créant un problème majeur de santé publique. Pour y remédier, le Premier…
La Chine fait peur, c'est un fait. En 2020, plus que jamais – du moins « de par chez nous ». Trop grande, trop secrète, trop puissante,…
Auteurs de La Condition terrestre (Seuil, 2022), les professeurs de philosophie à l’université de Tours Sophie Gosselin et David gé Bartoli…
Modifier la météo en fonction de nos besoins… un projet d’autocrate, un rêve de science-fiction ? Non, une réalité ! La France est d’ores et déjà…
Après les escarmouches du printemps 2020, l’Inde et la Chine rentrent dans une nouvelle étape de leur bras de fer frontalier, avec le déploiement…
La démocratie n’est pas le refus du conflit. Bien au contraire ! Telle est la thèse défendue par la philosophe Sophie Galabru, qui réhabilite…
Conscience critique de la démocratie américaine, dénonçant inlassablement l’impérialisme, la propagande des médias et la collusion du capitalisme et des institutions internationales, le linguiste et philosophe Noam Chomsky propose de…
« Il faudra bien que la Russie se retrouve face à elle-même. » En préfigurant la possibilité qu’un jour, la guerre en Ukraine dans…