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 Philosophie magazine : les grands philosophes, la préparation au bac philo, la pensée contemporaine
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Toni Negri en 2018. © Franck Ferville

Toni Negri : “La lutte des classes n’est pas une promenade de santé”

Toni Negri, propos recueillis par Alexandre Lacroix publié le 04 juillet 2018 18 min

C’est une voix majeure de la pensée politique contemporaine. Les essais qu’il a coécrits avec Michael Hardt ont influencé Occupy Wall Street ou Los Indignados. Dans “Assembly”, leur dernier livre à paraître en français, ils tentent de donner une traduction philosophique à ces mouvements. Pour nous, Toni Negri explique ses grands concepts et revient en toute franchise sur son engagement pendant les “années de plomb”.

Peu de philosophes allient à ce point la pensée et l’action, le travail des concepts et l’immersion dans le militantisme politique. Né en 1933 dans l’Italie fasciste, Toni Negri étudie d’abord la philosophie du droit de Hegel, la phénoménologie ainsi que le personnalisme d’Emmanuel Mounier. Il est, après-guerre, l’un des universitaires les plus précoces de son temps, commençant à enseigner à l’université de Padoue dès l’âge de 25 ans. C’est en 1954-1955, à l’occasion d’un séjour d’un an dans un kibboutz en Israël, que Negri devient communiste. Il s’agit pour lui d’une véritable vocation, mais aussi d’un retour aux origines : son père, décédé en 1936, a été l’un des fondateurs de la cellule du Parti communiste italien (PCI) à Livourne. Dès lors, Toni Negri n’a de cesse de se rendre sur le terrain, dans les manifestations, les occupations d’usine, et de mener une entreprise théorique qui s’appuie sur la relecture de Marx, de Machiavel et de Spinoza. Il est l’une des figures du grand mouvement ouvrier italien qu’on appelle l’opéraïsme, qui naît en 1961, devient une véritable force politique et est sévèrement réprimé après l’assassinat d’Aldo Moro [ancien chef du gouvernement italien enlevé puis tué par les Brigades rouges] en 1978. Au cours de sa vie d’engagements, Toni Negri a passé en tout dix ans en prison et en résidence surveillée. 

Toni Negri en 7 dates

  • 1933 Naissance le 1er août à Padoue, dans l’Italie dirigée par Mussolini 
  • 1936 Mort de son père, fondateur de la cellule du Parti communiste italien de Livourne 
  • 1961 Naissance des Quaderni Rossi, revue à laquelle participe Negri et qui sera à l’origine de l’ouvriérisme ou opéraïsme italien 
  • 1979 Suite à l’enlèvement et à l’assassinat de l’ancien chef du gouvernement italien Aldo Moro, le mouvement ouvriériste est réprimé et Negri incarcéré durant quatre ans sans procès 
  • 1983 Élu député, Negri sort de prison et s’exile en France à la veille de la levée de son immunité parlementaire 
  • 1983 Professeur au Collège international de philosophie fondé par Jacques Derrida et à l’université Paris-7 jusqu’en 1997 
  • 1997 Retour en Italie. Il est incarcéré, puis placé en semi-liberté à partir de 1999

L’année dernière sont parus deux livres de Negri encore indisponibles en français. Assembly, coécrit en anglais avec Michael Hardt, poursuit un cycle de réflexion entamé avec Empire en 2000 et a provoqué de vifs débats aux États-Unis, dans la mesure où cet ouvrage offre une légitimation philosophique au mouvement Occupy Wall Street et à toutes les occupations de places publiques qui ont fleuri sur la planète au cours de la décennie écoulée. Galeria ed Esilio, (« la galère et l’exil »), publié en Italie, revient, lui, sur la période de troubles appelée les « années de plomb », expression à laquelle Negri préfère celle d’« années de cuivre ». Deux livres ambitieux, un essai et une autobiographie, dont cet entretien offre au lectorat français la primeur.

 

Assembly est votre cinquième livre avec Michael Hardt. Comment travaillez-vous ensemble ?

Toni Negri : Nous commençons par des discussions intenses, qui aboutissent à un premier plan. Nous n’enregistrons rien. Nous prenons des notes, de façon artisanale. Et puis, on se partage le « morceau ». Chacun lit, écrit, envoie un bout de texte à l’autre, qui le réécrit, l’étoffe. Nous avons une conversation téléphonique hebdomadaire et nous nous voyons quatre fois par an pour une semaine de travail acharné. Michael est parfaitement bilingue anglais-italien. Je ne parle pas anglais en public – hélas ! – mais suis capable de le lire et de l’écrire. Quand le processus est terminé, il est impossible de distinguer ce qui est de lui ou de moi, il s’agit d’une œuvre construite ensemble. 

 

Pas comme les livres signés par Gilles Deleuze et Félix Guattari, où il semble que l’essentiel ait été écrit par le premier…

Ce n’est pas le cas, selon moi ! Mais en ce qui me concerne, je ne suis plus un universitaire depuis longtemps. Je l’ai été jusque dans les années 1970, puis je suis devenu un activiste. En politique, l’écriture collective est la règle. A fortiori quand on appartient à un mouvement qui refuse la figure du chef !

 

Aux yeux de Hegel, ce sont les individus d’exception, comme Napoléon, qui changent le cours du monde. Sommes-nous sortis de l’époque des grands hommes ? L’horizontalité est-elle en train de l’emporter sur la verticalité, comme le suggère Assembly ?

Attention à ne pas confondre la figure du grand homme, telle que la concevait Hegel, avec la fonction du leadership. Pour Hegel, le grand homme est celui qui a une perception nette du sens de l’Histoire. L’Histoire a un certain mouvement déterminé par un but. Le grand homme est lié à la téléologie [l’étude des fins, du grec telos, « but », et logos, « raison »], ce qui n’a rien à voir avec la verticalité ou l’horizontalité. En revanche, ce qui est à l’origine d’Assembly, c’est le constat de la crise profonde du leadership politique. En France, certains voient en Emmanuel Macron un homme providentiel, mais il n’a pu s’affirmer que suite à la décomposition du PS et des Républicains, deux partis impuissants à se trouver un leader crédible. Aux États-Unis, Donald Trump n’a pas été choisi par le Parti républicain mais a profité d’une crise de la logique bipartisane. Cette crise du leadership, Michael et moi ne la considérons pas comme négative mais comme une possibilité d’explorer de nouvelles formes d’organisation. Regardez les ZAD. Ou les mouvements pour la reconnaissance des Noirs, qui n’ont plus de leader à la Martin Luther King. Ou les luttes féministes, sans tête de proue. Ou Occupy Wall Street. Ou Los Indignados. Des assemblées essaiment partout et transforment les rapports de domination.

 

Ne passez-vous pas vite sous silence le retour de l’autoritarisme, qu’il s’agisse de Vladimir Poutine en Russie, de Recep Tayyip Erdoğan en Turquie, de Narendra Modi en Inde ou de Xi Jinping en Chine ? 

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