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Jérôme Bosch. Le Portement de croix (détail: le moqueur, l'agresseur, le jouisseur et le mauvais larron, huile sur bois, v.1516) © Gianni Dagli-Orti / Aurimages

Dossier / “Il faut qu’on parle !”

Cause toujours : vices et vertus du langage chez les classiques

Aude Marguier publié le 01 juin 2023 10 min

Le langage est à bien des égards un outil pour faire société. Mais il est aussi une source de confusion, d’erreur et de tromperie. Faut-il vraiment se fier à son pouvoir pacificateur ? Les classiques en débattent.

 

Le langage est-il un outil de civilisation ?

Oui, car parler, c’est se lier / John Locke (1632-1704)

Le langage trouve son origine dans la volonté proprement humaine de transmettre nos idées à autrui. Selon l’Anglais John Locke, l’être humain possède une disposition naturelle à parler qui le différencie des animaux. La faculté de produire des sons se joint au besoin social de communiquer nos idées. Comme il l’explique dans le troisième livre de son Essai sur l’entendement humain intitulé « Les mots », le langage est l’outil essentiel dont l’homme dispose pour créer une communauté. Dieu a donné à l’homme « la faculté de parler, pour que ce fût le grand instrument et le lien commun de cette Société ». Le langage a donc pour fonction première de nous lier. Nous sommes à même de nous entendre, voire de résoudre nos conflits, dans la mesure où, sans cet outil, nos idées seraient enfermées et isolées dans nos esprits, sans possibilité de les communiquer. Ainsi, « lorsqu’un homme parle à un autre, c’est afin de pouvoir être entendu ; le but du langage est que ces sons ou marques puissent faire connaître les idées de celui qui parle à ceux qui l’écoutent ». Toutefois, afin que le langage soit le plus efficace possible, Locke rappelle qu’il est nécessaire que les mots soient suffisamment abstraits pour qu’ils puissent désigner « autre chose que les idées particulières des hommes ». Autrement dit, « la multiplication des mots aurait confondu leur usage s’il avait fallu un nom distinct pour désigner chaque chose particulière ». Il y a donc une part d’arbitraire et de généralité dans le sens des mots que nous employons pour nous comprendre, ce qui explique que nous ne sommes jamais à l’abri d’un quiproquo. Mais qui donc fixe ce que les mots signifient et comment bien les employer ? Personne, seul compte l’usage ! « À la vérité, dans toutes les langues, l’usage approprie par un consentement tacite certains sons à certaines idées et limite de telle sorte la signification de ce son, que quiconque ne l’applique pas justement à la même idée parle improprement : à quoi j’ajoute qu’à moins que les mots dont un homme se sert n’excitent dans l’esprit de celui qui l’écoute les mêmes idées qu’il leur fait signifier en parlant, il ne parle pas d’une manière intelligible. » Bref, pour espérer trouver un terrain d’entente, encore faut-il apprendre à parler la « même langue ». 

 

Non, car son usage est ambigu / Thomas Hobbes (1588-1679)

Sans la communication, il n’y aurait ni société, ni contrat, ni paix, ni république. Le langage est donc bien la plus grande création de l’humanité aux yeux de Thomas Hobbes. « La plus noble et la plus profitable de toutes les autres inventions fut la parole », écrit-il dans le Léviathan. Cependant, il avertit : son usage est ambigu, sujet à des malentendus et à des abus, qui compromettent l’échange. Le philosophe en distingue quatre usages, privés et publics. La parole autorise à se souvenir et à enregistrer les choses passées et présentes ; elle permet aussi de partager les connaissances acquises avec les autres ; ensuite, de déclarer nos volontés et nos intentions pour obtenir de l’aide ; enfin, elle peut être utilisée pour le « plaisir ou l’agrément ». Mais Hobbes identifie pour chaque fonction du langage des mésusages qui menacent la possibilité de s’entendre. Premièrement, les individus produisent des abus de langage lorsque le mot qu’ils utilisent n’est pas en adéquation avec la pensée qu’ils voulaient véhiculer : « Quand les hommes enregistrent incorrectement leurs pensées, par des mots dont le sens est variable, mots par lesquels ils enregistrent comme leurs des idées qu’ils n’ont jamais comprises, et ils se trompent. » Deuxièmement, lorsque les mots se font métaphores, « c’est-à-dire dans un sens autre que celui auquel ils étaient destinés, et, par là, induisent les autres en erreur ». Troisièmement, lorsque les individus « déclarent une volonté qui n’est pas la leur ». Et quatrièmement, lorsqu’ils utilisent des mots pour se blesser mutuellement. « Étant donné que la nature a armé les créatures vivantes, certaines avec des dents, d’autres avec des cornes, et d’autres avec des mains, ce n’est qu’un abus de parole de blesser quelqu’un avec la langue, à moins que ce ne soit quelqu’un que nous sommes obligés de gouverner, et alors, ce n’est pas le blesser, mais le corriger et l’amender. » Pour éviter les malentendus, il s’agit donc d’être méfiant et de ne pas prendre le pouvoir pacificateur de la parole pour argent comptant. Il convient aussi de mesurer tout ce qui relève « de la nature, des dispositions et des intérêts de celui qui parle. Telles sont les dénominations des vertus et des vices ; car l’un appelle sagesse ce que l’autre appelle crainte ; l’un nomme cruauté ce que l’autre nomme justice, etc. ». D’où tu parles, camarade ?

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Article issu du dossier "Il faut qu’on parle ! Le langage résout-il les conflits ?" mai 2023 Voir le dossier
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