Circonscrire le moment présent
Se mettre à la hauteur de l’événement, ce n’est pas le regarder de haut mais, au contraire, se laisser traverser par lui.
De façon assez symptomatique, quelques jours après le début du confinement, de nombreux intellectuels ont commencé à nous expliquer à quoi ressemblerait le « monde d’après » la crise du Covid-19. Pour l’un, cette crise marquait la fin de la mondialisation libérale et le retour en force des frontières. Pour un autre, elle réalisait les prophéties des collapsologues et nous enseignait l’urgence d’une vie plus locale, plus sobre et plus verte. D’après un autre encore, elle annonçait la victoire du modèle chinois sur la faiblesse et la désorganisation des démocraties occidentales laminées par une crise économique et sociale latente qui fait le lit des leaders populistes… Ces réactions sont révélatrices de notre propension, quand un imprévu survient, à ne pas vouloir être les dupes de l’histoire, à ne pas accepter de nous laisser emporter, à tenter de damer le pion au destin pour garder un coup d’avance. Ainsi, plutôt que de regarder le présent, nous cherchons à nous évader vers le futur, voire à lui donner les couleurs de l’utopie.
Simultanément, une autre attitude s’est affirmée : certains ont comparé cette épidémie du Covid-19 aux expériences dramatiques du passé. Des articles se sont multipliés pour évoquer la peste noire, la grippe espagnole ou la grippe de Hongkong. D’autres ont établi un parallèle assez contestable avec la Seconde Guerre mondiale. Non seulement le Premier Ministre britannique Boris Johnson semblait se prendre pour Winston Churchill sans en avoir la carrure, mais cette pandémie, imposant le confinement à près de 4 milliards d’êtres humains, était le premier véritable événement mondial depuis 1945 ; elle venait ainsi mettre un terme à la poursuite du confort matériel, effort continûment suivi par l’humanité depuis la Libération, les Trente Glorieuses, à travers l’effondrement du mur de Berlin et la globalisation du modèle capitaliste. Pour la première fois depuis la victoire sur le nazisme donc, nous pouvions éprouver notre vulnérabilité mais aussi la solidité de nos valeurs. Ainsi, la hantise que le passé se répète s’est affirmée avec autant d’éloquence que l’espérance d’un lendemain qui chante.
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