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Cynthia Fleury. © Sébastien Calvet/Réa

Hors-série "Le sommeil"

Cynthia Fleury : "La logique économique parvient à faire du sommeil un véritable marché"

Cynthia Fleury, propos recueillis par Octave Larmagnac-Matheron publié le 07 février 2023 9 min

Oreillers ergonomiques, appli d’analyse... le capitalisme surfe sur nos troubles du sommeil – tout en nous baignant de lumières bleues hyperstimulantes. Alors comment permettre à chacun de respecter son biorythme, forcément singulier, et de l’articuler avec des rituels communs dans cette société de performances ? Accorder moins de place au travail et ne pas oublier le corps : deux pistes à parcourir avec la philosophe Cynthia Fleury.

 

Vivons-nous une crise du sommeil ?

Cynthia Fleury : C’est une question difficile. Une clinique douloureuse du sommeil s’est assurément banalisée. Les gens disent fréquemment qu’ils ne dorment pas bien, qu’ils font des insomnies, etc. Il faut certainement y voir, d’une part, un phénomène d’autorisation, de révélation : on s’autorise à dire les choses intimes que l’on taisait auparavant. On peut y voir le symptôme d’une dégradation, mais également une tendance positive à publiciser les enjeux liés au sommeil et ses troubles. On ne s’en cache pas, on ne s’en sent pas stigmatisé. De plus en plus, d’ailleurs, le sommeil fait des incursions dans les espaces publics, professionnels. Il y a un mouvement de banalisation : faire la sieste, avoir des espaces de repos au travail sont aussi des préoccupations de plus en plus audibles. D’autre part, même si c’est une analyse en partie subjective, biaisée par l’expertise et l’expérience qui sont les miennes, il y a une dégradation de la qualité du sommeil lui-même, liée aux transformations de nos modes de vie contemporains. Les usages qui sont les nôtres, en particulier la diffusion des écrans, produisent une sollicitation constante, qui tient les sujets, y compris très jeune, en état d’hypervigilance. Nos régimes attentionnels et sensoriels sont mobilisés 24 heures sur 24. On peut aussi évoquer l’accélération globale de nos modes de vie, ou encore l’exigence de performance qui tient beaucoup d’entre nous en haleine (et engendre une « société de la fatigue », selon l’expression de Byung-Chul Han). Notre corps physique produit des troubles en réaction à ces perturbations.

 

La transformation de notre condition matérielle et technique – l’éclairage artificiel, notamment – a également un impact ?

Oui, l’éclairage artificiel et le bruit constant, qui ont transformé notre condition matérielle et technique (tout particulièrement dans le cadre urbain), ont changé la donne. Par le passé, les choses s’orchestraient un peu différemment. Les rythmes de la vie étaient cycliques et respectaient davantage certains éléments – l’alternance des saisons, l’obscurité et le silence de la nuit, la clarté et l’animation du jour. La métropolisation délirante a déstructuré ces rythmes indexés sur les mouvements naturels. La ville, la grande ville, est une reconfiguration de l’espace-temps qui dissout le partage entre l’économie du jour et celle de la nuit. Le sommeil – qui était une manière de nous accorder aux rythmes de la nature, d’éprouver notre interdépendance à son égard – est impacté par ces changements. Il n’y a plus de moments collectifs ritualisés, institués en fonction des éléments de notre milieu commun de vie, qui soit dédié au sommeil. La vie contemporaine a bien davantage l’allure d’un grand flux continu dont l’individu doit s’écarter un instant pour dormir – un peu à contrecœur, avec frustration voire culpabilité. Il faut prendre en compte, à cet égard, l’internationalisation croissante de nos modes de vie permise par le numérique : les écrans constituent une connexion permanente avec un monde qui ne dort jamais, sur lequel le soleil ne se couche plus. Bien sûr, il y a toujours eu des gens qui travaillaient la nuit, mais ils constituaient une minorité. Nous assistons à une généralisation de la sollicitation nocturne, par l’activité professionnelle, par le divertissement, etc. Le sommeil, l’un des derniers grands bastions d’un temps collectif un peu harmonisé, un peu ritualisé, s’est étiolé – comme, par exemple, le repas familial.

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Article issu du Hors-série n°N°56 février 2023 Lire en ligne
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