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 Philosophie magazine : les grands philosophes, la préparation au bac philo, la pensée contemporaine
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© Lydia Lys Selimalhigazi pour PM

Biographie

Dans le tourbillon de la vie

Martin Duru publié le 02 juillet 2009 9 min

Préférant les amitiés passionnées au mariage, Lou Andreas-Salomé a été l’égérie de Nietzsche et de Rilke, sans jamais renier son indépendance. Essayiste et romancière, elle a ensuite croisé le chemin de Freud, dont elle est devenue l’une des disciples les plus originales.

Je ne peux conformer ma vie à des modèles, ni ne pourrai jamais constituer un modèle pour qui que ce soit ; mais il est tout à fait certain en revanche que je dirigerai ma vie selon ce que je suis, advienne que pourra. » Extraits d’une lettre que Lou Andreas-Salomé a écrite à 21 ans et qu’elle reproduit dans son autobiographie de 1931, Ma vie, ces mots témoignent d’une quête effrénée de liberté. Femme au destin exceptionnel, elle n’hésite pas à bousculer les conventions de son temps pour servir son épanouissement personnel. Insaisissable, elle se dérobe sans cesse aux représentations et aux hommes qui l’enferment dans des carcans trop étroits. C’est en puisant dans ses expériences et ses rencontres prestigieuses de quoi nourrir son idéal d’indépendance, qui va de pair, chez elle, avec une aspiration à l’infini, que Lou Andreas-Salomé construit son existence et son œuvre de romancière et d’essayiste.

Elle naît sous le nom de Louise von Salomé le 12 février 1861, à Saint-Pétersbourg. Son père, Gustave, dont les ancêtres sont des huguenots français – Salomé est un nom d’origine provençale –, est un noble, haut fonctionnaire et conseiller du tsar Alexandre II. La petite Lolia (Louise en russe) admire ce père autoritaire, jusqu’à développer des fantasmes œdipiens – un jour qu’elle se rend aux bains avec sa mère, elle lui lance : « Oh, chère Mouchka, noie-toi, s’il te plaît ! » Elle est également très proche de ses trois frères aînés, Alexandre, Robert et Eugène. Cependant, Louise est plutôt une enfant solitaire qui converse secrètement avec un compagnon imaginaire, qu’elle nomme Dieu. Ce rapport intime, qui la préserve de la réalité, prend fin lorsqu’un serviteur de la maison de campagne des Salomé lui fait part d’une énigme : il a refusé l’hospitalité à un couple qui a depuis lors disparu sur place. Louise s’étonne, interroge son Dieu, qui refuse de répondre. Puis elle découvre que le couple en question était formé de deux bonshommes de neige ayant fondu… Après cet épisode désenchanteur, l’adolescente recherche son autonomie dans la connaissance et devient, à 17 ans, l’élève d’un pasteur protestant en marge des autorités ecclésiastiques, Hendrik Gillot. Celui-ci l’initie à l’histoire des religions et à la philosophie, lui faisant lire Kant et Spinoza. Ce « guide » paternel – c’est lui qui la rebaptise Lou – joue aussi pour elle le rôle de « séducteur »… jusqu’au moment où il la demande en mariage. Devant cette initiative trop « concrète », le désir érotique larvé de Lou se brise, et elle éconduit Gillot.

 

Trinité intellectuelle avec Nietzsche et Rée

Après avoir reçu en 1880 sa confirmation, étape clé de la vie protestante, elle s’inscrit à la faculté de Zurich. Mais de santé fragile, elle part pour le doux climat de Rome où elle rencontre Malwida von Meysenbug, grande figure du libéralisme culturel de l’Europe du XIXe siècle. Lors d’une soirée organisée par cette dernière, Lou voit arriver un philosophe paniqué qui vient de perdre tout son argent au casino de Monte-Carlo : il s’agit de Paul Rée, auteur de De l’origine des sentiments moraux (1877), à la fois doux et angoissé, méprisant ses idées et sa personne – on dit qu’il ne se sépare jamais d’une fiole de poison au cas où il serait tenté par le suicide… Tombé sous le charme, Rée souhaite épouser Lou, mais celle-ci lui fait part d’un autre projet, plus spirituel : elle désire vivre avec lui afin de bâtir une amitié « éternelle », ne reposant pas sur la « fusion des corps », mais sur un « fonds commun de goûts, qu’ils soient de nature morale, intellectuelle ou pratique ». Rée, troublé, s’en ouvre à son ami Nietzsche et lui propose même de rejoindre cette communauté de valeurs inédite. Alors âgé de 37 ans et vivant dans l’errance, Nietzsche accepte et gagne Rome. Lui et Lou se voient pour la première fois en avril 1882 dans la basilique Saint-Pierre, et l’entrée en matière du penseur est romantique à souhait : « De quelles étoiles sommes-nous tombés pour nous rencontrer ? » Envoûté à son tour par la beauté de Lou, Nietzsche la demande également en mariage, mais elle décline au nom de son aversion pour cette institution et de la « Trinité » intellectuelle qu’elle vise à établir avec Rée et lui. Loin de se décourager, Nietzsche parvient à la voir seule lors d’une escapade dans la région des lacs du nord de l’Italie. Ils gravissent ensemble une colline, le Monte Sacro, et peut-être alors échangent-ils un baiser ; plus tard, Lou entretiendra savamment le mystère sur ce moment, confiant ainsi à Malraux : « Je voudrais tout de même bien me souvenir si je l’ai embrassé ou non, sur ce chemin, vous savez, au-dessus du lac de Côme » (Malraux, Antimémoires). Nietzsche effectue ensuite une seconde demande, toujours sans succès. Dans la foulée, il insiste pour que soit prise une célèbre photographie où on les voit, lui et Rée, tirant une charrette dans laquelle est assise Lou, un fouet à la main. « Tu vas chez des femmes ? N’oublie pas la cravache », lira-t-on, peut-être en écho, dans Ainsi parlait Zarathoustra…

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