Gay, gay, marions-nous

Sven Ortoli publié le 3 min

« Le choix du mariage fait partie des droits fondamentaux de l’individu et, pour cette raison, implique également une dimension égalitaire : des groupes ne sauraient en être exclus sans une raison écrasante. C’est comme le vote ; il n’existe pas de droit constitutionnel à voter, mais il est inconstitutionnel [aux États-Unis, Ndlr] d’empêcher un groupe quelconque d’exercer ce droit ; dans ces conditions, la question devient : qui a le droit au mariage et quelles raisons seraient assez puissantes pour outrepasser ce droit ? […]

L’avenir du mariage ressemble beaucoup, en un sens, à son passé. Des gens vont continuer à s’unir, à former des familles, à avoir des enfants et, parfois, à se séparer. La Constitution américaine exige toutefois que ce que l’État décide de faire dans ce domaine le soit sur une base d’égalité. Le gouvernement ne peut pas exclure un groupe de citoyens des avantages de la société civile ou de la dignité affichée du mariage sans une raison d’intérêt public convaincante. Inclure complètement des couples de même sexe est, dans un sens, une énorme chance, exactement comme le mariage interracial l’a été en son temps, et comme l’a été l’obtention du droit de vote par les femmes et les Afro-Américains. […] Une simple politique d’humanité exige que nous arrêtions de considérer les mariages entre gens du même sexe comme une souillure ou une profanation par rapport au mariage traditionnel, mais, au contraire, que nous comprenions les objectifs de ceux qui demandent le mariage et la ressemblance entre ce qu’ils cherchent et ce que cherchent les hétérosexuels. En réfléchissant dans cette direction, le problème paraît analogue à celui posé en son temps par le métissage : une exclusion que l’on ne saurait tolérer dans une société qui cherche à ce que tous bénéficient d’un égal respect et d’une égale justice. »

Martha Nussbaum, philosophe et professeure de droit, Dissent, été 2009

Expresso : les parcours interactifs
Comment commenter un texte philosophique ?
Une fois qu’on a compris la thèse d’un texte de philo, il n’y a plus rien à faire ? Faux ! Apprenez comment commenter un texte de philosophie avec une méthode imparable, étape après étape. 
Sur le même sujet
Article
3 min
Jean-Marie Pottier

Dans Les Deux Corps du roi. Essai sur la théologie politique au Moyen Âge (1957), Ernst Kantorowicz donne une définition de cette « …

Les deux corps des présidents américains


Entretien
11 min
Friedrich Weißbach

Elle est la grande figure des subaltern studies, cette discipline qui entend redonner la parole à ceux qui sont en bas de l’échelle sociale…

Gayatri Spivak : Kant, raciste mais universel ?

Entretien
12 min
Raphaël Enthoven, Cédric Enjalbert,

Jean-Luc Marion, philosophe catholique, spécialiste de Descartes et de phénoménologie, étend sa réflexion de la chair au vin, en passant par l’art…

Jean-Luc Marion: “Je suis un sceptique instruit”



Bac philo
2 min
Nicolas Tenaillon

Si, étymologiquement, la justice et le droit sont très proches (jus, juris, qui donne l’adjectif « juridique »), la justice est aussi une catégorie morale et même, chez les anciens, une vertu. Nous pouvons tous être révoltés…