Aller au contenu principal
Menu du compte de l'utilisateur
    S’abonner Boutique Newsletters Se connecter
Navigation principale
  • Le fil
  • Archives
  • En kiosque
  • Dossiers
  • Philosophes
  • Lexique
  • Citations
  • EXPRESSO
  • Agenda
  • Masterclass
  • Bac philo
 Philosophie magazine : les grands philosophes, la préparation au bac philo, la pensée contemporaine
rechercher
Rechercher

À gauche, un militaire israélien bloque l’accès à la cour d’une maison palestinienne dans le village d’An Najada, dans le sud de la Cisjordanie, le 16 novembre 2023. À droite, un combattant du Djihad islamique âgé de 19 ans se tient devant un immeuble détruit lors d’un raid israélien dans la ville de Jénine, en Cisjordanie, le 6 novembre 2023. © Pierre Terraz pour PM

Reportage

Israël-Palestine : une guerre sans fin ?

Pierre Terraz publié le 11 janvier 2024 21 min

Depuis l’attaque du Hamas le 7 octobre 2023, l’engrenage de la haine est plus que jamais à l’œuvre au Proche-Orient. En Israël, l’armée et une partie de la société civile soutiennent sans réserve une intervention meurtrière à Gaza. En Cisjordanie, la violence entre Palestiniens et Israéliens est à son plus haut niveau depuis la seconde Intifada. Pour comprendre quelle perception de l’adversaire nourrit chaque camp et voir si des chemins de réconciliation sont encore possibles, notre reporter Pierre Terraz s’est rendu des deux côtés au mois de novembre.

 

« On est venu voir l’état de l’appartement de papa », répète en tremblant Amar, au pied d’un immeuble traversé par une roquette. Ce chauffeur routier de 26 ans appartient à la communauté des Bnei Menashe, tribu juive du nord-est de l’Inde installée en Israël, qui leur fournit des logements sociaux dans des zones à risque, comme ici, à Sdérot. « Avant la guerre, les bombardements arrivaient une fois par mois. Aujourd’hui, c’est tous les jours », déplore celui qui se tient désormais dans le salon dévasté de son enfance.

Il faut se faufiler à travers un réseau de routes barrées et de checkpoints pour atteindre cette localité du sud d’Israël, à un kilomètre de la bande de Gaza. La ville a été déclarée « zone de tir » et interdite d’accès par l’armée israélienne, après que les caméras du monde entier ont pu venir constater les massacres perpétrés par le Hamas, le 7 octobre 2023. Aujourd’hui, l’air y est saturé en soufre. À intervalles réguliers, l’artillerie bombarde le nord du territoire palestinien d’où s’élèvent des champignons de fumée.

Deux mois après le début de la guerre, Sdérot, transformée en avant-poste militaire, baigne encore dans l’horreur. Dans les cages d’escalier d’immeubles probablement choisis au hasard par les terroristes, des traces de sang séché racontent des scènes de fuites. Dans les logements, des relents de nourriture pourrie émanent de réfrigérateurs suintants.

C’est ici, là où tout s’est déclenché, que j’entame mon périple pour comprendre les ressorts de cette guerre dont tout le monde dit qu’elle est pire que l’Ukraine, que l’Irak ou que la Syrie. À l’heure où j’écris, le ministère de la Santé du Hamas palestinien évoque 17 487 morts dans les bombardements israéliens. Israël déplore 1 200 morts (essentiellement civils) lors des attaques du 7 octobre. Deux bilans provisoires qui ne disent presque rien de la réalité des souffrances subies de part et d’autre.

Cette escalade si rapide des pertes humaines pose question : contre qui se bat-on ? Qui mérite de tels accès de violence ? Tandis qu’Israël poursuit sans hésiter sa tâche d’éliminer le terrorisme, accusant le Hamas d’utiliser les civils comme « boucliers humains », ce dernier mène avec une cruelle lenteur des négociations impliquant des dizaines d’innocents captifs, dont la libération pourrait changer la donne.

Dans cet engrenage mortifère, chacun semble avoir franchi un point de non-retour et considérer l’autre comme une incarnation du mal absolu. Sans doute est-ce là le drame du Proche-Orient. Lorsque c’est le mal que l’on voit en face de soi, on ne négocie pas la paix, on ne cherche pas non plus une issue diplomatique. Le seul but visé est l’anéantissement de l’autre camp. S’agit-il, alors, d’une guerre du « bien contre le mal » ? Quelle perception de son adversaire nourrit chaque camp ? Des initiatives pour une résolution pacifique du conflit sont-elles encore envisageables ?

 

Tous derrière Tsahal ?

Quelques kilomètres après la sortie de Sdérot, une station-service moins lugubre fait office de base arrière pour les soldats israéliens. Chaque jour, des centaines de civils y affluent pour soigner, nourrir ou simplement réconforter leurs troupes. Certains y jouent de la musique, d’autres s’improvisent coiffeurs de combattants dans un camion aménagé pour l’occasion. Quelques rabbins mettent à disposition des torahs et des talmuds, distribuant aussi d’énigmatiques prospectus vantant le caractère protecteur des textes sacrés en zone de guerre. Des repas chauds sont servis sous une tente blanche où s’amassent les hommes en treillis, à l’abri d’une pluie diluvienne qui s’abat depuis quelques jours.

Daniela, étudiante infirmière de 25 ans, est venue prêter main-forte. Elle se souvient : « J’étais en vacances en Thaïlande avec ma famille lorsque l’attaque a eu lieu. Nous sommes rentrés en Israël, puis mon frère a été envoyé à Gaza. Cela fait deux semaines que nous n’avons pas de nouvelles. Ils ont un téléphone satellite pour vingt personnes et n’ont droit qu’à dix secondes chacun pour nous parler lorsqu’ils appellent. Seule ma mère a pu l’avoir une fois. Ça me fait du bien d’être ici, j’ai le sentiment d’être utile, et, surtout, ça m’occupe l’esprit. Les universités sont fermées, alors si je ne fais rien, je reste cloîtrée chez moi à regarder les informations en espérant apercevoir mon frère », s’épanche-t-elle, en épluchant une montagne d’oignons qui la fait pleurer. Comme Daniela, nombreux sont les volontaires qui comptent un ou plusieurs membres de leur famille déployés à Gaza. Être présent et soutenir d’autres soldats est une manière pour eux de se rapprocher des leurs par procuration.

David, 53 ans, est le père de quatre enfants, dont deux sont dans l’armée : « Mon premier fils est déjà à l’intérieur de l’enclave. Mon deuxième est là avec moi. Il a 22 ans et ne va pas tarder à entrer à son tour. C’est sa première fois au combat, je suis venu pour l’accompagner avant son grand départ. Il y a un peu de crainte, c’est vrai, mais de la fierté avant tout. Regardez la mobilisation autour de vous, il y a même des non-juifs, j’ai un de mes amis qui arrive de New York dans une semaine pour nous aider. Le moral est très haut pour soutenir nos troupes ! On sait que ce n’est pas facile, il y a déjà eu six morts dans le bataillon de mon aîné, mais je leur fais confiance. Ils savent ce qu’ils ont à faire : attendre que l’aviation passe et progresser avec l’infanterie au sol », répète-t-il machinalement, fusil d’assaut à la main, tandis que son cadet, imperturbable, achève une prière à ses côtés. Quelques minutes plus tard, le jeune homme monte précipitamment dans un pick-up boueux, poursuivi par son père qui tente de lui donner un pull.

“Dans un pays normal, sans toute la pression internationale, on aurait déjà entièrement rasé Gaza”
Un tankiste de l’armée israélienne de 28 ans, basé près de Sdérot

 

Dans ce lieu de chassé-croisé entre les soldats qui vont et reviennent du front, la grande majorité des discours laisse peu de place au doute. Une propagande de guerre bien rodée ? Tour à tour, chacun se dit « fier », « heureux », « déterminé » à défendre l’État hébreu… Presque personne n’avoue avoir peur. Ici, un commandant d’infanterie de 27 ans se targue d’avoir tué « quatre terroristes » depuis le début de la guerre et dit attendre avec impatience d’être renvoyé au front. Là, un tankiste de 28 ans fait les cent pas avec une plaie rouge sur le haut du front, après avoir passé une semaine à combattre dans l’enclave. Il fait partie d’une fratrie de huit garçons, tous militaires, répartis entre le front du nord près du Liban et le sud d’Israël. « Dans un pays normal, sans toute la pression internationale, on aurait déjà entièrement rasé Gaza », s’agace-t-il.

Expresso : les parcours interactifs
Faire l’amour
Que fait-on quand on fait l'amour ? Tentons-nous de posséder une part de l'autre, ou découvrons-nous au contraire son mystère, sa capacité à nous échapper sans cesse, faisant redoubler notre désir ?
Découvrir Tous les Expresso
Sur le même sujet
Article
14 min
Reportage en Ukraine : l’étoffe des héros
Pierre Terraz 05 mai 2022

Comment les Ukrainiens font-ils pour résister ainsi à leur envahisseur ? C’est avec cette question, que nous sommes nombreux à nous poser,…

Reportage en Ukraine : l’étoffe des héros

Article
7 min
Guillaume Barrera : “Vouloir fuir le chaos en ouvrant les vannes du plus grand des chaos, c’est absurde”
Nicolas Gastineau 12 mai 2021

Le 21 avril, une lettre rédigée par un ancien officier de l’Armée de Terre, Jean-Pierre Fabre-Bernadac, et signée par de nombreux officiers à le…

Guillaume Barrera : “Vouloir fuir le chaos en ouvrant les vannes du plus grand des chaos, c’est absurde”

Article
4 min
Bellone, l’autre déesse de la guerre
Nicolas Gastineau 01 mars 2022

Toute cette semaine, notre « livre du jour » est consacré à un ouvrage de référence sur la guerre. Après Achever Clausewitz de René Girard, nous…

Bellone, l’autre déesse de la guerre

Article
4 min
Alexis Philonenko, ou la raison à l’épreuve de la guerre
Nicolas Tenaillon 02 mars 2022

Après René Girard et Roger Caillois, notre « livre du jour » consacré à la guerre est l’œuvre d’Alexis Philonenko (1932-2018). Dans…

Alexis Philonenko, ou la raison à l’épreuve de la guerre

Article
11 min
Alain Finkielkraut, Elias Sanbar. Se reconnaître pour exister
Élisabeth Lévy 28 septembre 2012

Le philosophe Alain Finkielkraut et l’intellectuel Elias Sanbar, délégué de la Palestine à l’Unesco, sont proches du camp de la paix, favorables à…

Alain Finkielkraut, Elias Sanbar. Se reconnaître pour exister

Article
3 min
Alexis Keller : « Pour savoir jusqu’où l’autre peut aller, il faut savoir jusqu’où son identité lui permet d’aller »
Martin Legros 28 septembre 2012

Alexis Keller est l’un des seuls négociateurs, qui plus est philosophe, qui peut se targuer d’avoir abouti à un accord de paix détaillé entre Israéliens et Palestiniens. Signé en Jordanie, le 12 octobre 2003, l’Accord de Genève est un…


Le fil
10 min
Israël-Palestine : histoire de la guerre des souterrains
Octave Larmagnac-Matheron 02 novembre 2023

La guerre lancée par Israël contre le Hamas après les attentats du 7 octobre ne se déroule pas seulement en surface : elle a également lieu sous…

Israël-Palestine : histoire de la guerre des souterrains

Article
4 min
11 novembre : la Grande Guerre vue par Alain
Arthur Hannoun 11 novembre 2021

Le philosophe Alain s’est engagé en 1914 dans ce qui deviendra la « Grande Guerre », avant d’être réformé en 1917. Profondément marqué…

11 novembre : la Grande Guerre vue par Alain

Article issu du magazine n°176 janvier 2024 Lire en ligne
À Lire aussi
Pierre Charbonnier : “La démocratie capitaliste verte n’est pas l’horizon ultime de l’histoire”
Pierre Charbonnier : “La démocratie capitaliste verte n’est pas l’horizon ultime de l’histoire”
Par Pierre Charbonnier
janvier 2021
Peut-on encore gagner une guerre ?
Peut-on encore gagner une guerre ?
Par Cédric Enjalbert
mars 2022
“Les pratiques artistiques transforment-elles le monde ?” Découvrez le corrigé !
Corrigés du bac philo – filière générale : “Vouloir la paix, est-ce vouloir la justice ?”
Par Mathias Roux
juin 2023
  1. Accueil-Le Fil
  2. Articles
  3. Israël-Palestine : une guerre sans fin ?
Philosophie magazine n°178 - mars 2024
Philosophie magazine : les grands philosophes, la préparation au bac philo, la pensée contemporaine
Avril 2024 Philosophe magazine 178
Lire en ligne
Philosophie magazine : les grands philosophes, la préparation au bac philo, la pensée contemporaine
Réseaux sociaux
  • Facebook
  • Instagram
  • Instagram bac philo
  • Linkedin
  • Twitter
Liens utiles
  • À propos
  • Contact
  • Éditions
  • Publicité
  • L’agenda
  • Crédits
  • CGU/CGV
  • Mentions légales
  • Confidentialité
  • Questions fréquentes, FAQ
À lire
Bernard Friot : “Devoir attendre 60 ans pour être libre, c’est dramatique”
Fonds marins : un monde océanique menacé par les logiques terrestres ?
“L’enfer, c’est les autres” : la citation de Sartre commentée
Magazine
  • Tous les articles
  • Articles du fil
  • Bac philo
  • Entretiens
  • Dialogues
  • Contributeurs
  • Livres
  • 10 livres pour...
  • Journalistes
  • Votre avis nous intéresse