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Israël, le 8 octobre 2023. Des soldats israéliens après l’attaque meurtrière contre un poste de police dans la ville de Sderot. © Ilia Yefimovich/DPA via Zuma Press/Réa

Israël : un piège fatal ?

Martin Legros publié le 10 octobre 2023 4 min

« Trois jours après l’attaque monstrueuse du Hamas sur Israël qui a coûté la vie à des centaines de civils et alors que la riposte de l’État hébreu se met en place, au prix de bombardements incessants et du siège “total” de la bande de Gaza, la question demeure de la nature et de l’objectif stratégique d’une telle attaque, au-delà de la terreur. Le Hamas n’a-t-il pas tendu un piège funeste et délibéré à Israël ?

Du fait de l’ampleur, de la surprise et de la nature des cibles, de nombreux esprits ont comparé l’attaque contre Israël lancée samedi matin à l’attaque du 11 septembre 2001 contre les tours jumelles de New York, aussi bien qu’à l’attaque contre le Bataclan à Paris en novembre 2015. On a ainsi parlé d’un 11-Septembre israélien. Mais la comparaison mérite peut-être également d’être élargie, au-delà de la forme de l’agression, à ses objectifs. Remontons donc un instant le temps de la réflexion.

Au lendemain du 11 septembre 2001 et de l’entrée en guerre des États-Unis contre l’Afghanistan du régime taliban, le philosophe Claude Lefort (1924-2010), grand lecteur de Machiavel et auteur des Essais sur le politique, invitait à interroger l’objectif politique d’Oussama Ben Laden et de son organisation – par-delà la volonté de détruire des vies, de semer la terreur et de combattre les libertés démocratiques au nom de la pureté fanatique. “Une organisation comme Al-Qaïda, affirmait-il, n’a pas pu ne pas prévoir qu’il y aurait une violente réaction de la part des États-Unis. Si nous ne le pensons pas, c’est que nous les prenons pour des imbéciles. Il y a certainement des militants qui sont prêts à se suicider en grand nombre. Mais une organisation qui se suicide, cela n’existe pas. Ils s’attendaient à ce qui s’est passé [entendre la riposte américaine en Afghanistan]. Ils ont commis les attentats en espérant attirer les États-Unis dans un piège, en les forçant à s’impliquer militairement dans la région. Et en espérant entraîner la majorité de la population musulmane, qui n’avait aucun scénario de guerre, dans ce conflit.” Et pour qu’il n’y ait pas de confusion avec ceux, à l’extrême gauche, qui considéraient déjà à l’époque qu’“on ne répond pas à la violence par la violence”, Lefort précisait : “On leur a tendu un piège, mais c’est un piège dans lequel il était impossible de ne pas tomber. Il est évident qu’il n’y a pas d’autre réponse que la violence militaire. Même si toute la question est de savoir si c’est suffisant, comment la conduire et jusqu’où ?” (in : “Ben Laden et les siens marqueront le processus de mondialisation”, El País, 9 décembre 2001)

Il me semble que cette interrogation mérite d’être relancée aujourd’hui, à l’épreuve de l’attaque du Hamas. Menée depuis la mer, les airs et la terre sur différents terrains, avec de très nombreuses cibles, elle a très certainement exigé une préparation militaire de longue durée – le Wall Street Journal, citant de hauts responsable du Hamas et du Hezbollah, évoquait la possibilité que des officiers des gardiens de la révolution iraniens aient contribué à la planification de l’opération lors de réunions à Beyrouth, au Liban, dès le mois d’août dernier. Et le feu vert définitif de l’Iran aurait été donné la semaine dernière, le 2 octobre – une information démentie par le régime iranien et non corroborée par les services américains. Comme pour le 11-Septembre et le Bataclan, le modus operandi de cette attaque confond complètement action de guerre (troupes aguerries et organisées déployées sur de multiples terrains et usant d’armes différentes) et terrorisme (massacre de civils, pénétration dans les villages et les foyers, massacre et kidnapping d’enfants, de femmes et de vieillards). Une intrication de la guerre et du terrorisme qui peut également être vue comme une signature iranienne, tant le régime fait fi depuis longtemps de la distinction des registres. Et qui corrobore la thèse d’un dessein politique régional, celui de faire échouer les accords de normalisation d’Israël, en rendant cette normalisation impossible au yeux d’une opinion publique musulmane chauffée à blanc.

Il ne faut toutefois pas seulement interroger la forme, mais aussi la finalité politique d’une telle opération. Car manifestement, pour le Hamas, il ne s’agissait pas seulement de faire le plus de victimes possibles. En ramenant des otages à Gaza, l’organisation semble avoir anticipé la réaction d’ampleur d’Israël. Qui prend aujourd’hui la forme d’un siège “total”, et demain, probablement celle d’une occupation de la bande de Gaza destinée à détruire définitivement le Hamas. Or comme le soulignait Claude Lefort, si des militants peuvent se suicider pour une cause, une organisation ne se suicide pas de manière délibérée. L’attaque était donc destinée à attirer Israël dans un piège, un piège impossible à éviter, celui d’une guerre de rue contre une structure militarisée fondue dans son peuple. Toute la question est dorénavant de savoir si Israël sera capable – en se donnant des objectifs définis et limités – de faire en sorte que ce piège ne soit pas ravageur. On l’a vu, Lefort exprimait le problème ainsi : si dans certaines circonstances, il n’y a pas d’autre réponse que la violence, alors la question est de savoir “si elle suffit, comment la conduire et jusqu’où”. Et cela, il ne faudrait pas que le Hamas puisse le décider à la place d’Israël. Car le piège serait alors accompli. »

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