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Capture d’écran d’“Icon of French Cinema”, mini-série télévisée franco-germano-américaine écrite et réalisée par Judith Godrèche.

La plus punk de tes copines

Victorine de Oliveira publié le 28 février 2024 4 min

« “Il faut se méfier des petites filles. Elles touchent le fond de la piscine, elles se cognent, elles se blessent mais elles rebondissent. Les petites filles sont des punks qui reviennent déguisées en hamster”, a conclu l’actrice et réalisatrice Judith Godrèche vendredi dernier devant le parterre de ce que l’on ne peut plus appeler qu’avec ironie “la grande famille du cinéma”, lors de la cérémonie de remise des César. Elle venait de prendre à nouveau la parole pour dénoncer le silence, la complicité, les pudeurs de gazelle de tout un milieu face à des hommes prédateurs et abuseurs, sous leurs apparences de créateurs. Face à ce monde faussement policé, elle a dû ruser. Quand on l’imagine avoir envie de hurler et de casser des trucs autour d’elle, elle ne lève jamais le ton. Elle s’impose au contraire dans la douceur. Contre un agresseur qui se réclamait de la “transgression” pour justifier son désir de pouvoir, elle fait effraction avec un visage d’ange pour mieux rêver de révolution. La leçon paradoxale du punk ?

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Depuis le 18 décembre dernier sur France Inter, elle ne cesse de faire effraction, mais toujours avec le sourire plein de larmes de celle qui n’a pas encore tout dit. Elle ne voulait pas le prononcer, se concentrer sur la promotion de sa nouvelle série Icon of French Cinema (Arte), mais c’est impossible à retenir et ça sort quasiment tout seul – “Voilà j’ai dit son nom”, s’excuse-t-elle presque. D’intervention médiatique en intervention médiatique, on assiste en direct à la déprise progressive de celle qui a subi les chaînes et leurs cicatrices trop longtemps. Dans ces cas-là, le langage compte, il faut imposer sa grammaire et sa narration, quand on a trop vécu dans ceux de l’autre.

Dans Icon of French Cinema, on passe parfois par l’anglais pour dire certaines choses, comme si la langue avait besoin de détours pour toucher au but, pour toucher juste. C’est souvent drôle, gentiment moqueur pour ce personnage d’actrice de retour à Paris après plusieurs années passées à “L.A.”, encore à la ramasse même avec sa langue maternelle. Dans la série, l’emprise et la relation toxique d’une jeune fille de 14 ans avec un réalisateur beaucoup plus âgé qu’elle est montrée, jamais nommée comme telle. Lorsque Godrèche s’exprime dans les médias, en revanche, ses mots ne s’embarrassent plus de gants.

“Ça m’a rendue malade. […] J’ai vomi”, confesse-t-elle sur le plateau de Quotidien début janvier au sujet du documentaire du psychanalyste Gérard Miller, accusé à son tour d’agression sexuelle et de viol depuis. “C’est la jouissance du monstre, j’ai le sentiment de voir un monstre, il a le visage du monstre”, poursuit-elle. À nouveau sur France Inter un mois plus tard, après avoir déposé une plainte à la Brigade de protection des mineurs contre Benoît Jacquot, elle évoque le désir de “repeindre la chambre en rose”, soit l’envie de refouler, de maquiller, d’habiller la laideur de jolies couleurs – et c’est vrai qu’Icon of French Cinema baigne dans le rose poudre et les cols Claudine qu’on devine discrètement ironiques. Ce même rose qui serait la couleur des petites filles sages, ou du moins qui tiennent bien leur rôle.

Bizarre que Judith Godrèche associe couettes et pyjamas parties avec les épingles à nourrice, les guitares saturées, et les dents pas toujours bien alignées ? Pas tellement. Une petite fille a même largement contribué au mouvement punk : Fifi Brindacier. Dans FéminiSpunk. Le monde est notre terrain de jeu (Zones, 2021), Christine Aventin s’appuie sur ce personnage de fiction pour enfants créé par la Suédoise Astrid Lindgren, afin de définir une forme de punk féministe, le “spunk”. Fifi Brindacier vit dans un squat sans adultes, s’est fabriqué sa robe elle-même et invente son propre langage. Quand un policier évoque la possibilité de la placer en institution, elle réplique : “Vous allez devoir trouver ailleurs des enfants à placer dans cette substitution”, pratiquant justement l’art de l’escamotage poétique propre aux enfants. Surtout, elle invente le spunk, mot qu’elle décrète avoir “trouvé” (et tristement traduit par “warou” en français, édulcorant totalement sa découverte).

Ainsi, c’est d’abord par la réappropriation du langage que la petite fille fait ses armes en insoumission et en insolence. “La langue – inventer les mots qui nous manquent, détourner les mots qui nous marquent – est un outil insurrectionnel. Use language as a weapon. Il suffit de voir ce que ça crée comme puissance, la métamorphose vocale d’une girl en grrrl”, remarque Christine Aventin. Ajoutez-y la “puissance de la douceur”, pour reprendre le titre d’un essai de la psychanalyste Anne Dufourmantelle paru en 2013, et cela donne un cocktail détonnant. La douceur n’y avait rien de mièvre ou de mou, elle y était au contraire défendue comme “une force de transformation secrète prodiguant la vie, reliée à ce que les Anciens appelaient puissance”. Cette “forme d’intelligence” est de celle qui peut guider paradoxalement un glaive : “Les êtres qui en font preuve sont parfois des résistants mais ils ne portent pas le combat là où il a lieu habituellement”, remarquait Anne Dufourmantelle. Parfois même, du fond de la piscine où ils se sont crus noyés, ils reviennent armés de leur plus beau déguisement. Ça les fait parfois dandiner, mais certainement pas chavirer. »

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