L’agriculture urbaine est-elle une utopie ?
Une étude récente s’efforce d’estimer l’impact carbone de l’agriculture urbaine. Les résultats sont nuancés : si les exploitations en ville sont généralement plus émettrices que l’agriculture conventionnelle, elles sont dans certains cas moins polluantes. S’il ne s’agit pas d’une solution miracle, l’agriculture urbaine n’est pas pour autant une élucubration de quelques écologistes hors sol : c’est en fait une très vieille idée !
Sous ses airs de fantasme moderne pour bobos déracinés, l’agriculture urbaine est en réalité une pratique très ancienne. Elle se retrouve dans toutes les sociétés à travers l’histoire. C’est bien plutôt le strict partage entre le monde urbain et le monde agricole qui est une invention moderne. Comme le note le géographe Gilles Fumey, coauteur avec le philosophe Thierry Paquot de Villes voraces et villes frugales (CNRS Éditions, 2020), l’agriculture urbaine qui se développe aujourd’hui n’est « pas tant quelque chose de nouveau qu’un retour vers une situation qui a déjà existé » : « Au Moyen Âge occidental, les villes étaient de gigantesques fermes urbaines où les animaux étaient associés à la vie des populations – pour le meilleur et le pire de l’hygiène. Le déplacement massif des ressources alimentaires des villes vers les campagnes a commencé en Angleterre avec les enclosures et l’abandon des assolements aux Pays-Bas. » En 1800 encore, « Paris intramuros […] était autosuffisant alimentairement. » Comme l’écrivent Luc Menapace et Sébastien Goelzer dans leur article « Maraîchage et agriculture urbaine. Comment approvisionner Paris ? » (2019), « la toponymie parisienne en a gardé des traces comme la rue des Maraîchers dans l’est parisien ».
La révolution industrielle et la rupture métabolique
La capitale hexagonale, il est vrai, compte alors un demi million d’habitants. La situation évolue avec la révolution industrielle : en quelques décennies, l’essor démographique et l’exode rural changent la donne. Il faut nourrir, en ville, une population beaucoup plus nombreuse, qui atteint trois millions d’habitants autour de 1900, alors que la surface disponible pour l’agriculture diminue grandement. Pourtant, l’agriculture urbaine continue un temps son développement. Elle atteint son apogée autour de 1830-40. Les terres agricoles représentent alors près de 800 hectares, soit plus d’un cinquième de la superficie de la ville. Signe de ce dynamisme, la parution, en 1845, du Manuel pratique de la culture maraîchère de Paris de J.-G. Moreau et J.-J. Daverne. En 1900, 80% des produits vendus aux Halles sont encore des productions locales – issues, en particulier, de la petite ceinture qui se développe à la même époque. Cette production sur de petites parcelles cultivées de manière intensive est alimentée par l’utilisation des excreta urbains, « véritables mines d’or pour la fabrication de compost et autres engrais biologiques », comme l’explique le chercheur Baptiste Monsaingeon dans Homo detritus (2017).
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