Le risque (ou la raison comme calcul)
« Chasser la fortune de nos vies », ce fut, comme le rappelle le penseur allemand Hans Magnus Enzensberger dans Fortune et Calcul (Jacqueline Chambon, 2010), la grande ambition de la modernité. En lieu et place des figures de la Tyché des Grecs, de la Fortuna des Romains ou de la volonté cachée du Dieu chrétien, dont il fallait solliciter la bienveillance par une série de techniques surnaturelles, les modernes entendent s’assurer grâce à la science de la maîtrise rationnelle de l’existence. Le levier de ce nouvel usage, scientifique et technique, de la raison fut le calcul.
Initialement, et ce n’est pas anodin, le mot avait une signification religieuse, souligne Enzensberger : calculus (« caillou » en latin) désignait les petites pierres noires et blanches qui servaient d’oracles, de talismans ou de souvenirs d’événements heureux ou malheureux. Et puis, au XVIIe siècle, sous le coup de la révolution scientifique, ce terme en vient à désigner l’ensemble des opérations mathématiques par le biais desquels nous maîtrisons la nature. « La raison n’est que le calcul », affirmait ainsi le philosophe Thomas Hobbes en ouverture du Léviathan. Enfin débarrassés des finalités morales et religieuses qui encombraient la cosmologie ancienne, voilà que nous pouvons nous concentrer sur l’essentiel – les additions et les soustractions – et gagner en conséquence une véritable prise sur le monde. Hobbes pousse très loin l’association qui s’est alors opérée entre la raison et le calcul : « Si l’addition et la soustraction ont leur place dans quelque domaine que ce soit, la raison y a aussi sa place. Et là où elles n’ont pas leur place, la raison n’a rien à faire. »
Considérée comme propre à l’homme, celui-ci étant qualifié par Aristote d’« animal rationnel », la raison (du latin ratio : calcul) peut se définir comme la faculté de juger du vrai et du faux, de discerner le bien du mal…
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