Aller au contenu principal
Menu du compte de l'utilisateur
    S’abonner Boutique Newsletters Se connecter
Navigation principale
  • Le fil
  • Archives
  • En kiosque
  • Dossiers
  • Philosophes
  • Lexique
  • Citations
  • EXPRESSO
  • Agenda
  • Masterclass
  • Bac philo
 Philosophie magazine : les grands philosophes, la préparation au bac philo, la pensée contemporaine
rechercher
Rechercher

© Frédéric Poletti pour PM

Ce qui va changer… dans la Cité

Marcel Gauchet: “Unis, mais pour combien de temps?”

Martin Duru publié le 02 décembre 2015 13 min

Face à une forme de terrorisme qui vise désormais la société dans son ensemble, c’est le sens même du contrat démocratique qui est en jeu, constate le philosophe Marcel Gauchet. Contre une riposte purement sécuritaire, il attire l’attention sur la quête de fraternité qui travaille nos concitoyens et en appelle à une refonte en profondeur de la laïcité.

Comment avez-vous vécu les événements du 13 novembre ?

Marcel Gauchet : Comme tout le monde, à ceci près que j’habite le quartier. Cela ajoute à la stupeur et à l’effroi. On est encore plus incrédule et horrifié quand on découvre que les cibles étaient des lieux qui vous sont familiers et qui, dans leur innocente banalité, ne paraissaient vraiment pas faits pour susciter quelque vindicte que ce soit.

 

Depuis, la vie a-t-elle repris ?

Oui, mais le quartier est traumatisé. Devant chacun des lieux attaqués, il y a des fleurs, des bougies mais aussi des dazibaos en très grand nombre. Les gens s’arrêtent, se recueillent et inscrivent des messages de solidarité un peu partout. Il y a une ambiance de choc, de saisissement.

 

Au lendemain des attentats de janvier contre Charlie Hebdo et l’Hyper Cacher, l’humeur était différente…

Charlie est un journal controversé. Les attentats avaient été précédés par toute une campagne contre la publication des caricatures de Mahomet, avec des menaces qui laissaient craindre le pire. Et la violence antisémite est une passion triste malheureusement récurrente. Cette fois, c’est totalement inattendu. On peut ne pas aimer le rock, mais ce n’est pas un objet de discorde ou de haine.

 

Un seuil a-t-il été franchi dans la violence terroriste, dans sa nature et son déploiement ?

Parler de franchissement d’un seuil, ce serait présupposer le schéma d’une seule et même organisation qui aurait progressé dans l’escalade des moyens qu’elle utilise. Or, je crois que nous avons affaire à des criminels assez différents de ceux de janvier. Il y a une mutation du terrorisme fondamentaliste dans sa dimension djihadiste. Pour comprendre cette mutation, il ne faut pas en rester au seul contexte français et revenir à l’événement inaugural qu’a été le 11-Septembre aux États-Unis. Avec le 11-Septembre perpétré par Al-Qaida, c’était bien une guerre contre l’Occident en tant que tel qui avait été déclarée. Mais cette guerre se déclinait dans des attentats qui avaient une visée politique et symbolique précise – les tours du World Trade Center, le Pentagone, soit le cœur de l’« Empire » américain. D’une certaine façon, les événements de janvier se rattachaient encore à ce modèle : les frères Kouachi, qui se réclamaient d’Al-Qaida, ont mis à exécution une condamnation contre un journal, symbole de la liberté d’expression à la française, qui aurait « blasphémé » au sujet du Prophète ; Amedy Coulibaly, lui, s’en était pris à une communauté dont les membres sont, selon le délire antisémite habituel, des agents du sionisme international. On était dans le cadre d’un raisonnement politique qui s’en prend à ceux qui sont censés avoir ou représenter un pouvoir.

« On ne vise plus des cibles politiques ou symboliques. Nous sommes entrés dans l’ère du terrorisme de proximité »

Les attentats du 13 novembre correspondent à une tout autre logique : on ne vise plus des cibles politiques ou symboliques, on sème la terreur dans des lieux apolitiques – un stade de foot, une salle de concert, des bistrots. Nous sommes entrés dans l’ère d’un nouveau terrorisme, plus dangereux encore, le terrorisme de proximité. N’importe quel lieu peut faire l’objet d’une attaque ; le déclin du terrorisme « politique » ouvre le champ des menaces et des victimes. C’est terrible à dire, mais avec 130 morts, on s’en tire a minima. Cette désymbolisation du terrorisme fait que la société même devient une proie. On entre dans le cadre d’une « guerre sociale » dont le message est atrocement clair : « Vous êtes nos ennemis en tant que vous êtes ce que vous êtes. » La terreur qui nous saisit devant ce nouveau visage du terrorisme ne doit pas faire oublier qu’il y a un deuxième objectif : mobiliser une frange de la population musulmane contre le mode de vie occidental, jugé décadent et impie. Bien que minoritaire, cette frange peut, selon les terroristes, l’emporter précisément parce que les membres des sociétés occidentales seraient faibles et craintifs, en un mot qui dit tout pour eux, efféminés. S’il fallait résumer la mutation en cours, je dirais donc ceci : Ben Laden et ses émules incarnaient le stade « léniniste » du terrorisme islamique ; ils faisaient de la grande politique. Là, on veut rester au plus près du terrain et allumer le brasier de la guerre civile, levier d’une prise du pouvoir non seulement en Occident, mais sur l’Occident.

Expresso : les parcours interactifs
Joie d’aimer, joie de vivre
À quoi bon l'amour, quand la bonne santé, la réussite professionnelle, et les plaisirs solitaires suffiraient à nous offrir une vie somme toute pas trop nulle ? Depuis le temps que nous foulons cette Terre, ne devrions nous pas mettre nos tendres inclinations au placard ?
Pas si vite nous dit Spinoza, dans cet éloge à la fois vibrant, joyeux et raisonné de l'amour en général.
Découvrir Tous les Expresso
Sur le même sujet
Article
9 min
Marcel Gauchet: “Entre Rousseau et nous, il y a Darwin”
Martin Duru 21 mai 2014

L’“Émile” a révolutionné notre conception de l’éducation en faisant de l’autonomie de l’enfant la fin et le ressort de tout apprentissage. Mais il aura fallu plus de deux siècles et des moyens opposés à ceux qu’envisageait Rousseau pour…


Article
4 min
Marcel Gauchet : “Culturellement, le monde arabe s’occidentalise, lui aussi”
Charles Perragin 23 décembre 2020

Alors que le discours médiatique alimente une conception d’un monde arabe très conservateur, le sondage d’opinion Arab Barometer 2019 montre que…

Marcel Gauchet : “Culturellement, le monde arabe s’occidentalise, lui aussi”

Article
8 min
Marcel Gauchet : “C’est un réveil du politique”
Martin Legros 17 mars 2020

Lors de son allocution du 16 mars 2020, Emmanuel Macron soutient que la France est entrée “en guerre” contre le Covid-19. Dans un entretien…

Marcel Gauchet : “C’est un réveil du politique”

Entretien
11 min
Marcel Gauchet: “Le politique permet à la société de tenir ensemble”
Nicolas Truong 21 février 2007

Marcel Gauchet écrit la généalogie de notre condition moderne, de l’histoire politique des religions à la naissance de la psychiatrie, en passant…

Marcel Gauchet: “Unis, mais pour combien de temps?”

Article
11 min
Rémi Brague, Marcel Gauchet.
Michel Eltchaninoff 25 mai 2016

Réserve de questions éthiques, la philosophie peut-elle prendre le relais des croyances religieuses ? La question fait figure d’hérésie pour Rémi Brague. Pas si simple, lui répond Marcel Gauchet.


Article
2 min
Alain Badiou, Marcel Gauchet: ils rejouent le match à la télé
19 octobre 2014

Alain Badiou face à Marcel Gauchet: les deux intellectuels ont rejoué le vendredi 17 octobre 2014 dans l'émission de Frédéric Taddeï, “Ce soir (ou…

Alain Badiou, Marcel Gauchet: ils rejouent le match à la télé

Article
3 min
Catherine Kintzler : “Ne pas sacrifier la laïcité sur l’autel du terrorisme”
Martin Legros 02 décembre 2015

À l’opposé de Marcel Gauchet qui propose de resserrer les liens entre l’État et les cultes afin de contrôler les dérives de l’islam, la philosophe…

Catherine Kintzler : “Ne pas sacrifier la laïcité sur l’autel du terrorisme”

Dialogue
17 min
Marcel Gauchet, Jean-Luc Mélenchon. Robespierre, le retour ?
Raphaëlle Serero 24 octobre 2018

Pour beaucoup, Robespierre est un monstre froid et sanguinaire. Pourquoi donc Marcel Gauchet lui a-t-il consacré son dernier essai, “Robespierre…

Marcel Gauchet, Jean-Luc Mélenchon. Robespierre, le retour ?

Article issu du magazine n°95 décembre 2015 Lire en ligne
À Lire aussi
Alain Badiou, Marcel Gauchet. Que faire ?
Alain Badiou, Marcel Gauchet. Que faire ?
octobre 2014
Marcel Gauchet : « L’opposition est plutôt de l’ordre de l’affect »
Par Martin Legros
septembre 2012
Marcel Gauchet : « Il devient légitime de parler de soi »
Par Michel Eltchaninoff
septembre 2012
  1. Accueil-Le Fil
  2. Articles
  3. Marcel Gauchet: “Unis, mais pour combien de temps?”
Philosophie magazine n°178 - mars 2024
Philosophie magazine : les grands philosophes, la préparation au bac philo, la pensée contemporaine
Avril 2024 Philosophe magazine 178
Lire en ligne
Philosophie magazine : les grands philosophes, la préparation au bac philo, la pensée contemporaine
Réseaux sociaux
  • Facebook
  • Instagram
  • Instagram bac philo
  • Linkedin
  • Twitter
Liens utiles
  • À propos
  • Contact
  • Éditions
  • Publicité
  • L’agenda
  • Crédits
  • CGU/CGV
  • Mentions légales
  • Confidentialité
  • Questions fréquentes, FAQ
À lire
Bernard Friot : “Devoir attendre 60 ans pour être libre, c’est dramatique”
Fonds marins : un monde océanique menacé par les logiques terrestres ?
“L’enfer, c’est les autres” : la citation de Sartre commentée
Magazine
  • Tous les articles
  • Articles du fil
  • Bac philo
  • Entretiens
  • Dialogues
  • Contributeurs
  • Livres
  • 10 livres pour...
  • Journalistes
  • Votre avis nous intéresse